Dans ce communiqué, nous revenons sur la mobilisation antifasciste contre la venue de l’extrême-droite internationale à Bruxelles les 16 et 17 avril dans le cadre de la National Conservative Conference.
Communiqué de presse de la Coordination antifasciste de Belgique
Avant de contredire les arguments qui ont été opposés à la Coordination Antifasciste de Belgique, mettons en avant ce que les militant.es ont réussi à faire par leur mobilisation.
Grâce à la pression politique que nous avons mise avec notre campagne, l’extrême-droite internationale a été désorganisée. Elle a été rejetée de plusieurs lieux, elle n’a pas été accueillie dans un lieu de prestige de la capitale, et elle a dû finir par tenir sa conférence sans certains orateurs, clandestinement, et sous les slogans des militant.es antifascistes. Nous avons fait perdre de l’argent et du temps à leurs organisations, dont le MCC Brussels, avant-poste de Viktor Orban dans la capitale belge, qui semble être bien trop à l’aise dans notre ville.
La Coordination Antifasciste de Belgique a donc rappelé, encore une fois, que l’extrême-droite n’est pas la bienvenue à Bruxelles, qu’elle est infréquentable et qu’elle profite de la complicité passive (ou active) des institutions qui l’accueillent ou la soutiennent, pour progresser.
Nous avons rappelé que, malgré leurs progressions électorales, les politiques d’extrêmes-droites n’en restent pas moins un danger mortel pour des pans entiers de la population. Nous sommes donc légitimement en droit de nous défendre et de nous organiser activement contre elle.
Nous avons revendiqué haut et fort ce qui avait été dit après la Seconde Guerre Mondiale et que beaucoup semblent « oublier » : Plus jamais ça !
Liberté d’expression : de qui se moque-t-on ?
Viktor Orban en Hongrie, le PiS en Pologne, Suella Braverman au Royaume-Uni… Toutes les personnalités politiques d’extrême droite présentes à la conférence hier soutiennent des politiques autoritaires et liberticides. Partout où leur camp politique est arrivé au pouvoir, la liberté de la presse a été restreinte, la liberté de manifester remise en cause, les droits sociaux érodés, les droits des femmes et les droits LGBTQIA+ attaqués, les minorités ethniques et personnes migrantes discriminées et accusées de tous les maux.
Il faut une sacré audace pour que les pires autoritaires se cachent derrière la liberté d’expression, alors que tout leur projet politique se fonde sur la répression et l’interdiction. La liberté d’expression est donc ici juste instrumentalisée pour avancer leurs idées, dangereuses pour les autres droits, et non pas mobilisée comme un droit ou une valeur en soi. La semaine passée, des journalistes de la VRT ont appris qu’ils n’étaient pas les bienvenus à une conférence semblable, avec le même genre d’invités (voire les mêmes invités tout court) en Hongrie fin avril, car jugés « trop wokes ». Se présenter en victimes de la censure quand ils n’ont pas le pouvoir, et imposer la censure dès qu’ils ont le pouvoir : voilà le projet de l’extrême-droite.
De plus, la liberté d’expression n’est pas la liberté de tenir des discours racistes et incitant à la haine. Il s’agit alors d’infractions pénales qui ne sont pas protégées, et plusieurs participants ont été condamnés à de multiples reprises pour cela.
A celles et ceux qui protègent une « pseudo liberté d’expression », voilà les discours que vous défendez : Viktor Orban refuse « le mélange des races » , Eric Zemmour compare la migration à une « armée d’invasion, colonisation, et occupation » contre laquelle il faudrait « se battre pour la libération », Rod Dreher justifie les motivations du terroriste de Christchurch (qui a assassiné 51 personnes en 2019) et se réjouit de la dictature de Franco, et Hans-Georg Maassen défend des groupuscules néonazis en niant leurs chasses aux migrant.es. Ce dernier a ensuite été exclu de son parti pour ses liens avec les milieux fascistes et est à l’heure actuelle sous investigation de l’Office de Protection de la Constitution Allemande pour activités radicales d’extrême-droite. En voilà une bonne raison d’interdire la conférence pour « risques de trouble à l’ordre public ».
Nous nous battons donc contre les discours racistes, sexistes, mettant en danger des pans entiers de la population. Nous nous battons également pour la liberté d’expression, celle des journalistes indépendants de Hongrie notamment.
Cordon sanitaire de Lutte : Nous avons le droit de nous défendre !
