Assainir 22 milliards d’euros d’ici 2015

Parmi les négociateurs, l’unité règne pour dire qui va payer, mais pas sur la méthode

Au moment de boucler ce journal, personne ne savait encore ce qui allait bien pouvoir figurer dans la note de Di Rupo. Un chiffre se dégageait toutefois, celui de 22 milliards d’euros à assainir pour 2015. La seule chose que Di Rupo a laissé entendre, c’est qu’il cherche à trouver un équilibre 50/50 entre augmentations des revenus et diminutions des dépenses. La N-VA et les libéraux (des deux côtés de la frontière linguistique) ont alors lancé l’offensive : pour eux, l’accent doit être mis sur l’effort dans les dépenses. Di Rupo se donne un air plus ‘‘social’’, sans avoir précisé où il allait chercher ces nouveaux revenus et quelles dépenses allaient passer à la trappe…

Par Anja Deschoemacker, article tiré de l’édition de juillet-août de Lutte Socialiste

Les différences de style dans le paysage politique belge sont bien connues. La N-VA, l’Open VLD et le MR veulent instrumentaliser la crise pour passer à la vitesse supérieure avec la politique néolibérale. Le modèle allemand, avec son augmentation gigantesque du secteur des bas salaires, les rend jaloux, tout comme les petits et moyens patrons de l’Unizo et du Voka. Ce n’est pas non plus une coïncidence si Bart De Wever a eu du succès lors de son passage au cercle patronal wallon le Cercle de Wallonie (le 30 novembre 2010).

Les patrons wallons auront surtout apprécié cette partie : ‘‘Lorsque les Flamands (pour De Wever, les syndicats n’existent pas en Flandre, alors qu’ils comprennent plus de membres que tous les partis flamands mis ensemble !) disent que nous devons prendre l’exemple de l’Allemagne, où le travail intérimaire a été assoupli, les allocations de chômage réformées, des mesures prises afin de contrer la flambée des coûts du travail et où le gouvernement a introduit des réformes difficiles mais nécessaires, la majorité de la Wallonie se cabre une fois de plus et dénonce des bains de sang sociaux !’’

Quelle douce musique aux oreilles des partis libéraux ! Les autres partis sont moins ouvertement sur cette ligne, mais c’est largement leur politique qui a introduit modération salariale, démantèlement de la sécurité sociale, privatisations et libéralisations des services publics.

Au début de l’ère néolibérale, les partis bourgeois ont vite compris qu’une politique de confrontation directe avec les syndicats a souvent un effet contreproductif. La tactique du salami s’est donc imposée comme stratégie privilégiée, une tactique assurant graduellement – mais structurellement – le démantèlement et l’érosion de l’Etat-providence d’un côté et l’augmentation des profits des grandes entreprises de l’autre.

N’entretenons aucune illusion ! Le PS lui aussi ne reviendra en aucune façon sur la baisse des contributions patronales à la sécurité sociale. A l’instar des autres partis, il souhaite qu’elles baissent encore, probablement plus particulièrement pour les bas salaires. Quant aux ‘‘revenus alternatifs’’ pour la sécurité sociale qui seront alors nécessaires, on ira les chercher chez ‘‘tout le monde’’, surtout dans les salaires nets des travailleurs.

La presse flamande a attaqué Di Rupo lorsqu’il a défendu l’indexation et l’actuel âge de la retraite contre les recommandations européennes, mais Yves Leterme lui aussi a défendu l’index avec des termes identiques il y a quelques mois. Il ne faut cependant pas s’attendre à ce qu’ils reviennent sur l’index-santé (une manipulation de l’indexation qui assure que le pouvoir d’achat des salaires et des allocations diminue, même malgré l’indexation). A un certain moment, au contraire, le CD&V/CDH et le PS/SP.a accepteront une nouvelle ‘‘adaptation’’ de l’index.

Ces deux principaux courants – ceux qui veulent immédiatement provoquer la casse sociale et à entrer en confrontation avec les syndicats ainsi que ceux qui prévoient des ‘‘sangsues’’ qui font leur boulot tous les jours, mais qui font moins de bruit au début – n’offrent pas de perspectives agréables.

Préparons nous à lutter contre ces deux stratégies. Dans les syndicats, il est urgent de briser les liens que la direction continue à entretenir avec des partis qui n’ont à offrir aux travailleurs qu’une dégradation continue de leurs conditions de vie. Leurs partis frères en Grèce, en Espagne et au Portugal indiquent ce à quoi nous devons nous attendre lors d’une nouvelle phase de la crise financière ou économique, ce qui n’est pas à exclure pour la Belgique.

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