CGSP ALR: « Situation de crise au sein des CPAS Bruxellois »

Communiqué de la CGSP-ALR Bruxelles

La CGSP-ALR Bruxelles représentant les travailleurs des services sociaux des 19 CPAS souhaite réagir au reportage de l’émission Pano diffusé sur la VRT Één, qui met en lumière une problématique générale existante au sein de la majorité de nos CPAS bruxellois que nous dénonçons depuis plusieurs années déjà en front commun syndical : la surcharge de travail exceptionnelle des assistants sociaux du CPAS, et les conséquences dramatiques notamment liées au désinvestissement total pour ces services d’aide de première ligne. La CGSP avait déjà publiée ces constats en 2021 suite à une enquête auprès des travailleurs sociaux bruxellois.

Une surcharge de travail insoutenable

Les assistants sociaux des CPAS bruxellois doivent traiter un nombre de dossiers toujours plus élevé, biensupérieur à la moyenne observée en Flandre ou en Wallonie. Cette situation touche également le personnel administratif qui les soutient, aggravant un climat de travail déjà difficile. Depuis plusieurs années, le sous-financement criant, le manque de personnel et la surcharge de travail
qui en découle engendre des conséquences alarmantes :

  • Turnover accru : la plupart des assistants sociaux expérimentés quittent les CPAS, laissant un vide en termes de compétences et d’accompagnement pour les nouveaux arrivants. Cette tendance s’amplifie, avec un personnel qui s’épuise rapidement ou tombe malade.
  • Manque de perspectives et mal-être du personnel : l’absence de solutions pour réduire la charge de travail affecte gravement le bien-être du personnel et rend les CPAS incapables de fidéliser des agents compétents sur le long terme. En outre, les délais de traitement des demandes (parfois au-delà des délais légaux) génèrent du mécontentement voire de l’agressivité de la part des usagers, mettant en danger tous les acteurs concernés.
  • Les travailleurs sociaux, débordés, ne sont matériellement tout simplement pas en mesure de respecter en détail toutes les étapes essentielles de l’enquête sociale, ce qui entraîne des erreurs structurelles, notamment causés par une augmentation du travail administratif (ex. PIIS) et la complexification de législation.

Incompétences et non-action

Les autorités politiques, à tout les niveaux, ont été informés de cette situation par les organisations syndicales et elles en ont toute conscience depuis des années déjà. Les constats ci-dessus ont été confirmés il y a plus de deux ans déjà lors de plusieurs assemblées générales organisées en front commun syndical avec les travailleurs sociaux des CPAS bruxellois.

Depuis deux ans, nous avons régulièrement évoqué cette situation extrêmement problématique à tous les niveaux politiques nécessaires, en marge des mouvements d’action et de grève : nous avons rencontré à plusieurs reprises Mme Karine Lalieux (Ministre fédérale sortante de l’Intégration sociale), M. Vervoort (Ministre-Président), M. Clerfayt (Ministre des Pouvoirs locaux sortant) et M. Zian (Président de la Fédération des CPAS bruxellois). Sans oublier les bourgmestres et les présidents de CPAS que nous rencontrons mensuellement en concertation locale. Toutes ces personnes, sans exception, ont soutenu les revendications des travailleurs. Toutefois, les uns après les autres, sans exception, se sont déclarés incompétents et ont renvoyé la balle à un niveau politique inférieur ou supérieur. En bref : tout le monde est d’accord avec nous, mais personne ne se dit être compétent ni vouloir agir.

Depuis lors, la situation sur le terrain se détériore de jour en jour : des travailleurs démissionnent parce qu’ils ne peuvent plus faire face à la charge de travail, tombent en burnout ou en maladie suite à quoi le travail supplémentaire retombe sur leurs collègues. Le sous-financement a des donc des conséquences négatives sur la santé des travailleurs ! A cela s’ajoute le manque d’investissements financiers (tant régionaux que fédéraux) pendant plus de 15 ans dans les CPAS et les autres pouvoirs locaux bruxellois a comme conséquence que ces métiers ne sont que très peu attractifs, impliquant des difficultés dans le recrutement. Après des années de luttes et de combats, les travailleurs des communes et des CPAS ont obtenu, en 2021, des maigres valorisations barémiques, très insuffisantes pour compenser les deux dernières décennies de sous-investissement complets dans les institutions locales.

Enfer social pour les travailleurs, paradis fiscal pour les riches !

Entretemps, la situation ne ferait que s’aggraver : sous prétexte de devoir rembourser la dette publique belge, la limitation dans le temps des allocations de chômage est prévue par le futur gouvernement de droite. Les CPAS bruxellois estiment que près de 30.000 exclus du chômage pourront potentiellement demander une aide sociale supplémentaire les deux années à venir. Résultat : des milliers de dossiers supplémentaires, avec encore moins de travailleurs sociaux pour les gérer. Les victimes demeurent les
bénéficiaires et les travailleurs.

La CGSP ALR refuse d’accepter que certains utilisent cette situation de crise pour imposer leur propre agenda politique en attaquant les CPAS – patrimoine de ceux qui en n’ont pas -, les travailleurs sociaux et en présentant les personnes les plus précarisées comme des « profiteurs ». Exclure un chômeur n’a jamais enrichi aucun travailleur, au contraire, ne l’oublions pas !

La réalité dans les CPAS bruxellois est donc connue mais provient de choix politiques dont les enjeux sont la justice sociale et fiscale : alors que la réelle fraude sociale en Belgique équivaut à près de 350 millions € par an, la fraude fiscale, elle, monte à 30 milliards € par an (sans parler de l’évasion fiscale de près de 400 milliards € par an). On comprend aisément dès lors que l’objectif réel des politiques de droite n’est pas de chercher l’argent là où il est (dans la récupération fiscale auprès des grandes entreprises par ex) mais de désinvestir les services publics, précariser ses travailleurs et ses usagers, dégrader les conditions de travail, détricoter la sécurité sociale… de manière à faire pression pour diminuer les salaires et ainsi augmenter les profits de la classe patronale. Les politiques d’austérité budgétaire passées et à venir vont contre les intérêts des travailleurs, asphyxient nos CPAS et les services publics (volontairement délaissés en vue de privatisations futures) et instituent une véritable « chasse aux pauvres ».

Nos revendications : refinancement pérenne et amélioration des conditions de travail

Face à cette situation intenable, nous réitérons les nombreuses demandes émises à tous les niveaux politiques par le front commun syndical depuis plusieurs années déjà. Il y a urgence !

  • La mise en place de la réduction collective du temps de travail à 30h/sem en 4 jours
  • Le refinancement pérenne des CPAS par les instances régionales et fédérales
  • Le renforcement des équipes pour réduire la charge de travail afin d’améliorer la qualité du service et le bien-être des travailleurs ainsi que l’engagement de travailleurs dans les services de support (administratifs dédiés, RH, informatique…)
  • Simplifier et harmoniser les réglementations issues de différents pouvoirs qui régissent le fonctionnement des CPAS ainsi que les législations sur le DIS (supprimer l’obligation des PIIS).
  • Le remboursement du RIS à 100% par le fédéral
  • Revalorisation des fonctions et des salaires dans les pouvoirs locaux bruxellois
  • La statutarisation des travailleurs afin de garantir aux citoyens l’équité et la neutralité du service
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Première page de Lutte Socialiste