Solidarité dans l’action contre l’épidémie de soumission chimique et de violence sexuelle !

Le 14 novembre, il a été révélé que sept femmes ont été victimes de “spiking” à Courtrai, c’est-à-dire l’administration délibérée de substances sans consentement. À chaque fois, les sept victimes ont commandé une boisson, après quoi elles ne se souviennent de rien. Le lendemain, à leur réveil, elles ont constaté des preuves d’agression sexuelle. Le nombre connu de victimes dans le quartier festif de Courtrai s’élève entre-temps déjà à 16.

Réaction d’une conseillère de victimes de traite des êtres humains

De manière absolument choquante, au moins une victime a été détenue par la police pour “ivresse sur la voie publique” après avoir été retrouvée par la police après son viol ! C’est parfaitement illustratif de la façon dont les surivivantes de violences sexuelles doivent faire face non seulement aux auteurs, mais aussi à la police, qui suit une logique sexiste et répressive. Le parquet de Courtrai, relayé par divers médias, a déclaré : Les filles devraient faire plus attention à leur consommation d’alcool si elles veulent éviter les rapports sexuels non désirés.” Nous demandons justice pour toutes les victimes de violences sexistes et sexuelles et la fin de la normalisation de la violence sexuelle perpétuée par cette société capitaliste !

Dans ses recherches sur le phénomène de la soumission chimique, l’Institut National de Criminalistique et de Criminologie (INCC) indique que l’alcool est la drogue la plus répandue dans les cas de soumission chimique. Le plus souvent, les victimes sont délibérément rendues ivres avant d’être agressées ou violées. L’administration de stupéfiants peut se faire par l’intermédiaire d’une boisson, d’une aiguille ou même par inhalation à l’aide d’un ballon, d’un vaporisateur, d’une cigarette ou d’aliments. Au cours des deux dernières années, par exemple, des dizaines de cas de “needle spiking” (soumission chimique par aiguille) ont été signalés: lors d’événements publics, y compris la Pride, les victimes ont soudainement ressenti une piqûre.

Étant donné que les substances telles que le GHB, la kétamine et le rohypnol ne sont détectables que pendant 24 heures ou quelques jours tout au plus, et que les victimes n’osent souvent pas porter plainte ou seulement plus tard, les traces sont presque toujours perdues. Le gaz hilarant n’est même pas détectable. Après plusieurs jours, un échantillon de cheveux est le seul moyen de détecter les drogues, mais cela ne peut se faire que sur ordre d’un juge d’instruction dans le cadre d’une enquête criminelle.

Par la suite, les victimes peuvent encore être ignorées par les autorités censées les protéger. Je connais par exemple le cas d’un juge d’instruction qui a classé l’affaire d’une mineure placée sur une plateforme de travail sexuel par des “loverboys”, en déclarant que la jeune fille de 15 ans “est de toute façon une pute” parce qu’elle s’est offerte en ligne. Le fait que cette mineure ne se souvenait pas des photos prises d’elle a été écarté, tout comme le fait qu’un.e mineur.e de 15 ans ne peut pas légalement consentir à la prostitution.

Le “spiking” est le moyen ultime pour priver les victimes de violences sexuelles de leur autodétermination. L’absence de souvenirs engendre alors beaucoup de peur, de honte et de culpabilité. En cas de procès, la défense de l’agresseur pourra même profiter de ces trous de mémoire et tenter de mettre en doute la crédibilité de la victime.

Ces expériences négatives et traumatisantes répétées avec des institutions qui devraient protéger les victimes augmentent la probabilité d’un SSPT (syndrome de stress post-traumatique). L’État de droit dans une société capitaliste ne fonctionne pas pour protéger les victimes, il s’agit d’un système bourré de sexisme et consitué d’obstacles bureaucratiques et de décisions arbitraires. Le verdict dépend essentiellement des croyances personnelles des flics, des juges et des procureurs. C’est un juge qui décide si un incident est considéré comme une soumission chimique et non la victime ou le consultant médico-légal et l’institut de toxicologie. Je connais au cas d’un policier qui avait trouvé une jeune fille mineure au lit avec un adulte et n’ait pas signalé de crime sexuel. Quand il a été interrogé à ce sujet par des travailleurs sociaux, il a répondu : La fille avait l’air mature avec ses cils et son maquillage; je ne peux rien reprocher à Monsieur.

L’existence de la violence sexiste et sexuelle dans la société est indéniable et omniprésente. Un échantillon national représentatif de la population de 2021 montre que près de 80% des femmes sont victimes de violences sexistes et sexuelles au cours de leur vie. Les victimes de viols représentent 16%. Le risque est environ deux fois plus élevé chez les non-hétérosexuels que chez les personnes qui s’identifient comme hétérosexuelles. Parmi les homosexuels, 48% sont victimes de violences sexuelles, dont 5% de viols. Ce n’est pas pour rien que presque toutes les jeunes filles sont aujourd’hui mises en garde contre le danger de la soumission chimique. Alors que tout le monde semble connaître le problème, le parquet de Courtrai déclare que c’est “la première fois” qu’il “traite le phénomène de la soumission chimique à une si grande échelle”.

Il est temps de mettre fin à ce cercle vicieux de la culpabilisation des victimes et de la violence: dans la société, dans les tribunaux, dans les communautés et les familles. Nous exigeons davantage de ressources pour le conseil et la prévention des victimes de violences sexistes et sexuelles. Ainsi, nous défendons un investissement public important dans les refuges, les Centres de Prise en charge des Violences Sexuelles (CPVS) et les lignes téléphoniques d’urgence pour soutenir chaque victime. En tant que féministes socialistes, nous luttons pour une société qui mette fin à l’exploitation, y compris l’exloitation sexuelle, de l’ensemble de la classe travailleuse et où le racisme, le sexisme et l’oppression appartiendront au passé.

Partager :
Imprimer :
Première page de Lutte Socialiste