Le 10 février, le Conseil général de la CSC a approuvé le projet d’accord social avec une majorité plus étroite que jamais: 52% pour, 48% contre (147 voix pour, 135 contre, 17 abstentions). En comptant les abstentions, on obtient 49% pour, 45% contre et 6% d’abstentions. Un tel résultat est historique à la CSC.
Par un militant de la LBC (centrale chrétienne flamande des employés)
La FGTB a immédiatement rejeté le projet d’accord et à juste titre. La Fédération des entreprises belges (FEB), par contre, s’est déclarée ravie, ce qui clarifie de suite le caractère du projet. Le 5 février, le journal patronal FDMagazine écrivait: ‘‘La FEB se réjouit de ce projet d’accord […] contenant un saut d’index, une marge réelle extrêmement limitée pour les négociations salariales de 2016 et une réduction des charges. […] En outre, pour 2015, le gel des salaires réels sera effectif (une norme de 0%). Ce n’est qu’en 2016 que des budgets très limités seront libérés pour les négociations salariales [0,8% en tout, NDLR]. Et il s’agit de limites maximales, ce qui signifie que les entreprises peuvent donner moins (ou même rien).’’
Strictement parlant, le saut d’index ne fait pas partie du projet d’accord. Le texte le dit même explicitement : ‘‘employeurs et employés ne s’entendent pas sur la pertinence et l’utilité d’un saut d’index. Dans ce contexte, le projet d’accord ci-dessous est néanmoins arrivé.’’ Mais on pouvait faire confiance aux patrons, à leurs politiciens et à leurs médias pour tout faire pour présenter les choses comme si la CSC avait accepté le saut d’index en acceptant le projet d’accord social.
En interne, à la CSC, les opinions étaient très divisées concernant l’accord. La direction a présenté tous les arguments favorables possibles, notamment via les bulletins d’information (IPO News) et une présentation PowerPoint diffusée par les centrales. Il n’a pas été possible de faire connaitre les arguments ‘‘contre’’ de la même manière… En termes d’équilibre au niveau du débat démocratique interne, une place importante existe pour l’amélioration.
Une première IPO-News avait pour titre ‘‘Semer ce qu’il y a dans le sac’’. Cette expression de Flandre Occidentale a été choisie pour illustrer les faibles possibilités de négociation du sommet du syndicat. Selon la direction syndicale, tout ce qui était possible d’être obtenu l’a été face à un patronat confortablement assis à la table des négociations avec le soutien plein et entier du gouvernement de droite dure. C’est sans doute vrai, mais pourquoi dès lors s’assoir à la table des négociations s’il est d’avance certain que les patrons ne vont pas faire de véritables concessions? La résistance a été mise en attente pendant un certain temps, permettant ainsi au gouvernement chancelant de tranquillement récupérer des forces et de détourner l’attention.
L’IPO-News suivant a permis à la direction de la CSC d’argumenter que beaucoup de travail devait être fait autour d’autres sujets (le saut d’index et les économies budgétaires dans les services publics), que cet accord ne pouvait pas tout résoudre à la fois. Le bulletin annonçait donc que ce n’était qu’une première étape, que nous devions faire preuve de patience, travailler au cas par cas et surtout ne pas trop voir les choses en grand. ‘‘Voir les arbres à travers la forêt’’ était le message principal défendu.
Parmi les militants, le meilleur argument ‘‘pour’’ était qu’une marge salariale de 0,8% était toujours mieux que 0%. Selon eux, nous devions nous contenter de ce qui était sur la table, même si ce n’était pas beaucoup. Nous pouvions alors dire que les grèves ‘‘avaient quand même produit quelque chose’’ et mieux mobiliser pour des actions futures.
Les arguments ‘‘contre’’ ressemblaient souvent à ceci : nous avons fait grève trois jours en novembre et décembre, nos revendications étaient claires: maintien de l’index, pas d’augmentation de l’âge de la pension, une fiscalité plus équitable (avec un impôt sur la fortune) et l’arrêt de la dégradation des services publics. Cet accord ne contient aucun de ces quatre points fondamentaux. Nous risquons, de plus, d’hypothéquer le front commun syndical. Enfin, accepter cet accord met en péril notre force de mobilisation en donnant un signal ambigu: ‘‘Nous avons un accord, mais nous continuons la campagne.’’
Mais tant chez les partisans de l’accord que chez ses détracteurs, il était communément admis que le premier plan d’action était une réussite et qu’ils en appelaient un autre avec, à nouveau, des actions du front commun syndical allant crescendo et les dates annoncées longtemps à l’avance. La coopération avec le mouvement Hart Boven Hard / Tout Autre Chose a également été très appréciée.
La base de la CSC peut, à première vue, donner une impression de division au regard des résultats du vote sur l’accord. Mais derrière les désaccords tactiques, une large unité est présente concernant l’action à poursuivre : continuer la lutte pour être réellement écouté, dans le but de revenir sur toutes les mesures antisociales en faisant chuter les gouvernements si nécessaire.
Le saut d’index doit être balayé ! Travailler plus longtemps reste inacceptables alors que tant de jeunes ne trouvent pas de travail et perdent en plus leurs droits aux allocations de chômage! L’austérité dans le secteur de l’enseignement, de l’égalité des chances, du socio-culturel, de l’accueil de la petite enfance, des soins de santé, des transports publics,… est néfaste à la société. Allons chercher l’argent là où il est !
Ce n’est qu’un début, continuons le combat!