Semira Adamu: Le procès des gendarmes

Sur le banc des accusés: cinq gendarmes. Les autres gendarmes, leurs supérieurs, la direction de l’ex-Sabena, l’Office des Etrangers et les responsables politiques – principalement l’ex-ministre de l’Intérieur, Louis Tobback, et Johan Vande Lanotte qui en 1996 avait permis l’usage du coussin – sont absents. Il n’ont pas à s’expliquer et ne seront pas jugés dans ce procès. Voilà dans quel camp est la justice et quels sont les intérêts qu’elle défend…

Cédric Gérôme

La défense des trois anciens gendarmes qui ont maintenu la jeune Nigériane lors de sa tentative de rapatriement en 1998, a réclamé devant le tribunal correctionnel un acquittement total et 2 suspensions du prononcé pour la prévention de "coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner". Le procureur estime quant à lui que "les ex-gendarmes ne méritent pas de condamnation car ils n’ont fait qu’obéir aux ordres. Il n’y a maintenant plus une seule audience où l’on ne sous-entende que la responsabilité viendrait "de plus haut". Il est facile pour la justice de pointer les responsables politiques quand elle leur offre l’immunité sur un plateau d’argent, qu’elle écarte dès le début de l’instruction leurs responsabilités et qu’elle requiert l’acquittement pour les deux supérieurs hiérarchiques. L’avocat de l’Etat belge a justifié la politique d’expulsion en vigueur à l’époque. Il n’envisage pas de dédommagement pour les proches de la victime car "ils n’ont pas démontré de lien affectif suffisant envers Semira". On a également suggéré que "la violence provenait également de l’extérieur", suscitée par les actions et les manifestations du Collectif contre les Expulsions et des pressions que celui-ci exerçerait sur des candidat(e)s réfugié(e)s. Ce procès offre un large écho à ce genre de témoignage alors qu’il entoure de silence celui des proches de Semira ou, par exemple, de l’adjudant présent à titre d’observateur, qui a témoigné de la violence des gendarmes. Quant aux vidéos visionnées lors des audiences, il y manque les 2 moments-clés: celui où Semira est censée s’être rebellée et celui où les gendarmes sont censés être intervenus pour tenter de la réanimer.

Le durcissement de la politique d’expulsion, la répression des militants et des sans-papiers montrent le vrai visage de la justice, son caractère de classe, jusqu’où la bourgeoisie et son appareil d’Etat peuvent aller en menant l’offensive sur tous les fronts. Donc la résurgence de la lutte des sans-papiers doit s’élargir dans une lutte globale qui fait le lien avec la remontée des luttes dues au redoublement des attaques néolibérales menées par le patronat et par les partis qui le représentent. L’exemple de la lutte des sans-papiers iraniens à l’ULB illustre que la victoire dépend d’un rapport de force conséquent et organisé que l’on ne peut construire que si la direction du mouvement adopte une position politique.

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