Après sept mois, l’effondrement complet des hôpitaux est imminent. Ensuite il faudra décider qui soigner et qui laisser mourir. Il n’y a pas de temps d’attente pour voir si les mesures actuelles fonctionnent ou non. Il est scandaleux que dans un pays comme la Belgique, avec un secteur pharmaceutique aussi développé et un tel savoir-faire en matière de soins, cela puisse arriver. Combien de vies humaines allons-nous encore perdre pour préserver « l’économie » (c’est-à-dire : la soif de profits) ?
Déclaration du Bureau Exécutif du PSL/LSP
Toutes les entreprises qui ne sont pas en mesure de garantir la santé et la sécurité doivent fermer, avec maintien des salaires
N’accordons aucune confiance au patronat. Le 14 octobre, Pieter Timmermans, de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB) osait encore dire : « Force est de constater que le problème se situe dans la sphère privée, et dans les universités. Nos entreprises, elles, ont fait tout ce qu’elles pouvaient faire. » Cela a été contredit dans le journal patronal L’Echo ce 29 octobre : au total 67% des entreprises sondées négligent les mesures de sécurité en vigueur.
Chez AB InBev, il a fallu plus d’une semaine de grève après qu’une dizaine de travailleurs aient été infectés pour que de nouvelles mesures soient prises. Ce mardi 27 octobre, une dizaine de magasins Carrefour Market (Mestdagh) étaient en grève face à des mesures de sécurité à géométrie variable, le non-respect des horaires, des travailleurs assumant des responsabilités qui ne leur sont pas attribuées, le recours d’intérimaires par centaines ainsi que des étudiants,…
Il est vrai que les données manquent en Belgique concernant les foyers de contamination – les « clusters » – en milieu professionnel, contrairement aux autres pays européens. En France, selon une analyse réalisée par Santé Publique France, près de 25 % des clusters identifiés depuis le déconfinement l’ont été sur les lieux de travail (entreprises privées et services publics). Une étude de Médecine pour le Peuple parvient à un chiffre à ses alentours avec 21% de contaminations liées au travail.
Toutes les entreprises qui ne peuvent pas garantir la santé et la sécurité doivent être fermées maintenant sous condition contraignante du maintien du salaire. Et cela pour deux raisons. La première est d’enrayer l’explosion actuelle de contamination. Deuxièmement, cela permettrait de libérer du personnel afin de renforcer les soins de santé, sur une base volontaire et bien entendu entièrement rémunérée. C’est aussi nécessaire dans l’enseignement, car un certain espace doit être laissé pour que la société puisse prendre en charge les enfants qui en ont besoin.
Mobiliser dans l’immédiat tous les moyens et les forces disponibles
Nous ne parviendrons pas à répondre aux besoins sanitaires sans réquisition de ce qui est nécessaire. Il est totalement absurde que l’on se retrouve à court de tests en Belgique quand on sait quelle est la taille du secteur pharmaceutique dans le pays. Le plus grand centre de contrôle qualité pharmaceutique au monde se trouve par exemple à Wavre, chez GSK. Le personnel et l’infrastructure du secteur doivent être mobilisés, notamment pour assurer une quantité suffisante de tests et l’analyse rapide de leurs résultats. Sauvegarder ce secteur de la logique de profit est aussi essentiel pour la production et la diffusion d’un futur vaccin.
Tous les experts et médecins le disent d’une même voix : ce ne sont pas seulement les lits qui manquent, c’est aussi le personnel. Cela ne tombera pas du ciel : les décennies successives de politiques d’austérité et de réduction des budgets sont responsables. En raison du manque de moyens, le personnel restant s’est retrouvé en nombre insuffisant, avec une charge de travail et des conditions de salaire et de travail si mauvaises que beaucoup ont jeté l’éponge. Cette situation, on l’a connue dans les soins de santé, mais aussi dans l’enseignement.
