Pride radicale à Paris « Pour l’autodétermination et la libération des identités et des peuples »

Ce dimanche 16 juin a eu lieu à Paris l’édition 2024 de la Pride radicale, à l’initiative des collectifs Queer Racisé·e·s Autonomes, Décolonisons Le Féminisme, Nta Rajel?, DIIVINESLGBTQIA+, Queer Education, RaíZes Arrechas et Maré Mananga. Alternative Socialiste Internationale – France y était également et y a notamment distribué le tract disponible ci-dessous.

Il y a urgence ! La menace d’un gouvernement d’extrême droite est bien réelle. Nous le savons, ça signifiera notamment encore plus de violences et d’attaques de l’Etat contre les personnes LGBTQIA+, tout particulièrement contre les personnes trans, de même que contre les personnes qui subissent déjà aujourd’hui la brutalité du racisme ou du sexisme systémiques, contre la jeunesse et contre les syndicalistes. C’est la classe travailleuse dans toute sa diversité qui est visée. 

Ce n’est pas une fatalité. Par l’unité dans l’action, ensemble, nous pouvons repousser la menace et passer à la contre-offensive pour en finir avec elle. Voter pour le Nouveau Front Populaire (NFP) est un des prochains pas pour aller de l’avant, mais ce sera très loin d’être suffisant. Nous devons construire la lutte sociale de manière à disposer d’un puissant rapport de force à notre faveur, dans la rue et sur les lieux de travail. C’est par la lutte que nous avons arraché nos conquêtes sociales, c’est ainsi que nous les défendrons aussi. C’est aussi la meilleure manière d’instaurer une pression sur le NFP pour assurer que ses candidat⸱es défendent nos intérêts dans les actes. C’est encore la meilleure façon de démasquer les mensonges du RN et de ses propositions soi-disant “sociales”. Enfin, l’action collective, c’est le remède idéal contre la division et la haine de l’autre semées par la macronie et l’extrême droite. Les préjugés ne résistent pas aux manifestations et aux grèves organisées démocratiquement dans les rues, sur les lieux de travail, dans les universités, etc. contre toutes les formes d’oppression et d’exploitation. Si toute la diversité de la classe travailleuse est accueillie et valorisée dans la mobilisation de masse, plus rien n’est impossible !

Les jeunes et les personnes opprimées montrent la voie. Ielles sont à l’avant-garde de la résistance qui a commencé à se former immédiatement dimanche dernier, avec des manifestations quotidiennes dans toute la France rassemblant des dizaines de milliers de personnes de la classe travailleuse. Deux lycées à Paris et à Lyon ont été bloqués lundi et les organisations queers, féministes, de jeunesse ainsi que les syndicats lycéens et étudiants appellent à l’unité dans la lutte. Leur détermination et le mouvement de résistance grandissant font écho aux nombreuses luttes inspirantes de ces derniers mois : de la solidarité avec les masses palestiniennes ou kanaks à la grève féministe du 8 mars, en passant par la nouvelle vague #metoo dans le cinéma et les hôpitaux, et par la riposte trans, il est clair que la jeunesse et les personnes opprimées refusent d’être ramené⸱es en arrière. Ces luttes doivent être reflétées de manière centrale dans le NFP et dans son programme.

5 des 8 principales organisations syndicales (CFDT, CGT, Unsa, FSU et Solidaires) ont lancé l’appel unitaire à manifester dans toute la France ce week-end contre l’extrême-droite. C’est absolument crucial et c’est la dynamique à suivre. Quel que soit le résultat des législatives, nous aurons besoin de nous battre pour faire valoir nos droits. Pour l’assister et assurer le contrôle du mouvement par la base, du bas vers le haut, nous devons mettre en place sans perdre de temps des comités de lutte démocratique antifascistes partout – au boulot, dans les universités, les écoles et les quartiers – afin de décider d’un plan d’action en escalade, avec l’objectif du blocage de l’économie par la grève. De cette manière, nous pouvons reconstruire l’ambiance explosive de la bataille contre la réforme des retraites et aller là où les directions syndicales ont refusé d’aller : vers la grève générale reconductible contre l’extrême droite, mais aussi contre les oppressions, l’austérité et le système capitaliste dans son ensemble.

