« Le prochain gouvernement fédéral devra économiser au moins 10 milliards d’euros pour maîtriser la dette publique », affirme la Banque nationale. Elle estime également qu’il n’est pas possible d’augmenter les salaires réels avant au moins 2026.
Par Jon (Bruxelles)
C’est toujours la même histoire : les salaires et les impôts seraient déjà beaucoup trop élevés, nous vivons donc au-dessus de nos moyens et il serait temps de se serrer la ceinture, en bon père de famille, de faire plus avec moins, etc.
L’austérité néolibérale
Les budgets sont élaborés – à tous les niveaux – en partant du principe que le budget est fixe et largement insuffisant pour réaliser tous les investissements nécessaires ; il s’agit donc de hiérarchiser et de répartir les déficits. C’est ainsi que la quasi-totalité des services publics ont été progressivement supprimés et érodés au cours des dernières décennies. La privatisation et la commercialisation ont entraîné des problèmes structurels dans les hôpitaux, les transports publics, l’enseignement, la petite enfance, les maisons de repos et de soin, les logements sociaux, etc.
Les travaux d’infrastructure tels que les barrages et les écluses sur les voies navigables ont été négligés. Après les inondations dans la vallée de la Dendre en 2010, on a conclu que douze anciens complexes de barrages (datant de 1863 !) devaient être rénovés de toute urgence : cinq en Wallonie, sept en Flandre. Mais la rénovation, ça coûte. Cet argent n’a apparemment pas été trouvé, surtout en Flandre : les déversoirs wallons ont tous été rénovés entre-temps, mais du côté flamand, pas un seul déversoir rénové n’a été achevé. Pour cinq des sept barrages flamands, les travaux n’ont même pas commencé ! Sans même parler d’une solution réellement durable, où l’aménagement du territoire n’est pas laissé au lobby immobilier, mais où il existe une politique sérieuse et coordonnée avec suffisamment d’espace pour les zones inondables.
Un budget réellement socialiste
Un budget véritablement socialiste partirait des besoins sociaux réels. Les ressources existent pour répondre à tous les besoins. Il est possible d’améliorer les services publics au lieu de les réduire, d’investir dans les énergies renouvelables et dans des logements sociaux modernes et économes en énergie, dans une éducation de qualité et gratuite, dans les transports publics, dans les soins de santé, etc.
Les défis sociaux et environnementaux nécessitent des investissements à grande échelle, surtout si nous voulons non seulement éviter les pires catastrophes et détériorations, mais aussi obtenir des avancées conséquentes.
Une fois que nous avons déterminé démocratiquement ce qui est nécessaire et souhaitable, nous pouvons commencer à chercher l’argent nécessaire. Nous partons du principe que les épaules les plus fortes doivent porter le fardeau le plus lourd. Or, c’est loin d’être le cas actuellement.
Une fiscalité équitable
L’impôt sur le revenu des personnes physiques est progressif : les salaires élevés paient plus d’impôts en pourcentage. Mais dans l’ensemble, notre système fiscal est loin d’être progressif. Il existe toutes sortes de déductions et de régimes fiscaux favorables aux plus aisés. Les accises et la TVA (54,8 milliards au total) sont des impôts antisociaux car bien que les pauvres consomment moins que les riches, ils doivent consacrer une part plus importante de leurs revenus à l’achat de biens de consommation. Mais ce qui fait qu’ à ce jour les épaules les plus solides ne supportent pratiquement aucune charge, c’est que les revenus du capital sont à peine taxés. Les plus-values sur les actions ne sont pas du tout taxées en Belgique. Les revenus locatifs ne sont quasiment pas taxés. Les bénéfices des sociétés sont en principe taxés à 25 % (au maximum), mais il existe toutes sortes de techniques « d’optimisation fiscale » qui assurent que, dans la pratique, les grandes entreprises ne paient presque pas d’impôts sur leurs bénéfices. Ainsi, un propriétaire en quête de rente peut gagner dix fois plus qu’une infirmière, tout en payant moins d’impôts !
Dans le budget 2024, 145 milliards d’euros de recettes proviennent des impôts sur le travail : 62 milliards au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, 83 milliards au titre des cotisations sociales. Le capital est beaucoup moins taxé : le précompte mobilier (sur les revenus du patrimoine, tels que les dividendes et les intérêts) ne rapporte que 5,4 milliards et l’impôt sur les sociétés (sur les bénéfices des entreprises) 26,6 milliards. À titre de comparaison, en 2022, la masse salariale totale en Belgique s’élevait à 268 milliards, les revenus du patrimoine à 154 milliards et les bénéfices des sociétés à 200 milliards.
Le PTB propose d’utiliser un impôt sur la fortune pour collecter 8 milliards supplémentaires auprès des millionnaires et pour mieux lutter contre la fraude fiscale (y compris dans les paradis fiscaux), estimée à 40 milliards. C’est un bon début, mais il faudra aller beaucoup plus loin pour parvenir à un système fiscal équitable capable de dégager des fonds suffisants pour répondre à tous les besoins sociaux. Et même dans ce cas, les riches s’enrichiront et les pauvres s’appauvriront. Les corrections fiscales peuvent atténuer les symptômes, mais la source de l’inégalité et de l’insoutenabilité demeure : le système capitaliste. Une solution juste et durable nécessite un changement de système révolutionnaire pour construire une société socialiste démocratique !