Congés payés : merci à la grève de nos arrière-grands-parents!

Ces derniers jours, une nouvelle offensive médiatique a déferlé contre les grévistes du rail. Tous les journaux traditionnels parlaient d’une seule voix : il était inouï qu’ils puissent arrêter le travail au début des vacances. Tout voyageur très mécontent de ne pas atteindre sa destination avait toute les chances de se retrouver dans les médias. En revanche, celui qui soutenait la grève ne méritait pas la moindre seconde d’attention de leur part. La rhétorique consistait à nouveau en la vieille rengaine selon laquelle les grévistes prennent la population “en otage” et sont, par conséquent, irresponsables.

Le fait que, le même jour, une fédération patronale, à savoir Unizo, plaide pour une crise politique n’a amené aucun journaliste de la presse écrite ou de l’audio-visuel à se demander qui est vraiment “irresponsable”. Appeler à mener le pays dans une crise politique semble être du domaine de l’acceptable. En revanche, mener des actions pour pouvoir prendre un arriéré de congés et de jours de récupération est complètement inacceptable.

Mais revenons-en aux vacances. Nous espérons que chacun des lecteurs de ce site pourra profiter de vacances bien méritées. Et qu’à cette occasion, il n’oubliera pas que les congés payés ne sont pas venus en les demandant poliment au patronat.

Au début du 20ème siècle, les patrons voyaient les congés payés comme une attaque en règle sur les coûts salariaux et la position concurrentielle des entreprises. C’est un large mouvement de grève en 1936 qui a mené à l’instauration des congés payés.

La grève de 1936 a eu lieu dans un contexte de reprise économique limitée après la récession du début des années 1930. Le mécontentement sommeillait déjà depuis des années et a explosé suite à un incident qui a mené à l’assassinat de deux militants de gauche par des fascistes avec à son apogée un demi-million de grévistes. De plus, lors de cette grève, la première grande occupation d’entreprise dans notre pays a pris place à la FN Herstal. La bourgeoisie craignait une explosion de colère sur laquelle les socialistes et les chrétiens-démocrates n’auraient pas prise. Cela mena à de larges concessions sous la forme d’une diminution de la durée du travail à 40 heures/semaine dans des secteurs où le travail lourd était d’application, des augmentations de salaire de 7% à 8%, l’instauration d’un salaire minimum et six jours de congé payés.

Auparavant, les congés payés n’avaient pu être arrachés que dans de grandes entreprises où les syndicats étaient forts. Ainsi en 1925, huit jours de vacances ont été obtenus dans les chemins de fer. Ce n’est, cependant, qu’en 1936 que le droit aux congés payés a valu pour tous. Pour les petites entreprises comptant moins de dix travailleurs, il a fallu attendre 1938. La pression de la protestation massive des travailleurs et la radicalisation après la Seconde Guerre Mondiale a fait que le pécule de vacances a été doublé. Sous la pression de la grève générale révolutionnaire et insurrectionnelle de 1960/61, une troisième semaine de vacances a été instaurée.

Chaque acquis que nous connaissons comme travailleur n’est pas tombé du ciel. C’est sur base de luttes et de grèves que nous pouvons arracher certaines choses. A chaque moment, les employeurs se sont plaints des grévistes qui “prendraient en otage” la population et l’économie et se comporteraient de façon irresponsable. Si nous avions laissé faire les employeurs, nous n’aurions aujourd’hui aucune protection sociale. Ils auraient organisé notre chômage et notre misère, ils auraient coulé notre pouvoir d’achat et celui qui ose dénoncer cela se voit immédiatement imposer le silence.

En ce début de vacances, pensons à la lutte de nos aïeux qui n’ont pas cédé au chantage patronal et à la rhétorique hystérique des médias et des politiciens traditionnels. Grâce à la lutte de nos arrière-grands-parents, nous pouvons bénéficier de vacances bien méritées. Et il faut bien dire qu’après une année de dur labeur, il n’y a rien d’irresponsable à prendre des vacances.

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