Médias : RTBF, travail précaire et qualité d’information

Un nouvel hebdomadaire belge est né durant le mois de mars : Marianne (Edition belge). Peu de temps après la parution du premier numéro, une carte blanche très intéressante a été publiée sur leur site, dénonçant vigoureusement la ‘‘précarité organisée’’ des pigistes au sein de la RTBF, au cœur-même d’un service public, menaçant ainsi les droits sociaux et la qualité d’information.

Article tiré de l’édition d’avril de Lutte Socialiste

Un pigiste est un travailleur payé à la tâche (c’est-à-dire à une succession de petits contrats). Le développement du recours à ce système pose de nombreuses questions concernant la qualité de l’information : un journaliste rémunéré à la pièce aura plus de difficultés à enquêter sur un dossier sur le long terme. Il s’agit aussi d’une pression favorisant de travailler sur des sujets qui payent au détriment d’investigations approfondies. Sans encore parler de la pression patronale directe sur l’information puisqu’aucune garantie d’emploi n’existe. Une étude de la Fédération internationale des journalistes datant de 2006 s’était notamment penché sur le sujet : ‘‘Dans les pays où de nombreux journalistes sont employés dans le cadre de contrats à durée déterminée renouvelables indéfiniment, les réponses ne dissimulent pas que les journalistes sont soumis à des pressions pour que leurs articles soient moins acerbes, plus commerciaux et laissent entendre que les chances de renouvellement de leur contrat pourraient être en danger.’’

La carte blanche des pigistes de la RTBF expliquait ainsi : ‘‘Jean-Pierre Jacqmin, directeur de l’information à la RTBF, répondait par ces mots à la question de savoir si la RTBF faisait un appel croissant aux pigistes : ‘‘Ce n’est pas une volonté structurelle mais comme le cadre est très juste, dès qu’une personne est absente, on doit recourir à des pigistes…’’ (…) Oui, la RTBF recourt à du personnel sous statut précaire : un recours d’ailleurs tellement fréquent et constant qu’il reflète bien, sans aucun doute, une volonté structurelle.’’ C’est même tellement structurel qu’un bureau d’agence d’intérim existe au sein même des locaux de la RTBF!

Le collectif signataire dénonce ainsi l’usage, depuis des années déjà, de contrats à la journée, entrecoupés de contrats passés via une agence d’intérim pour ‘‘éviter que cette succession de petits contrats n’ouvre un quelconque droit à un contrat à durée indéterminée… Le système est bien organisé, et pour cause : loin d’être de petits remplacements occasionnels, ces piges sont nombreuses et occupent souvent la plus grosse partie de l’emploi du temps de ceux qui les prestent. Ce statut (…) rend les pigistes vulnérables en ne leur permettant pas de s’exprimer librement, et en les mettant en concurrence les uns avec les autres. ‘‘Si tu n’es pas content, tu peux aller voir ailleurs.’’ Ce statut crée aussi deux catégories de travailleurs : ceux qui ont droit à des jours de récupération et ceux qui n’y ont pas droit, et ce pour un même poste de travail. Diviser pour régner semble d’ailleurs être la seule politique des ressources humaines appliquée à l’ensemble du personnel de la RTBF, qu’il soit pigiste, contractuel, ou statutaire.’’

Combien sont-ils à subir ainsi de telles conditions de travail en tant que journaliste, caméraman, preneur de son, cantinière ? Nul ne le sait, les ressources humaines de la RTBF refusant toute transparence à ce sujet.

Les cheminots, postiers, fonctionnaires,… ne peuvent qu’être solidaires de cette situation qu’ils vivent au quotidien : l’arrivée massive des méthodes du privé dans le secteur public, dans un contexte d’opacité totale et d’insécurité sur l’avenir du service. Comme dans tous les autres services publics, la qualité de la prestation s’en ressent.

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