Pays-Bas : Le SP risque de balayer le succès des communales

Aux dernières élections municipales, en mars, les partis gouvernementaux ont été durement sanctionnés. Le Socialistische Partij, parti à la gauche des sociaux-démocrates, avait par contre bénéficié d’un soutien lui permettant de faire plus fortement entendre sa voix contre la politique d’austérité du gouvernement du VVD (droite officielle) et du PvdA (social-démocrate). Mais depuis lors, ce n’est pas ce message qui a été transmis.

Par Pieter Brans, Socialistisch Alternatief (Amsterdam)

A Utrecht et Amsterdam, les majorités communales ont impliqué le parti D66, officiellement ‘‘libéral de gauche’’ mais qui dans les faits sert de force d’appoint pour le VVD. Le SP a également rejoint la coalition au pouvoir dans ces villes. La question des autorités communales est d’autant plus importante que le gouvernement a décidé d’appliquer des coupes budgétaires dans les soins de santé par le biais des communes. Concrètement, ce sont ces dernières qui ont à charge d’effectuer les assainissements. Le SP aurait dû être extrêmement prudent pour entrer dans une coalition et exiger de sérieuses garanties pour assurer que les autorités locales s’opposent aux mesures d’austérité du gouvernement.

Une des choses qui rend encore plus affligeante cette entrée du SP au pouvoir au niveau local est l’abolition du système du bail emphytéotique jusque-là en vigueur à Amsterdam. Il s’agissait d’une revendication importante tant du VVD que de D66. Ce système, introduit en 1896 par les sociaux-démocrates, considérait que tout le territoire était propriété de la commune, chaque propriétaire payant un bail à la commune. Cette mesure visait à combattre la spéculation foncière et une partie de la hausse des valeurs immobilières revenait à la communauté. Le principe était tout à fait social et, juste au moment où cela aurait pu rendre de grands services, il a été aboli, avec l’aval du SP.
L’accord politique stipule que 187.000 logements sociaux seraient préservés à Amsterdam, soit autant que le nombre de ménages disposant d’un revenu sous les 34.000 euros par an. Mais cela signifie toutefois que le nombre de logements sociaux chuterait fortement, de 43.000, puisqu’il y en a environ 230.000 actuellement.

Le SP a cependant assuré la création d’un fonds de 62 millions d’euros destiné à adoucir l’impact des mesures gouvernementales sur les soins de santé et l’emploi. En outre, 10 millions d’euros sont prévus pour l’aide sociale aux ménages, cette aide devant être maintenue jusqu’en 2016. 30 millions d’euros sont aussi alloués pour la lutte contre la pauvreté.

Reste que c’est bien peu au regard de l’abolition du bail emphytéotique, de la perte de 43.000 logements sociaux et de l’impact sur les communes des coupes budgétaires gouvernementales. Le SP a été instrumentalisé par le VVD et D66.

On a pu lire dans le quotidien “De Volkskrant” que le SP a lancé une offensive suite aux élections nationales de septembre 2012, où le parti avait reçu une claque importante de la part du PvdA. Malheureusement, cette offensive n’était pas dirigée contre la politique d’austérité, mais vers la participation au pouvoir, avec n’importe qui. ‘‘Avec qui pourrais-je gouverner ? Avec presque tout le monde !’’ déclarait ainsi le dirigeant du parti Emile Roemer il y a deux ans…

Pour les années à venir, le SP sera co-responsable de la gestion de communes comprenant au total 4 millions d’habitants. Comment le SP s’opposera-t-il à l’austérité ? L’économie néerlandaise est en mauvais état. Les données semblent meilleures, mais seule l’exportation augmente quelque peu. Les dépenses internes sont sous l’énorme pression d’un chômage croissant, de dettes gigantesques, de bas salaires et de la pauvreté en général. La crise persiste.

L’opposition syndicale n’est pas encore massive, mais des actions réussies ont eu lieu dans les secteurs à bas salaires, comme dans le nettoyage. Après des semaines, une augmentation salariale substantielle et le payement des deux premiers jours de maladie ont été obtenus ! La colère gronde également chez les éboueurs, qui n’ont reçu aucune augmentation salariale pendant des années. Des victoires syndicales ont encore été obtenues chez Tata steel (sidérurgie), Xerox (fabrication d’imprimantes) et Venray (construction) et à la Poste.

Maintenant que la résistance contre la crise aux Pays-Bas commence à se développer, c’est une faute tragique du SP de se laisser utiliser par les partis pro-capitalistes. L’opposition grandissant contre les bas salaires, la pauvreté et l’austérité a besoin d’un large parti des travailleurs combattif. La période à venir sera décisive pour savoir si le SP devient ce parti ou ne jouerai qu’un rôle limité dans ce processus.

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