Percée de la gauche radicale : une excellente occasion d’organiser la lutte contre l’austérité

Par Els Deschoemacker

Comme on pouvait s’y attendre, quelques jours après les élections, l’Europe néolibérale a fait parvenir un nouveau message aux autorités belges encore en formation. On a ainsi appris que plusieurs milliards d’euros de dettes publiques étaient jusqu’ici ‘‘cachés’’ et viendront alourdir la prochaine opération d’austérité, que la commission européenne n’a pas l’intention de donner plus de temps à la Belgique pour lutter contre le déficit budgétaire et la dette publique et, finalement, que de nouvelles normes comptables pour les dettes publiques seront d’application en Europe dès septembre.

Cette Europe des riches a beau avoir perdu les élections, elle n’éprouve aucune honte à vouloir imposer une politique antisociale sans précédent. C’est comme si la révolte électorale contre la dérive austéritaire n’avait pas eu lieu ! Les patrons belges aussi se préparent à partir à la bataille. Les organisations patronales ont précédemment fait savoir qu’elles étaient très heureuses de constater que les programmes des partis tenaient plus que jamais compte des désirs du monde entrepreneurial.

Par ailleurs, les patrons sont aussi assez satisfaits des élections. En effet, à leurs yeux, une bonne partie des électeurs a explicitement voté pour un programme d’austérité. D’une part, la NVA, qui est le parti de l’austérité par excellence, est sorti des urnes comme le plus grand parti et, d’autre part, les six partis au pouvoir n’ont pas été sévèrement punis pour les 22 milliards de mesures d’austérité qu’ils ont votées et pour leur politique qui a rendu les riches encore plus riches et les pauvres encore plus pauvres. Pourtant, c’est une manière erronée de considérer le résultat des élections. Les résultats électoraux contiennent les germes de la révolte croissante, ce qui est plus évident encore en ce qui concerne les élections européennes.

A l’exception du PTB et de diverses petites listes de gauche, tous les programmes des partis ne fournissaient qu’un mélange indigeste de mesures d’austérité affectant principalement la population active et de réductions d’impôt pour les entreprises. Cependant, tous ces partis ont remarquablement fait de leur mieux pour se présenter à l’électeur sous leur jour le plus social et pour éviter le reproche de ne pas être assez proche du monde du travail. Soudainement, on a pu entendre le CD&V ou encore le MR se déclarer contre l’abolition de l’index, contre la limitation des allocations de chômage dans le temps et contre d’autres mesures qu’ils ont pourtant en réserve pour nous. Soudainement, tous étaient d’accord pour augmenter les pensions.

Ce n’est pas neuf de voir les principaux partis jouer ce jeu avant les élections. Ce qui est nouveau, par contre, c’est qu’il est clair qu’une bonne partie de la population ne les croit plus et que l’idée du ‘‘moindre mal’’ fait moins recette. Pour la première fois depuis 1985, la gauche radicale fait son apparition au Parlement fédéral. Ce n’est pas un fait divers, mais l’expression d’un mouvement de la base de la société, une prise de conscience que le mouvement des travailleurs a besoin de sa propre voix et de son propre parti politique.

Pourtant, et de façon assez scandaleuse, la plupart des dirigeants syndicaux ne le comprennent toujours pas. Certains ont même encore appelé explicitement à plusieurs reprises à ne pas voter pour les listes de la gauche radicale. S’ils avaient au contraire activement soutenu ces listes et joué un rôle dans leur élargissement, la percée de la gauche radicale aurait pu être bien plus forte. Le mouvement des travailleurs aurait été d’autant mieux préparé pour affronter les politiques d’austérité qui l’attendent à l’automne.

Quelles que soient les compositions exactes des futurs gouvernements régionaux et fédéral, il est d’ores et déjà certain que nous allons subir une avalanche de mesures antisociales de la part de tous les niveaux de pouvoir ; fédéral, régional et communal. L’heure est à la résistance et pour cela, ainsi que pour être aptes à inverser la tendance, nous avons besoin d’un large front de résistance qui regroupe les mouvements sociaux, les syndicalistes de gauche, la gauche radicale, les militants associatifs ou de quartier, etc. Un tel appel lancé uniquement de la part du PSL ne peut compter que sur un écho limité, mais si le PTB posait cette question sur la table avec ses huit parlementaires ainsi que ses 50 élus communaux et si, surtout, certaines fédérations ou régionales syndicales suivaient, le potentiel serait gigantesque pour construire un véritable mouvement de résistance de la base.

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