Un plan d’investissements publics massifs doit de toute urgence être concrétisé pour le secteur des soins de santé et celui de l’enseignement, pour débuter la formation de nouveaux personnels. De meilleurs salaires et conditions de travail sont nécessaires pour mettre fin à l’important turn-over du personnel. S’il faut doubler le personnel soignant pour faire face à une 3e ou une 4e vague, cela ne tombera pas du ciel ! Pour financer cela, appliquons une taxe immédiate sur les fortunes, la meilleure manière de nous prémunir de la fuite des capitaux étant et la prise en mains publiques du secteur financier.
En 2008, quand la crise financière a éclaté, l’État belge a déboursé 27,3 milliards d’euros pour sauver les banques. Comparons aux insuffisantes promesses pour les soins de santé qui doivent encore être concrétisées. Les banques ont été sauvées, mais le personnel de santé doit retourner dans les tranchées après n’avoir reçu que des applaudissements. Cette différence d’approche est criminelle. Si nos soins de santé étaient une banque, ils auraient été sauvés depuis longtemps !
C’est au mouvement des travailleurs de décider
C’est aux travailleuses et aux travailleurs de décider eux-mêmes des entreprises et activités qui sont essentielles ainsi que des conditions sous lesquelles organiser le télétravail. Les délégués syndicaux font tout ce qui est en leur pouvoir pour transformer la colère sur le terrain en mesures efficaces pour contrer la propagation du virus. Mais à ce stade de la pandémie, les vannes sont ouvertes.
Des comités de crise du personnel de l’entreprise doivent être constitués autour du représentant syndical dans le Comité pour la prévention et la protection au travail (CPPT) pour assurer le respect de toutes les mesures de protection nécessaires. Là où il n’existe pas de CPPT, des comités de crise sont essentiels et peuvent constituer un tremplin vers un futur CPPT. Ces comités de crise représentent des éléments importants du contrôle des travailleurs à un moment où il est évident que ce sont les travailleurs qui font tourner le monde.
C’est du reste la meilleure manière de se préparer à réagir en cas d’annonce d’un plan de restructuration ou de fermeture autour de revendications telles que la nationalisation sous contrôle et gestion des travailleuses et des travailleurs des entreprises qui procèdent à des licenciements collectifs.
Les dirigeants syndicaux doivent prendre leurs responsabilités le plus tôt possible et soutenir la colère de la base en l’organisant au niveau national par la déclaration d’une grève générale. C’est la seule façon d’augmenter la pression sur le gouvernement et le patronat pour que les entreprises qui ne peuvent pas garantir la santé et la sécurité soient fermées.
En Espagne, la grève a permis d’arracher l’augmentation du budget des soins de santé de 151 %. En Allemagne, la lutte des travailleuses et travailleurs du secteur public a permis d’assurer au personnel soignant une hausse de salaire de 8,7 %. Seule la lutte paye !
Nous allons devoir nous battre pour nous assurer de disposer d’une société responsable qui protège la population et non la soif de profits d’une infime élite. Ce que nous voulons, c’est une société où nous travaillons pour vivre et non pas où nous vivons pour travailler, encore moins avec le risque d’être contaminés et de mourir. La seule société qui permettrait cela est une société socialiste démocratique.
Nos vies, pas leurs profits !
- Fermeture immédiate de toutes les entreprises qui ne peuvent pas garantir la santé et la sécurité, avec maintien du salaire !
- Création de comités de crise du personnel – autour des délégués du CPPT là où ils existent – pour imposer et superviser les mesures sanitaires !
- Mise en mains publiques de l’industrie pharmaceutique pour une expansion massive des capacités de test et d’analyse ainsi que pour une politique de vaccination contrôlée par le public !
- Amélioration immédiate des conditions de travail et de salaire dans les soins de santé et l’enseignement !
- Des soins psychologiques et sociaux gratuits pour le personnel soignant et toutes celles et ceux qui souffrent d’isolement afin de faire face aux conséquences de cette situation émotionnellement stressante !
- Développement d’un plan d’investissements publics massifs dans les soins de santé et l’enseignement !
- Taxation immédiate sur la fortune pour dégager les moyens nécessaires, nationalisation du secteur financier contre la fuite des capitaux !
- Pour une société socialiste démocratiquement planifiée par la classe ouvrière !