Kazakhstan. La dictature veut briser les syndicats et les marxistes

Nazarbajev, au Kazakhstan, est à la tête d’un régime dictatorial depuis l’effondrement de l’Union Soviétique. Mais le régime tremble de peur face à la vague de soulèvements de masse au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, car l’onde de choc se propage vers l’Asie, y compris l’Asie centrale. Parmi les mesures préventives du régime, une répression particulièrement brutale contre les syndicats et les militants marxistes.

Ce pays est riche en ressources naturelles, y compris en pétrole et en gaz. Les principaux acteurs internationaux actifs dans le pays sont Chevron, Exxon Mobil, Lukoil (Russie), Total et Eni (Italie). Mittal (Inde) est très actif dans le secteur minier. Dans la région de Manguistaou, dans l’ouest du pays, les travailleurs du pétrole sont en grève depuis plusieurs mois. Les revenus du pétrole de cette région sont d’une grande importance pour le régime, et briser la grève est une priorité. Les dirigeants des grévistes reçoivent ainsi régulièrement des menaces anonymes.

Ces menaces n’étaient pas lancées en l’air. L’été dernier, un délégué de l’entreprise MunayFiltrServis a été tué et un peu plus tard a suivi le meurtre de la fille de Kudaybergen Karabalayev, délégué dans l’entreprise de transport UOS-1 de la filiale de production OzenMunayGaz. La jeune fille de 18 ans a eu la mâchoire rompue et le crâne fracturé.

L’avocate des travailleurs du pétrole a de suite été arrêtée et risque elle-même une longue peine de prison pour ‘‘incitation à l’émeute’’. Une activiste qui faisait une grève de faim est poursuivie par la police, qui affirme qu’elle aurait attaqué un policier lors d’une opération policière. Cette femme pesait alors 45 kilos, mais elle aurait battu un policier anti-émeute de deux mètres… Elle aussi est menacée d’une longue peine de prison.

Les grévistes ont obtenu un peu d’attention internationale à travers le travail de solidarité du Mouvement Socialiste du Kazakhstan, qui organise des syndicats indépendants et des militants politiques. L’Eurodéputé Paul Murphy a visité la région pour soutenir les travailleurs. Le célèbre chanteur britannique Sting a lui aussi soutenu les grévistes en annulant un concert au Kazakhstan le 11 juillet dernier (prévu dans le cadre de l’anniversaire du président). Sting a versé une contribution au fonds de soutien des grévistes et a affirmé que ‘‘les travailleurs du pétrole et du gaz du Kazakhstan et leurs familles ont besoin de notre soutien et de l’attention des médias internationaux’’.

Dans la même logique de répression contre les travailleurs en grève, le régime a également lancé une nouvelle vague de répression contre des dirigeants connus du mouvement ouvrier. Ainur Kurmanov et Esenbek Ukteshbayev, deux dirigeants du Mouvement Socialiste du Kazakhstan et membres de la section du CIO au Kazakhstan, risquent des années de prison. A la mi-septembre, leur avocat avait annoncé qu’ils seraient poursuivis. Le journal Vzglyad (un quotidien d’affaire) a fait de cette nouvelle sa première page en disant : ‘‘La condamnation des dirigeants de cette organisations sera utilisée pour la liquider. Sans aucun doute, les autorités estiment que cette organisation est une force réelle et massive pour la contestation et qu’elles ne peuvent que l’attaquer en la brisant.’’

Ces deux marxistes sont poursuivis suite à une campagne menée contre l’expulsion de personnes incapables de rembourser leurs hypothèques. Lorsque les banques étaient en difficulté, elles ont été sauvées par le gouvernement. Mais quand la population a des problèmes, elle n’a qu’à se débrouiller. Le désespoir en a conduit beaucoup au suicide, mais d’autres ont choisi la voie de la résistance collective. Le Mouvement Socialiste du Kazakhstan a joué un rôle dans cette résistance et ses dirigeants sont maintenant accusés d’avoir poussé les gens au suicide ! Ils sont également accusés de ‘‘despotisme’’, des inculpations qui sont en général utilisées contre des bureaucrates qui sont allés trop loin quand ils se permettent eux-mêmes des privilèges. Tous deux risquent un emprisonnement de deux ans.

En 2010, le Kazakhstan était encore président de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE). Le pays est considéré, notamment par le gouvernement Belge, comme un régime normal. Le 7 octobre, c’est sans problème qu’a été organisé un match de football entre la Belgique et le Kazakhstan. Pour l’élite, le fait que ce dernier pays connait un régime dictatorial avec une répression arbitraire et brutale contre les dirigeants de l’opposition vaut moins que les très lucratifs contrats commerciaux.

Tant que leur procès est en cours, Ainur Kurmanov et Esenbek Ukteshbayev ne peuvent quitter la ville d’Almaty. Ainsi, le gouvernement espère éviter qu’ils ne témoignent début octobre devant une conférence de l’OSCE à Varsovie consacrée à la ‘‘dimension des droits humains’’.

La situation au Kazakhstan est de plus en plus tendue. Les hausses de prix rendent la vie insupportable. Les voix s’élèvent pour un niveau de vie décent et pour le droit de mener des actions collectives deviennent de plus en plus fortes. Tout comme au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, cela peut conduire à des explosions révolutionnaires. La présence d’une force socialiste organisée avec des dirigeants reconnus et un programme combatif de changement révolutionnaire de la société peut faire la différence au Kazakhstan. Le mouvement des travailleurs est en train de croître et commence à perdre sa peur face à l’élite politique et économique.

Le régime se prépare déjà à attaquer avant que la colère ne se transforme en une résistance révolutionnaire. L’enjeu est énorme pour les marxistes. Si le régime réussit à briser le mouvement des travailleurs et le Mouvement Socialiste du Kazakhstan, la population du pays vivra une période extrêmement sombre et difficile. Mais nous pouvons aider à éviter cela grâce à la solidarité internationale. Le PSL prend ses responsabilités dans ce cadre, et nous organisons plusieurs activités les semaines prochaines afin de soutenir le mouvement ouvrier et les révolutionnaires au Kazakhstan.

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