On ne peut plus attendre davantage : sur la nécessité de mesures anticapitalistes immédiates

La triple crise sanitaire, économique et sociale que nous traversons n’en finit plus de démontrer l’impuissance du mode de production capitaliste. Une impuissance mainte fois documentée ici même. Mais pour pouvoir juger réellement de la responsabilité du capitalisme, il est nécessaire de pousser l’analyse un peu plus loin : non seulement le capitalisme n’offre pas de solution, mais il est également un frein, un boulet encombrant pour toute tentative de résoudre la situation.

Mobilisons tous les moyens nécessaires de toute urgence ! La négligence capitaliste nous envoie au drame

Par Jérémy (Namur)

Même les politiciens les plus libéraux ont du se rendre à l’évidence et mettre en place des mesures exceptionnelles que ces mêmes idéologues qualifiaient encore d’irréalistes il y a à peine 8 mois : extension du droit au chômage, refinancement — hélas trop léger et tardif ! – de la santé publique, droit passerelle pour les indépendants… Toutes ces mesures, et bien d’autres, sont une tentative de stabiliser le système capitaliste secoué par la crise. Néanmoins, il faut soulever un paradoxe et souligner à quel point ces mesures vont à l’encontre de la logique du capital : l’assurance chômage est une des conquêtes du mouvement ouvrier, tout comme la sécurité sociale qui assure le financement public et la (quasi) gratuité des soins de santé. Et que dire de la tentative de sauvetage des travailleurs indépendants qui s’oppose à la logique du laissez-faire qui tient la libre concurrence pour le moyen de déterminer quel commerce doit survivre ou périr ?

Tout ça illustre bien l’instabilité intrinsèque du mode de production capitaliste, pétri de contradictions, et qu’il faut sans cesse sauver contre lui-même !

Mais il est possible d’aller encore plus loin. Un confinement généralisé, en étant une entrave à la liberté individuelle de chacun, serait également un obstacle à la valorisation du capital (par la réduction du travail) et à la réalisation du profit (par la diminution de la consommation). Le positionnement de la FEB est très clair à ce sujet. Mais la FEB ne conçoit l’économie que comme la poursuite de l’enrichissement de la minorité d’actionnaires. Elle ne s’intéresse pas à la vie des millions de gens qui créent les richesses. Sinon elle s’opposerait aussi à la vague de licenciements en cours dans le pays. Elle réduirait les dividendes pour investir dans la production utile pour solutionner la crise. C’est pour cette raison qu’alors même que les chiffres des contaminations s’envolent et en dépit des cris d’alerte de tous les experts compétents et des travailleurs de la santé à bout de souffle, les dirigeants politiques rechignent à y avoir recours. Notons au passage que l’extrémité d’un nouveau confinement aurait certainement pu être évitée si des mesures sérieuses avaient été prises plus tôt. Ce qui met une nouvelle fois en lumière l’enseignement trop bien connu du mouvement ouvrier, à savoir que les capitalistes n’agissent que s’ils y sont absolument contraints.

Lors du dernier Conseil National de Sécurité, le gouvernement s’est une nouvelle fois dédouané sur la responsabilité individuelle. C’est la musique qu’ils chantent depuis 40 ans : « l’individualisme méthodologique », « il n’y a pas de société que des individus et leur famille ». C’est oublier que, contrairement au fantasme des « élites néolibérales », la société réelle est structurée en classes sociales. Et cette structure limite de fait la liberté individuelle des travailleuses et des travailleurs qui ne subsistent que grâce à leurs salaires. Or, combien d’endroits manquent encore des dispositions essentielles garantissant la santé de ceux qui y travaillent ! La grève des travailleurs de Jupille est exemplaire à cet égard. Elle illustre le rôle que les syndicats ont à jouer dans la défense de la santé de toutes et tous.

Notre force, nous la tirons de notre solidarité. C’est pourquoi il est impératif de soutenir le personnel de santé en lutte. À la fois dans la rue, comme nous l’avons fait en manifestant à leur côté cet été. Mais également en faisant tout ce qui est possible pour ne pas saturer les hôpitaux. Les Comités pour la Prévention et la Protection du Travail (CPPT) doivent avoir toute latitude pour évaluer les conditions sanitaires sur les lieux de travail et pour décider de la suspension du travail sans perte de salaire partout où ces conditions sont insuffisantes pour éviter la propagation du virus.

À plus large échelle, il reste à traiter la question de l’allocation des moyens pour la production du matériel de soin et de prévention nécessaire. Nous avons déjà décrit le gaspillage de ressources que constitue la chasse gardée et la mise en compétition des firmes pharmaceutiques pour obtenir les brevets de vaccin avant leurs concurrentes. Il faut également évoquer la vaste capacité de tests inutilisée sous le contrôle de capitaux privés alors que le nombre de tests sous contrôle public est saturé. Le refus de les réquisitionner relève du choix politique de faire passer le droit de propriété privée capitaliste avant les intérêts de la majorité de la population. Or nous avons déjà illustré plus haut comment toutes les mesures prises contre la crise sont anticapitalistes. Nous réclamons simplement de pousser cette logique jusqu’au bout !

La réquisition des ressources nécessaires, la réallocation des moyens vers la production utile et l’arrêt des secteurs non essentiels auraient des conséquences catastrophiques pour les profits des groupes privés. Cependant, la recherche de leur maximisation est la condition sine qua non du mode de production capitaliste. Une contestation sérieuse du principe de rentabilité qui étouffe les capacités productives de la société devra donc, nécessairement, s’accompagner d’une lutte politique déterminée pour la sauvegarde de nos emplois par la nationalisation des secteurs clés de l’économie comme la production pharmaceutique.

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