Les négociations pour un gouvernement fédéral « Arizona » sont dans l’impasse. La « super-note » de De Wever a été balayée de la table. Non pas en raison des terribles attaques antisociales qu’elle comprenait, mais parce qu’une petite contribution symbolique de la part des plus riches était de trop pour le MR. L’entente était par contre unanime concernant la “nécessité” de mesures antisociales drastiques. Les négociations reprendront sérieusement une fois les élections communales passées.
Le député européen Johan Van Overtveldt (NVA) a explicitement déclaré au début de l’année politique à l’organisation patronale flamande Voka que la super note n’avait en rien disparu. “Si l’on veut réformer et assainir notre pays, il y a des choses que l’on ne peut pas éviter. Sinon, un accord de coalition n’a aucun sens”. Bart De Wever a lui-même été très clair : tout revient sur table le 14 octobre.
Le patronat partage le constat. Et en réclame davantage. Pierre Wunsch, gouverneur libéral de la Banque Nationale, a déclaré que la super-note n’était pas suffisante. “Il y a une volonté claire de mettre en œuvre certaines réformes”, s’est-il réjoui, avant de souligner qu’il fallait viser encore plus de mesures d’austérité et de nouveaux impôts. Aux frais de qui? Certainement pas de ses amis actionnaires.
Les propositions contenues dans la super note de De Wever sont révoltantes. La FGTB évoque “la plus grande régression sociale depuis 80 ans”, la CSC explique quant à elle que la super-note est “surtout super pour les super riches”. Tout cela est vrai. Attaques contre les malades, les chômeur.euse.s, les pensions, les salaires, la représentation des travailleurs, les services publics, le secteur des soins, la politique scientifique… c’est toute la classe travailleuse qui est frappée de plein fouet. L’énumération de la totalité de ce catalogue des horreurs nécessiterait d’y consacrer l’ensemble de ce journal.
Cette austérité draconienne rappelle immanquablement le néolibéralisme de Margaret Thatcher des années 1980. À cela s’ajoute une propagande qui fait porter la responsabilité de la pénurie de moyens aux réfugié.e.s, chômeur.euse.s et malades. C’est bien pratique pour détourner l’attention sur la concentration des richesses aux mains d’une petite minorité de capitalistes. Avec Bouchez et Francken, les politiques thatchériennes sont doublées d’une bonne dose de haine de l’autre que ne renierait pas Donald Trump.
Organisons la riposte dès maintenant!
Plus vite nous organiserons notre riposte contre ces projets, plus nous serons fort.e.s. Ces dernières années, le mouvement ouvrier a fait l’expérience de mouvements de lutte remarquables.
Le mouvement de 2014 contre le gouvernement de Charles Michel a montré la puissance d’un plan d’action en escalade. Ce gouvernement de droite dirigé par la N-VA et le MR était lui aussi uni dans sa détermination à s’en prendre aux salaires et aux pensions, entre autres. Une concentration syndicale militante fut le prélude à une manifestation nationale de masse, à une tournée de grèves provinciales et finalement à une grande grève générale nationale. Les dates étaient connues à l’avance, chaque journée d’action était un tremplin vers la prochaine. Le mouvement a gagné en enthousiasme et en puissance, attirant à lui le soutien des jeunes, des artistes, mais aussi d’une foule d’indépendant.e.s.
La manifestation de masse n’était pas un point final à la lutte, mais seulement le coup d’envoi d’un automne chaud, avec 150.000 participant.e.s. La grève générale nationale du 15 décembre 2014 fut la plus importante depuis des décennies. Les grèves étaient fortes, d’autant plus lorsqu’elles avaient été préparées par des assemblées du personnel. Cette implication de la base s’est également reflétée dans le nombre record de candidat.e.s aux élections sociales qui ont suivi, en 2016. Le mouvement a eu un impact majeur sur l’opinion publique: une large majorité de la population se prononçait dans tout le pays en faveur d’un impôt sur la fortune. Tout au long du mouvement, le PTB a renforcé son implantation au sein de la classe travailleuse et a posé les jalons d’une plus grande représentation dans les parlements et conseils communaux du pays.
Malheureusement, il n’y a pas eu de deuxième plan d’actions pour poursuivre la dynamique en la portant à un niveau plus élevé. Le gouvernement a vacillé, mais il a pu profiter du répit pour se remettre sur pied. Il ne pouvait toutefois pas faire ce qu’il voulait! Des actions de masse successives ont permis d’enrayer l’imposition d’un système de “pension à points”. L’élan vers ces actions avait été assuré par plusieurs initiatives, dont celle d’un “journal des pensions”, imprimé à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires et largement distribué dans les entreprises et parmi le grand public.
Face à la pire régression sociale depuis 80 ans, revendiquer “plus d’équilibre” ne suffira pas. Journaux d’information, assemblées militantes régionales, assemblées du personnel… permettent de lancer un plan d’action avec des grèves soigneusement préparées pour repousser les attaques. Il faut des mots d’ordre à la hauteur des enjeux, reposant sur l’unité dans la lutte et la solidarité active.
Une faiblesse qui a également joué un rôle non négligeable dans l’absence d’un deuxième plan d’action après celui de fin 2014 était la question de l’alternative. Si nous limitons cette question à ce qui est possible aujourd’hui avec les partis dominants et dans le respect des règles budgétaires construites pour faire tourner la machine à profit, nous n’arriverons à rien. Avec un rapport de forces favorable, ce que la propagande capitaliste déclare impossible devient soudain possible. Ce n’est pas autrement que le mouvement ouvrier est parvenu à arracher le suffrage universel et la Sécurité sociale.
Nos revendications et notre alternative sont plus fortes si elles sont portées par le plus grand nombre possible de collègues. Lors des réunions du personnel, il ne faut pas seulement donner des informations et organiser les actions, c’est l’endroit idéal pour soulever ce qui est nécessaire comme mesure dans son entreprise, son secteur, son service public. C’est ainsi que l’on peut impliquer les collègues dans l’élaboration société qui répond aux besoins du terrain et non aux diktats du marché.