De la bataille historique contre la réforme des retraites à la menace d’un gouvernement d’extrême droite. Comment expliquer ça ?

Un an seulement après que l’on ait ressenti le potentiel d’un nouveau mai ‘68, l’extrême droite est à l’offensive et pourrait diriger le prochain gouvernement. Comment en sommes-nous arrivés là ? Comment construire une lutte sociale plus forte et efficace ? Le combat contre les oppressions est central dans les deux cas.

Il y a un an, la pression de la base n’a pas été suffisante pour pousser l’Intersyndicale à organiser une grève générale reconductible. Le gouvernement Macron a bien vu les faiblesses des sommets syndicaux. Il a alors instrumentalisé les éléments émeutiers de la révolte qui a suivi le meurtre policier raciste de Nahel pour semer des éléments de division dans le mouvement avec une contre-offensive islamophobe et raciste visant à diaboliser tout soutien à #justicepourNahel. Face à la réaction tardive des directions syndicales et d’une grande partie de la NUPES pour soutenir les luttes antiracistes, Macron a continué sur sa voie. Et durant des mois, la faiblesse de la gauche réformiste en matière de lutte contre les oppressions a permis à la contre-offensive de la droite de prendre de l’ampleur avec l’interdiction raciste et sexiste de l’abaya, la loi raciste sur l’immigration, la répression brutale du mouvement de solidarité avec la Palestine ou encore l’écœurant soutien de Macron à Depardieu. Pour affaiblir la résistance sociale, Macron a fait le choix délibéré de normaliser bien des aspects de l’extrême droite.

Le projet de loi anti-trans proposé par Les Républicains (LR) et adopté par le Sénat à la fin du mois de mai – qui exclut les mineurs des soins de santé et menace d’amendes et de peines de prison le personnel médical qui les procurent – est une autre escalade de cette offensive réactionnaire. Les attaques contre les personnes LGBTQIA+, et en particulier les personnes trans, sont au premier plan du processus réactionnaire en France et dans le monde entier. En mai dernier, l’establishment péruvien a classé les identités trans et queer comme maladies mentales. En juillet de l’année dernière, la Russie a interdit toutes les transitions administratives et médicales, y compris la chirurgie et les traitements hormonaux. Aux États-Unis, nous assistons à l’interdiction de livres et à un assaut de lois queerphobes et transphobes.

Ces attaques et le discours “anti-woke” qui présente les personnes LGBTQIA+ comme “anormales” s’ajoutent à la crise quotidienne à laquelle sont confrontées les personnes queer de la classe travailleuse : ielles sont touché⸱es de manière disproportionnée par les coupes budgétaires dans les services sociaux de base et sont confronté⸱es à des taux élevés de pauvreté, de sans-abrisme et de violence de genre, ainsi qu’à des listes d’attente très longues en cas de soins de santé trans. Cela stimule et normalise la violence et le harcèlement. L’année dernière, les cas enregistrés par la police (une minorité !) ont augmenté de 19% en France et 2022 a été l’année la plus meurtrière pour les personnes LGBTQIA+ en Europe depuis une décennie. Tout cela doit cesser ! C’est pourquoi la Pride est synonyme de riposte !

C’est tout le système qui est coupable ! La libération queer, pas le capitalisme arc-en-ciel !

Ce déluge d’attaques est déclenché par la classe dirigeante pour protéger son système capitaliste pourri, qui se traduit par des profits pour une minorité et par l’austérité et la violence pour la majorité. La LGBTQIA+phobie, le sexisme et la violence de genre sont profondément enracinés dans la structure familiale patriarcale du capitalisme ainsi que dans le système dans son ensemble, qui ne peut fonctionner sans le modèle binaire du sexe et du genre. Le capitalisme s’appuie sur les soins et les travaux ménagers non rémunérés, dont plus des trois quarts sont effectués par les femmes dans le monde, et utilise la LGBTQIA+phobie, le sexisme et le racisme pour diviser la classe travailleuse et briser notre volonté de résister – et ce peu importe le résultat meurtrier des idées transphobes rampantes dans notre société.

