Tous les yeux sont fixés sur Athènes! Rapport de Grèce.

bart05Les élections ne sont encore qu’un apéritif, la construction du mouvement social sera cruciale!

Article et photos de Bart Vandersteene, porte-parole national du PSL en visite à Athènes.

En Grèce, la campagne électorale est maintenant terminée. Depuis ce vendredi minuit, plus aucune campagne ne peut être menée dans les rues. Mais le débat politique se poursuit toutefois encore au café, dans les salons et à la télévision. Aujourd’hui, les yeux du monde entier sont braqués sur Athènes. C’est que le résultat de ces élections pourrait bien annoncer une nouvelle ère pour le continent européen! Pour la première fois depuis le début de la crise, il est possible qu’un parti parvienne au pouvoir en se faisant le relais des aspirations de la population ordinaire, un parti sur lequel l’establishment n’exerce pas encore en ce moment de contrôle total, même si l’élite capitaliste fait tout pour y arriver. La classe dominante est devenue très nerveuse, et pas seulement en Grèce. Cette victoire pourrait constituer une gigantesque source d’inspiration pour les travailleurs et les jeunes du monde entier. Pour l’élite capitaliste mondiale s’annoncent de pénibles migraines.

Le jeudi soir, lors du meeting de clôture de la campagne de SYRIZA, au moins 25.000 personnes sont venues écouter les discours d’Alexis Tsipras (SYRIZA) et de Pablo Iglesias (Podemos). La séance fut lancée par un clin d’œil à la chanson  »First We Take Manhattan » de Leonard Cohen : «Nous prenons d’abord Athènes, puis ensuite Madrid.» D’ici la fin de l’année se dérouleront des élections générales en Espagne et le nouveau parti de gauche Podemos se trouve actuellement en tête des sondages. Il est certain qu’une victoire de SYRIZA ce dimanche renforcerait la confiance en la lutte anti-austérité en Espagne également.

La tragédie humaine que signifie concrètement la crise en Grèce est difficile à décrire par des mots. Le pays a été catapulté en plein dans le modèle néolibéral le plus dur pour, selon l’Union Européenne, en finir avec le fossé existant vis-à-vis de l’Europe occidentale. Cet objectif était toutefois conditionné au respect des prescriptions de l’Union européenne, du Fonds Monétaire International et d’autres institutions capitalistes. L’impôt sur les sociétés a été réduit de moitié pour attirer les investissements, les services publics ont été privatisés pour les rendre « plus efficaces » et aider le gouvernement à réunir de l’argent. Les banques, nationales et étrangères, ont donné libre cours à leurs pratiques et ont convaincu le peuple grec de s’engager dans la voie des prêts à risque en racontant de fantastiques histoires basées sur l’avenir prospère assuré par le modèle néolibéral européen. Le parti social-démocrate PASOK, considéré jusque là comme le parti le «plus à gauche» en Europe, est entré dans la danse et a jeté par dessus bord toute sa critique de l’économie de marché.

Bart Vandersteene prendra la parole à Liège ce 5 février au côté d'un représentant de SYRIZA au Parlement européen. Ce débat prendra place à l'ULG, Place du XX Août, à 19h à la salle Wittert.
Bart Vandersteene prendra la parole à Liège ce 5 février au côté d’un représentant de SYRIZA au Parlement européen. Ce débat prendra place à l’ULG, Place du XX Août, à 19h à la salle Wittert.

Aujourd’hui, 33% des Grecs n’ont pas accès aux soins de santé. Certaines écoles sont totalement dépourvues de matériel, des hôpitaux se retrouvent sans le moindre médicament, les pensions ont baissé en moyenne de 45%, 32% de la population vit sous le seuil de pauvreté et 1,3 million de Grecs sont sans emploi. Diverses estimations font état du fait qu’au cours de ces dernières années, le 0,1% le plus riche de la population a accumulé environ 600 milliards de dollars (soit près du double de la dette nationale) sur des comptes bancaires en Suisse et ailleurs en profitant de la voie ouverte par leurs amis politiques. Même en pleine crise, ils engrangent encore plus de profits et de richesses.

C’en est assez ! La majorité des Grecs n’en peut plus de la misère, mais elle en a aussi marre des beaux discours des partis classiques. En 2009, le PASOK avait encore pu remporter 45% des voix aux élections. Ce soir, il n’est même pas certain que le parti parvienne à obtenir les 5%. Ailleurs en Europe, un sort similaire attend les autres partis traditionnels qui ont si ouvertement trahi leurs origines et leurs promesses de représenter la classe des travailleurs.

Une campagne anti-SYRIZA sophistiquée…

Ce dimanche 25 janvier, les bureaux de vote resteront ouverts jusqu’à 19h, heure locale, après quoi seront publiés les premiers sondages de sortie des urnes. La tendance principale est déjà claire. Dans quelles mesures SYRIZA remportera les élections? Une majorité absolue est-elle possible? Divers détails importants ne seront connu que durant la nuit ou au matin: quels partis parviendront à atteindre le seuil électoral des 3% par exemple, ce qui aura une influence dans la répartition exacte des sièges. Dans la plupart des sondages, SYRIZA dépasse la Nouvelle Démocratie, le parti de l’actuel Premier ministre Samaras.

