L’appel à une alternative de gauche a de plus en plus d’écho en Europe… Mais quelle alternative?

Bas de Ruiter, Offensief (notre organisation soeur aux Pays-Bas)

Pays-Bas: défaite du gouvernement et progression de la gauche

Les élections communales du 7 mars ont provoqué un séisme politique aux Pays-Bas. Les partis qui en sont sortis vainqueurs sont le PvdA (l’équivalent de notre PS) qui est passé de 15,6% des suffrages à 23,3%, et le Socialistische Partij (un parti de gauche plus radical) qui a progressé de 2,9% pour atteindre 5,7% des voix.

La victoire électorale de ces deux partis a eu des répercussions au plan national. Selon un sondage du 17 mars, le PvdA et le SP disposeraient ensemble d’une majorité de 79 des 150 sièges au parlement. Ce résultat montre qu’une grande partie de la population est à la recherche d’une alternative à la politique d’austérité néolibérale menée par le gouvernement de droite. Mais toute la question est de savoir en quoi consiste cette alternative et comment elle pourra se mettre sur pied.

Les négociations pour la formation de coalitions locales vont bon train et des majorités réunissant le PvdA, le SP et Groen Links (les Verts) sont possibles dans plusieurs communes. Selon nous, une coalition communale qui prétend défendre les intérêts des travailleurs et des jeunes devrait au minimum satisfaire les revendications suivantes pour faire la différence avec la politique actuelle:

* Investir massivement dans des logements à un prix abordable;

* Etendre la gratuité des transports en commun au lieu de les privatiser;

* Créer des emplois en nombre dans les services communaux (maisons de quartier, écoles, services de nettoyage, transports en commun, pompiers,…), avec des contrats à durée indéterminée et un salaire décent;

* Augmenter les budgets du secteur non-marchand (soins à domicile, transport des handicapés,…) et refuser toute ingérence du privé dans ce secteur;

* Augmenter les allocations et les aides sociales;

C’est le minimum pour commencer à résoudre les problèmes sociaux. Un tel programme coûte évidemment de l’argent et il va souvent à l’encontre de la législation nationale. Un collège de gauche devra donc engager la lutte contre le gouvernement de Balkenende en mobilisant la population et en organisant des actions de protestation. Mais toute la question est évidemment de savoir si les partenaires pressentis du SP pour une coalition de gauche, à savoir le PvdA et GroenLinks, sont prêts à s’engager dans une telle lutte…

Si, en dépit de cela, le SP décidait tout de même de gouverner avec ces deux partis, il prendrait le risque considérable d’être considéré comme coresponsable de la politique d‘austérité. Là où le SP fait déjà partie d’une coalition locale, comme à Nijmegen, la fraction SP du conseil communal a été placée devant la ‘nécessité’ d’économiser dix millions d’euros et a même approuvé la privatisation des bus et du service du logement!

Que faire alors?

Des améliorations peuvent aussi être imposées depuis l’opposition si le SP honore son ancien slogan “pas de fraction sans action” et mobilise la population, si possible avec les syndicats. L’Histoire nous apprend que rien n’est acquis sans lutte, que ce soit sur les plans local, national ou international. Si le SP prend la tête de ces luttes locales et s’il les lie à la lutte plus générale pour une société socialiste, il pourra se transformer en un véritable parti des travailleurs, un parti capable de transformer réellement la société. Offensief, l’organisation soeur du MAS/LSP aux Pays-Bas, milite pour cette stratégie, au sein et en dehors du SP.

Un grand potentiel pour la gauche en Allemagne

Dans le feu de la lutte contre l’offensive générale que le gouvernement de coalition entre socialistes et écolos de Schröder a menée ces dernières années contre les travailleurs et les chômeurs, une nouvelle formation politique de gauche, le WASG, a vu le jour. Aux élections nationales du 18 décembre dernier, les listes communes du WASG et du PDS (l’exparti communiste d’Allemagne de l’Est) ont obtenu 8,7% des voix et 54 sièges. Aujourd’hui le WASG compte 12.000 membres. Depuis les élections, les directions de ces deux partis souhaitent accélérer la fusion des deux formations.

En préparation aux élections régionales qui auront lieu en septembre, il y a eu une discussion sur la politique que le PDS a menée à Berlin avec le SPD, le parti social-démocrate, dans le gouvernement régional. A Berlin, le PDS s’est rendu coupable d’une politique qui a notamment introduit les emplois “à un euro” et la vente/ privatisation des services publics, entre autres celle de 60.000 logements sociaux. Ce sont les caractéristiques d’une politique néolibérale dont le WASG se distancie au niveau national et qui ne constituent évidemment pas une base saine pour la formation d’un nouveau parti de gauche. Comme l’a déclaré Lucy Redler, présidente du WASG à Berlin et membre du SAV (notre organisation-soeur en Allemagne), “on ne peut pas causer du socialisme le dimanche et imposer des coupes d’austérité pendant la semaine”.

Pour une candidature indépendante

Lors du congrès berlinois du WASG le 25 février, deux tiers des délégués ont voté une résolution qui prône une candidature indépendante du WASG lors des élections régionales de septembre. Cette décision a été prise après une période d’intense discussion démocratique dans les organes élus et dans les sections locales du parti. Les membres ont ensuite validé cette décision par un référendum interne. Un sondage préélectoral a aussi confirmé cette option : la coalition « rouge-rouge » (SPD/PDS) serait sanctionnée pour sa politique néolibérale et le WASG recueillerait 4,5% alors qu’il n’a encore mené aucune campagne. 5% des voix suffiraient pour que le WASG obtienne des élus au parlement régional, qui pourraient alors faire entendre une voix réellement à gauche. Si le WASG ne se présente pas seul, bon nombre de votes de protestation iraient sans doute à l’extrême droite.

L’unité oui, mais laquelle?

Cette décision va donc à l’encontre de la volonté de la majorité du comité national du WASG et de la direction nationale et locale du PDS (maintenant Linkspartei.PDS) qui veulent imposer à tout prix une liste commune lors des élections régionales et, dans la foulée, une fusion entre les deux formations.

Le WASG berlinois ne s’oppose ni à l’unité à gauche ni à la constitution d’un grand parti démocratique au plan national, mais il refuse d’endosser la responsabilité de la politique néolibérale menée par le PDS berlinois en coopération avec le SPD. En effet, l’unité à gauche ne peut s’enraciner que dans la lutte contre la politique néolibérale.

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