L’Union européenne et le Fonds Monétaire International (FMI) veulent imposer une nouvelle trajectoire d’austérité aux pays de l’Union européenne et clore le chapitre des dépenses extraordinaires liées à la pandémie depuis 2020. L’austérité, on la connaît déjà depuis plus de quatre décennies et ils veulent encore tailler plus profondément dans nos conquêtes sociales ! Aucun secteur ne connaît pas la douleur du manque de moyens : la petite enfance, l’enseignement et ses classes surpeuplées, les logements sociaux et leurs listes d’attente interminables pour y avoir accès, les soins de santé, les transports en commun,… Que l’on regarde de n’importe quel côté, ça craque de partout. Mais pour les institutions internationales du capital, ça pourrait être encore pire…
Par Peter Delsing
Selon le FMI, les gouvernements belges doivent économiser 30 milliards d’euros d’ici à 2030. Le chien de garde du capitalisme international déclare : “Les allocations sociales étaient supérieures de 5,2 points de pourcentage du PIB en Belgique par rapport à la moyenne des pays avancés de l’UE en 2021.” Le FMI recommande notamment de “relever l’âge effectif de la retraite”.
D’une certaine manière, les nouvelles règles budgétaires au sein de l’UE reflètent la nouvelle “ère du désordre” dans laquelle le capitalisme est entré. L’élite européenne tient compte de la nécessité de nouvelles dépenses pour la défense, la politique climatique, la concurrence technologique avec la Chine. Gardons en tête qu’à chaque moment de crise plus profonde du capitalisme, il y a toujours eu des tentatives de faire intervenir l’État. Ces 15 dernières années n’ont pas manqué de plans de relance afin de gagner du temps et d’éviter une dépression économique dévastatrice.
Le nouvel accord européen consacre la nouvelle donne qui combine des investissements stratégiques et l’austérité. Les pays qui réalisent les investissements nécessaires bénéficieront d’un délai supplémentaire pour rembourser leurs dettes. Mais les réductions budgétaires ailleurs sont impératives, car, dans le cas contraire, l’UE capitaliste pourrait se désagréger et la zone euro, avec sa monnaie commune, pourrait être menacée. Selon l’UE, qui rejoint le FMI, la Belgique devrait opérer un effort budgétaire de plus de 4 % du PIB d’ici à 2029, soit au moins 24 milliards d’euros.
Trouver l’argent là où il se trouve
Les dépenses liées aux pensions augmenteront de plusieurs dizaines de milliards d’euros au cours des années 2020. Nous conseillons aux dirigeants capitalistes de ne chercher cet argent ni dans nos poches ni dans les caisses des services publics déjà mal en point, pour une fois. En 2020, 265 milliards d’euros avaient été versés dans les paradis fiscaux de la part des grandes entreprises. (Le Soir, 16 octobre 2021) Pourquoi le gouvernement n’irait-il pas chercher de son côté l’argent nécessaire aux pensions (et à l’augmentation de leur montant) ?
C’est précisément le problème. Le capital ne se laissera pas faire alors qu’ils pillent déjà des dizaines de milliards de l’argent des contribuables pour récompenser les gros actionnaires avec des dividendes mirobolants. Cette austérité imposée limite à l’avance les choix politiques une fois les élections passées, puisque presque tous les partis acceptent les contraintes austéritaires.
Depuis que les réformes successives de l’État ont vu de plus en plus d’argent affluer vers les communautés et les régions, toute discussion sur de nouvelles économies générales en Belgique devient immédiatement communautaire. Cela garantit le retour tonitruant de la question nationale. La N-VA et le Vlaams Belang veulent accorder plus de pouvoirs au gouvernement flamand pour organiser une casse sociale encore plus rapide et laisser la population se répartir le manque de moyens dans un contexte où le mouvement ouvrier est divisé.
Les travailleurs n’ont pu obtenir de victoires que lorsque leurs grèves bouleversaient le rapport de forces dans la lutte des classes. La position passive des syndicats à l’approche des élections – une forme de défense du “moindre mal” et des prétendus “partis progressistes” au gouvernement – est une grave erreur. Surtout C’est tout particulièrement vrai au moment où les licenciements collectifs commencent à tomber, comme chez le constructeur de bus Van Hool et dans l’industrie en général. C’est le Vlaams Belang, qui atteint déjà des sommets dans les sondages, qui sera le principal gagnant de cette passivité et de l’absence de mots d’ordre combatifs.
PTB : “plus d’investissements publics”, mais sous quel contrôle ?
Le PSL rejoint le PTB pour dire qu’il faut plus d’investissements publics massifs. Nous sommes, nous aussi, favorables à une taxe des millionnaires et à une augmentation des impôts sur les grandes entreprises. Mais le capitalisme s’essouffle économiquement depuis quatre décennies. Le taux de croissance de l’économie belge est passé d’une moyenne de 4,7 % dans les années 1960 à 2,1 %, 1,8 % et 1,6 % dans les années 1990 à 2010. Les périodes de croissance sont devenues de plus en plus creuses.
Les plus grandes entreprises font peut-être à nouveau de gros bénéfices grâce à la baisse des salaires et à l’inflation alimentée par la cupidité, mais beaucoup d’entreprises sont des “zombies” aux marges plus que faibles et criblées de dettes. Le grand et le petit capital résisteront à un gouvernement de gauche dans un contexte où les crises tendent à se multiplier. Les banques et les forces conservatrices de l’appareil d’État boycotteront les gouvernements qui favorisent un changement de cours vers la gauche s’ils ne parviennent pas à briser le pouvoir des grandes entreprises.
La question fondamentale est la suivante : quelle classe domine l’investissement public ? S’agira-t-il d’un contrôle par en bas, dans notre classe sociale, la classe travailleuse, pour transformer le capitalisme en socialisme démocratique, avec un contrôle réel sur la production et la plus-value dans la société ? Ou laissons-nous le contrôle des moyens de production à une petite élite dont le système est en crise ?
Un gouvernement de gauche qui respecte la propriété privée des moyens de production pourra peut-être appliquer quelques mesures symboliques, mais il se heurtera directement aux contraintes du caractère privé de la production. Il ne pourra pas imposer les investissements massifs là où ils sont nécessaires. Gérer le capitalisme mieux que les capitalistes eux-mêmes, c’est un projet auquel aucune gauche n’a réussi. Bernie Sanders aux États-Unis a capitulé devant Wall Street. Syriza en Grèce a également échoué. Tirons-en les leçons, soutenons le PTB de façon critique aux élections afin d’orienter la politique et ce parti vers la gauche, et organisons la lutte d’en bas avec le PSL, les syndicalistes combatifs, etc. pour parvenir à une rupture anticapitaliste démocratique et socialiste.