Divers détails peuvent avoir leur importance. 300.000 Grecs, essentiellement des jeunes, ont quitté le pays au cours de ces cinq dernières années à la recherche d’un meilleur environnement pour construire leur vie. Ils ne disposent pas du droit de vote à moins d’être revenus en Grèce pour le week-end. Il s’agit d’une importante restriction du droit de vote. Le gouvernement aurait par contre réservé quelque 10.000 vols pour de fidèles électeurs qui vivent dans les centres économiques et politiques européens de Londres, Bruxelles ou encore Francfort.

Environ 100.000 jeunes qui ont récemment atteint l’âge de 18 ans n’ont pas pu être enregistrés comme électeurs. Il ne s’agit pas d’une coïncidence. Les partis austéritaires savent très bien que la majorité des jeunes, tant ceux qui vivent en Grèce que ceux qui sont partis à l’étranger, sont favorables à SYRIZA et veulent protester contre l’establishment politique qui prive d’avenir la jeunesse. Une lutte des plus âpres sera également menée dans les centres de dépouillement. Les partis austéritaires feront tout ce qui est en leur pouvoir pour déclarer invalides le plus possible de voix favorables à SYRIZA.

Au cours de la campagne électorale, aucun mensonge ni effort n’ont été épargné pour éviter une trop grande victoire de SYRIZA. L’église, les médias dominants (qui appartiennent à l’élite économique), les personnalités grecques, etc. tout le monde a essayé de susciter la peur vis-à-vis de SYRIZA. Mais cette campagne d’intimidation a perdu de son effet. L’autorité des institutions partisanes de la politique d’austérité est fondamentalement compromise, ainsi que leurs «conseils».

La campagne anti-SYRIZA n’est d’ailleurs pas menée que de l’extérieur du parti. En son sein, des courants veulent se débarrasser des aspects les plus radicaux du parti. De nombreux ténors du PASOK ont quitté le navire en perdition et ont ensuite rejoint SYRIZA. Certains l’ont fait en raison d’une indignation honnête face à la politique menée par leur ancien parti, mais d’autres cherchaient tout simplement à poursuivre ailleurs leur carrière politicienne. Après les élections, cette question deviendra encore plus concrète. SYRIZA sera-t-il un parti qui jouera un rôle réel dans la défense des intérêts des 99% ou se laissera-t-il entraîner dans le sillage de l’élite grecque et européenne ?

A qui la faute ?

La question centrale dans les négociations avec l’UE et le FMI est de savoir si la dette publique grecque doit être remboursée en totalité ou non. Cette dette, qui s’élève actuellement à environ 320 milliards d’euros, est pour 227 milliards issue du programme de sauvetage de la troïka.[La «troïka» est le terme désignant l’Union européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international, trois organisations chargées de superviser la mise en place des mesures d’austérité par le gouvernement grec suite aux prêts d’urgence accordés à la Grèce par le FMI et d’autres gouvernements européens à des conditions drastiques, NDT] Seuls 5 à 10% de ce montant sont allés au budget réel de l’Etat grec. Le reste a été utilisé pour le sauvetage des banques et payer les intérêts sur les dettes contractées par le gouvernement pour sauver les banques! À juste titre, de nombreux Grecs refusent de considérer cette dette comme la leur.

Pendant les premières années de crise, les manifestations ont été massives, des dizaines de grèves ont eu lieu. Malheureusement, le seul résultat obtenu fut un léger ralentissement du rythme d’application des terribles mesures d’austérité. Au cours de ces dernières années, la population a elle-même spontanément de plus en plus organisé des initiatives de solidarité pour compenser les déficiences des autorités. Des centres médicaux ont été créés où les médecins, les infirmiers et de nombreux Grecs travaillent gratuitement avec du matériel et des médicaments donnés par la population grecque et les campagnes de solidarité internationales. Un tiers de la population grecque n’a pas d’assurance santé et, pour eux, il s’agit du seul accès aux services médicaux. Au total il y a actuellement en Grèce quelque 400 centres de distribution de nourriture ou de soins.

Un gouvernement SYRIZA pourrait donner un nouveau souffle à ces initiatives ainsi qu’aux luttes du mouvement organisé des travailleurs. Cette victoire pourra, pour la première fois depuis des années, changer le rapport de forces entre les classes sociales en faveur de la population. Mais la lutte devra aller plus loin, en Grèce et comme dans le reste de l’Europe. Nous continuerons à en parler sur ce site après ce dimanche.

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Meeting de Syriza à Athènes avec des orateurs de Podemos (Espagne) et Die Linke (Allemagne)

 

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Meeting van Syriza in Athene met ook sprekers van Podemos en Die Linke

 

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Tente de campagne de SYRIZA

 

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Rencontre avec la délégation internationale, avec Alexis Tsipras.

 

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