Pour marquer des point aux élections du 9 juin dernier, la N-VA a pris publiquement ses distances avec le Vlaams Belang. La stratégie étant reproduite vis-à-vis des élections communales, les chances de briser le cordon sanitaire à l’échelle locale sont plus réduites. Si l’on regarde les résultats du 9 juin par district électoral, on constate que la N-VA et le VB ont obtenu ensemble la majorité dans 151 communes flamandes. La ligne de Bart De Wever – consistant à n’entrer nulle part en coalition avec l’extrême droite – semble tenir pour l’instant, mais pour combien de temps ?
Le 9 juin, le Vlaams Belang a réalisé des percées dans une série de communes où il ne dispose pourtant pas de section locale vivante. De tous les partis, c’est l’extrême droite qui a obtenu le moins de votes préférentiels par rapport au nombre total de voix. Mais il y a des exceptions. C’est le cas à Ninove où, lors des élections législatives, un quart de l’électorat a donné son vote préférentiel à Guy D’Haeseleer. Sa liste, Forza Ninove, a déjà obtenu 40 % des voix en 2018. S’il y a une commune où l’extrême droite peut bientôt arriver au pouvoir, c’est bien Ninove.
Comment expliquer ce soutien ? Une série de facteurs sont combinés : la disparition de l’industrie et des sources locales d’emploi, la réduction de tous les services publics (et privés) et l’afflux de personnes fuyant Bruxelles parce que la capitale devient inabordable. A cela s’ajoute un réel ancrage de l’extrême droite. Dès la première percée du Vlaams Blok, des noyaux étaient actifs dans la région de la Dendre. Ces dernières années, D’Haeseleer a développé un réseau de soutien avec Forza Ninove. Il aide les gens à remplir leur déclaration d’impôt par exemple. D’Haeseleer signe de son nom la notice nécrologique de chaque habitant de Ninove décédé. Là où d’autres partis se limitent de plus en plus aux opérations de communication, Forza Ninove est ancré localement.
Les problèmes sociaux s’accumulent et nourrissent les tensions sociales, sans que les forces politiques nationales ou locales y répondent. Ce vide politique, dans un contexte où la gauche syndicale et politique n’est pas suffisamment présente, laisse un espace à l’extrême droite. Faute de solution collective aux problèmes individuels, les gens se laissent d’autant plus facilement tromper par ceux qui instrumentalisent leurs frustrations. La participation au pouvoir de l’extrême droite s’accompagnera d’ailleurs sans aucun doute de nouvelles attaques contre le mouvement ouvrier et tous ceux qui ne correspondent pas aux normes appréciées par l’extrême droite.
Quelle réponse le mouvement de la classe travailleuse peut-il apporter ? Il n’y a pas de solution miracle. Il faut construire de manière cohérente un rapport de force capable d’imposer le changement social. Nier la colère ne sert à rien, il faut l’aiguiller vers les vrais responsables de la précarisation de l’existence sous toutes ses formes. Ce travail exige de la patience. Et aussi un programme axé non pas sur ce que permet l’establishment, mais sur ce qui est nécessaire pour répondre aux inquiétudes de la grande majorité de la population. Une approche de classe offensive et audacieuse est le meilleur moyen de lutter ensemble pour un meilleur avenir, et donc d’étouffer immédiatement le désespoir sur lequel prospère l’extrême droite.