Nous ne les laisserons pas faire! La riposte trans et la grève féministe du 8 mars ont montré la voie. Nous accueillons la mobilisation des syndicats comme la CGT et Solidaires, ainsi que des partis politiques de gauche comme LFI. Cependant, il faut aller plus loin. Inspirons-nous de la formidable lutte de la classe travailleuse en Argentine, mené par les femmes et les personnes LGBTQIA+. Depuis l’arrivée au pouvoir de Milei, ielles ont organisé deux grèves générales et une grève féministe massive le 8 mars sous le slogan Cette fois, nous devons y arriver, un discours devant le congrès clôturé par Nous n’avons pas peur de Milei ! Nous étions une marée, nous deviendrons un tsunami ! Voilà comment on combat l’extrême droite !

Des comités de résistance antifascistes démocratiques partout !

Le Rassemblement national a obtenu plus de 30 % et Macron a tout de suite convoqué des élections législatives anticipées. Quel contraste avec son opposition acharnée à la résistance de millions de Français⸱es qui ont fait grève et ont manifesté contre sa réforme des retraites ! Il est plus prompt à se lancer dans une aventure qui peut conduire l’extrême droite au pouvoir. Le patronat regarde avec satisfaction, tandis qu’une partie de la droite est prête à s’allier au RN. La droite ne fait pas barrage à l’extrême droite, elle lui déroule au contraire le tapis rouge.

Face à cela, notre riposte doit aller au-delà du vote pour le NFP, elle doit être un front uni de la classe travailleuse dans toute sa diversité. Nous devons construire un mouvement dans l’esprit de la lutte contre la réforme des retraites, qui combine la force considérable du mouvement ouvrier organisé, grâce à l’arme de la grève reconductible, avec la volonté courageuse et inspirante de lutter en faveur d’un changement fondamental à l’avantage des jeunes et des opprimé⸱es, ce qui peut stimuler la lutte des classes dans son ensemble.

Des comités démocratiques de résistance antifasciste devraient être créés dans tous les quartiers populaires, les banlieues, les écoles, les universités et les lieux de travail. À petite échelle, cette méthode d’organisation a été utilisée dans les comités antifascistes de Bretagne, les assemblées générales d’enseignant⸱es, d’étudiant⸱es et de parents dans la lutte pour l’éducation nationale au début de cette année, ainsi que dans les comités de grève et les actions “Robin des Bois” pendant la lutte contre la réforme des retraites, lorsque les grévistes de l’énergie ont mis en place une distribution gratuite de gaz et d’électricité pour les écoles, les hôpitaux, etc. L’approvisionnement en électricité a été rétabli pour les utilisateur⸱trices qui ne pouvaient pas payer leurs factures et un tarif réduit allant jusqu’à 60 % a été mis en place pour les petit⸱es commerçant⸱es. Ces actions, bien que d’ampleur limitée, ont illustré ce que le contrôle et la gestion des travailleur⸱euses dans l’économie pourraient signifier. Cela donne un aperçu de ce que serait une société où celleux qui produisent les richesses décident de leur utilisation !

Le problème fondamental, ce n’est pas la diversité, c’est la toute-puissance de la dictature des marchés !

Combien de jeunes LGBTQIA+ ne se sentent pas en sécurité à l’école ? Mais les établissements scolaires sont dépourvus des ressources et connaissances suffisantes pour réagir de manière adéquate. Défendre un enseignement réellement inclusif, cela exige d’arracher un financement massif de l’enseignement, pour des classes plus petites, pour une formation accrue des enseignant⸱es y compris aux questions liées au genre, et pour une collaboration avec les associations de terrain qui ont accumulé une expertise largement ignorée par les pouvoirs publics.