Pendant deux semaines nous nous sommes mobilisé.es pour empêcher cet évènement. Nous avons le droit d’empêcher toute rencontre permettant la diffusion des idées de l’extrême droite : racisme, sexisme, nationalisme, LGBTQIA+phobies. Nous avons ainsi interpellé Edificio puis Sofitel, qui comptaient accueillir cette conférence, et les deux organisations ont préféré annuler, non pas par conviction, mais pour sauver leur image.
Pour des raisons qui ne sont pas tout à fait claires, le bourgmestre de Saint-Josse a pris un arrêté pour interdire la conférence, invoquant « ’ordre public ». Pour nous, la conférence représente un danger pour la population, par les idéologies qu’elle défend, et c’est à ce titre que nous nous sommes mobilisés pour la dénoncer, et essayer de l’empêcher.
Toutefois, la police n’a pas délogé manu militari les conférenciers. Ce qu’elle fait pourtant régulièrement avec les personnes sans-papiers et militant.es du droit au logement bruxellois.es. « Vous comprenez, il y a des gens importants et médiatiques, on ne peut pas y aller avec la matraque et frapper tout le monde » nous a-t-on dit. Message reçu.
Signalons au passage l’attitude du bourgmestre Emir Kir, exclu du PS en 2020 pour sa proximité avec l’extrême droite turque, qui se repeint aujourd’hui en antifasciste deux mois avant les élections.
Le Conseil d’État a finalement annulé cet arrêté, et des policiers supplémentaire de 1000-Bruxelles ont été envoyés pour protéger la conférence. Les politiciens qui se présentent aujourd’hui en victimes du « système » savent parfaitement que le système policier et judiciaire les protège. Comme antifascistes, nous l’expérimentons régulièrement, y compris en Wallonie (comme à Gilly par exemple). Il faut rappeler ici aussi que, le siècle dernier, c’est légalement que les fascistes sont arrivés au pouvoir, en se servant des institutions « démocratiques » et sans majorité populaire. Nous savons ce qui est arrivé ensuite. Pour ces intolérants et réactionnaires du 21ème siècle, les idées, buts, et stratégies, n’ont pas changé. Ils se targuent seulement d’un vernis de respectabilité, comme si leur projet politique d’extrême-droite était un projet de société comme un autre, et non un projet de création d’un ordre social nationaliste, anti-démocratique, inégalitaire, répressif, excluant et mortifère.
À ce titre, les déclarations du premier ministre Alexander De Croo sont au mieux naïves, et au pire complices. S’il se pose en apôtre de liberté d’expression, ce n’est cependant pas pour rien. Non, en se cachant derrière ce masque abstrait, il évite consciemment de parler de la crise sociale sur laquelle l’extrême droite prospère et d’adresser la nature brutale et antisociale de l’extrême-droite. Car la haine qui traverse leur discours finit par s’incarner directement dans des politiques ou des actes violents. Or, cette violence aujourd’hui, c’est, entre autres, son gouvernement qui en profite : traitement inhumain des sans-papiers, casse des services publics, restriction des libertés syndicales, dégradation des conditions de vie et de travail, et soutien aux impérialismes à l’international. Pour nous, le constat est clair, la tolérance des discours d’extrême-droite leur permet de prospérer, et donc revient à une forme de complicité. Et quant à notre tâche, elle s’exprime avec autant de simplicité : nous combattrons toujours l’extrême-droite, partout et par tous les moyens !
Face à l’extrême-droite, les cordons sanitaires et médiatiques sont nés pour que plus jamais, cela ne se produise. Aujourd’hui, ces cordons sont attaqués de toutes parts, y compris en Belgique francophone où ils ont démontré leur efficacité. Pour pouvoir assurer que les périodes de l’histoire dominées par des régimes fascistes ne se reproduisent effectivement plus jamais, les antifascistes se doivent de garantir les principes que le système politique et médiatique abandonne. Nous nous battons pour un cordon sanitaire de lutte face à l’extrême-droite. Nous invitons toutes celles et ceux qui le souhaitent à nous rejoindre. L’extrême-droite nous met en danger, nous avons le droit d’appliquer une autodéfense populaire antifasciste.
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La Coordination Antifasciste donne encore rendez-vous le 25 avril à Anvers pour la contre-manifestation contre la jeunesse nationaliste NSV, avec des départs collectifs depuis plusieurs villes. Nous appelons également à se mobiliser pour le 1er mai, journée de lutte des droits des travailleurs et travaileuses. Nous nous mobiliserons à à Breendonck le 5 mai, à l’appel de la Coalition 8 mai, ainsi que de manière décentralisée le 8 mai. Pour finir, nous annonçons déjà une grande manifestation antifasciste dans les rues de Bruxelles le dimanche 16 juin.