Test-Achats en campagne contre les cheminots

Piquet de grève à la gare de Gand Saint Pierre.

Le magazine Test-Achats veut traîner la SNCB devant les tribunaux pour la contraindre à indemniser les voyageurs qui n’ont pas pu prendre le train lors des grandes grèves de l’automne dernier. Cette première en droit belge est un joli cadeau pour la direction de la SNCB et le gouvernement de la part de cette « organisation de défense des consommateurs ». Cette démarche joue le jeu de ceux qui veulent limiter le droit de grève. La campagne de propagande médiatique anti-grève peut désormais compter sur Test-Achats. Au bénéfice des intérêts des consommateurs? Non. Bien au contraire.

Un magazine défendant réellement les intérêts des utilisateurs et des consommateurs serait favorable à un service public débarrassé de la logique commerciale! Son analyse devrait tout d’abord prendre pour point de départ la prestation de services. Et on ne peut pas exactement affirmer qu’elle s’est améliorée ces dernières années… Voici quelques données, histoire de rafraîchir la mémoire de Test-Achats.

En 2014, le nombre total de passagers sur le trafic intérieur de la SNCB était de 224,8 millions.(1) Dix ans plus tôt, il s’agissait de 178 millions(2), une belle augmentation donc. Mais concernant le personnel et le matériel, on est loin d’avoir connu pareille avancée. Le nombre de travailleurs est passé de 39.000 à 34.000, soit encore 3.500 de moins que la réduction initialement prévue (3). Le nombre de locomotives est passé de 1.517 à 1.329 en 2010. Les tarifs pour les usagers ont, par contre, bien augmenté. Le revenu que tire la SNCB du trafic intérieur de passagers (hors administration) a augmenté de 50% sur la même période (voir la note n°2)

Globalement, ces chiffres démontrent qu’il y a 25% de passagers en plus, qu’ils paient 50% plus cher pour un service porté par un personnel diminué de 10% et avec 13% de locomotives en moins.

Les compensations exigées par Test-Achats correspondent aux objectifs de la campagne promue par le gouvernement contre les actions de grève. Cela attire l’attention sur l’impact de la grève au détriment des raisons mêmes de ces actions de protestation. Cette campagne de test-Achats pourra facilement être utilisée contre le personnel alors que ce dernier s’oppose précisément à l’effondrement de la prestation de services. Quels sont donc les intérêts défendus par ce magazine ? Certainement pas ceux des voyageurs, pour qui la politique actuelle signifie de payer plus cher un service de moins bonne qualité. Moins de personnel et moins de matériel, cela signifie concrètement plus de retards et de problèmes techniques. Les navetteurs peuvent en témoigner… Finalement, le service minimum que veulent imposer la direction et le gouvernement, cela devient progressivement la règle quotidienne! Mais il ne faut pas compter sur Test-Achats pour dénoncer ça.

Les cheminots ont déjà mené de nombreuses actions contre la gestion catastrophique de la direction et des autorités. Et les choses sont destinées à empirer avec les nouvelles propositions sur table avec le nouveau protocole d’accord social qui comprend notamment l’idée de remercier plus facilement de le personnel avec une indemnité de départ d’un an et un conseil d’outplacement.

La pénurie de personnel a pour conséquence que des jours de congé ou de récupération ne peuvent être pris. L’année dernière, une grève a eu lieu en juin sur ce sujet : plus d’un million de ces congés étaient encore en attente au sein de l’entreprise. La proposition actuellement sur table suggère que cette situation devrait perdurer : «Sur base de l’évolution de l’emploi dans les trois entreprises, le nombre de recrutement nécessaires dans les fonctions opérationnelles jusqu’en 2025 peut être estimé à une moyenne de 1.200 employés par année.» En terme d’évolution de l’emploi, en comptant les départs en retraite, on parle bel et bien de la poursuite de la situation de pénurie de travailleurs. Le personnel devrait également être encore plus flexible. Tout cela alors que moins d’investissements sont prévus dans le matériel.

Les cheminots sont partis en grève pour revendiquer un service optimal, c’est-à-dire plus d’investissements en personnel et en matériel afin d’améliorer le service. Cette approche est intégralement favorable aux intérêts des voyageurs. La direction, de son côté, veut – tout comme le gouvernement de droite – libéraliser les transports publics pour faire de la rentabilité le point central à partir duquel tout le service doit être organisé. Payer plus pour moins de services, encore une fois.

Alors que les embouteillages et l’engorgement du trafic routier sont de plus en plus importants, il est criminel que le gouvernement désire économiser davantage sur les transports en commun (train, tram et bus). Il est de l’intérêt de tous les voyageurs et navetteurs que la politique de ce gouvernement soit arrêtée. Test-Achats ferait mieux de défendre les intérêts des voyageurs en soutenant les actions de protestation contre le gouvernement et choisir ouvertement de défendre les grèves.

Pas de moyens suffisants pour investir dans de meilleurs transports publics? Au vu des cadeaux fiscaux aux grandes entreprises – les patrons exigent d’ailleurs quelques milliards de plus avec la réforme fiscale à venir – et des subsides annuels pour les voitures de société (4,1 milliards d’euros), le constat qui s’impose est qu’il s’agit simplement d’une question de priorités. Bart De Wever a encore récemment déclaré que toucher aux voitures de société est un tabou. Economiser sur les transports en commun n’en est évidemment pas un pour ce gouvernement. Cette politique organise les embouteillages et la pollution. Ce choix politique n’est pas le nôtre, et nous nous serions attendus à voir cette même approche adoptée par un magazine qui prétend défendre les intérêts des usagers.

(1) http://www.belgianrail.be/nl/corporate/Presse/Presse-releases/17_02_2015.aspx
(2) http://statbel.fgov.be/nl/statistieken/cijfers/verkeer_vervoer/vervoer/spoor/
(3) Voir notre article : http://www.socialisme.be/fr/11107/jo-cornu-vs-les-cheminots-travailler-plus-pour-un-moindre-salaire-pas-question

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