Pour repousser la discrimination face au logement et en finir avec les longues listes d’attente pour bénéficier d’un logement social, nous devons nous battre en faveur d’un ambitieux plan de rénovation et de construction de logements sociaux, dont l’ampleur déterminera également l’efficacité de la pression sur l’ensemble des loyers du pays. Et ce, dans le cadre d’un plan public d’isolation et de rénovation du bâti, quartier par quartier. Nous voulons en finir avec toutes les formes de précarité, y compris la précarité énergétique!

Alors, oui, ça exige des moyens, mais la société n’en manque pas. En nationalisant les secteurs clés de l’économie sous contrôle et gestion démocratiques des travailleur.euse.s, nous pourrions utiliser les richesses monumentales qui existent pour répondre aux besoins de toute la population, et assurer l’épanouissement de chaque personne. Retirer tout le secteur pharmaceutique de la logique de profits, par exemple, permettrait d’assurer que la production de médicaments et de traitement hormonaux ne soit pas laissée à la simple appréciation des actionnaires. Pour en finir avec les pénuries, retirons la production des griffes des capitalistes!

Une telle révolution dans l’organisation de la société et au coeur de celle-ci – le système de production – modifierait aussi inévitablement les attitudes liées au genre et à l’orientation sexuelle. Celles-ci sont ancrées dans la société de classes et dans les relations de pouvoir qui en découlent. Une société socialiste démocratiquement planifiée poserait les bases de l’émancipation de l’humanité dans toute sa diversité.

Réunion ouverte – 1934-1936 : De la provocation fasciste au potentiel révolutionnaire

Le 6 février 1934, l’extrême droite manifesta dans les rues de Paris. La manifestation se termina par de violentes confrontations avec les forces de l’ordre. Le danger représenté par l’extrême droite en France devenait particulièrement évident. Mais la riposte antifasciste ouvrière ne se fit pas attendre et stoppa net le danger fasciste.

Cette réunion sera en ligne, toutes les infos sont disponibles pour y accéder avec ce code QR.

La dynamique enclenchée alors conduisit au mouvement de grèves avec occupation d’usines de 1936, mouvement qui a posé les bases d’importantes conquêtes sociales telles que la semaine des 40 heures et l’extension des congés payés à tous les travailleurs. Cette grève générale s’est spontanément développée à la suite de la victoire électorale du Front Populaire, une alliance des socialistes (SFIO), des communistes (PCF) et du Parti radical, le parti pivot des gouvernements de l’entre-deux-guerres. L’ambiance était festive dans les entreprises : les travailleurs savaient que leur moment était venu. Le journal “Le Temps”, que Trotsky décrivait comme la bourgeoisie sous forme de journal, décrivait avec horreur comment les ouvriers se comportaient dans les usines : comme s’ils en étaient déjà les maîtres.

Le retentissement du mouvement dépassa les frontières françaises, il influença notamment la dynamique de la grève générale de juin 1936 en Belgique qui a posé les bases de la sécurité sociale obtenue après-guerre. La réussite du mouvement de masse en France avait le potentiel non seulement de renverser le capitalisme, mais aussi d’approfondir le processus révolutionnaire en Espagne tout en portant un coup décisif au fascisme en Allemagne et en Italie. Cela aurait rendu inévitable le déclenchement d’une révolution politique en Union soviétique contre la dictature bureaucratique stalinienne et en faveur de la restauration de la démocratie ouvrière, cette fois-ci sans que la révolution soit isolée. L’horreur de la Seconde Guerre mondiale n’aurait probablement jamais eu lieu.

Mais la politique du gouvernement du Front populaire est finalement strictement restée dans les étroites limites du capitalisme. Et comme le soulignait Daniel Guérin dans son récit des événements « Une révolution qui cesse d’avancer est condamnée à refluer ». Le gouvernement de Front Populaire n’a finalement duré que deux ans et une fois de retour au pouvoir, la droite s’est sauvagement vengée de la peur panique qu’elle avait ressenti.

Quelles leçons en tirer pour aujourd’hui ? Comment la riposte antifasciste peut elle devenir un mouvement révolutionnaire ? Venez en discuter avec nous !

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Première page de Lutte Socialiste