L’Irlande, un modèle de sortie de crise ?

Ce début d’année 2014, l’Irlande a été le premier pays de la zone euro à sortir d’un ‘‘plan d’assistance’’ conclu avec la troïka (Fonds Monétaire International, Banque Centrale Européenne et Union Européenne). L’Irlande s’était retrouvée dans les griffes de la Troïka en 2010 suite à l’endettement massif de l’Etat après le sauvetage des banques consécutif à l’éclatement de la crise.

Aujourd’hui, pour nombre de responsables européens, l’austérité à la sauce irlandaise est un modèle. Nous en avons discuté avec Paul Murphy, un élu atypique, député européen du Socialist Party (section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière et parti-frère du PSL). Ce dernier, actuellement en campagne pour sa réélection ce mois de mai, a clairement démontré quelle différence pouvait faire un élu qui considère sa position comme un instrument destiné à aider au développement des luttes travailleurs et des masses. ‘‘Ils parlent de reprise économique, mais nous ne parvenons toujours pas à joindre les deux bouts !’’, dénonce directement Paul dans sa campagne.

Il est vrai qu’outre le fait que la fin de l’austérité est encore loin d’être en vue (des mesures antisociales sont encore prévues à hauteur de 1,5% du PIB pour 2014), la politique gouvernementale a été des plus féroces : le salaire moyen des fonctionnaires a baissé de 17%, le nombre de fonctionnaires a été raboté d’un dixième, la TVA a augmenté, de nouvelles taxes ont été créés,… Depuis le début de la crise en 2008, un emploi sur sept a disparu. Une des conséquences est l’émigration massive des jeunes : sur une population de 4,5 millions d’habitants, 180.000 jeunes entre 15 et 24 ans ont quitté le pays ! Pendant ce temps, une nouvelle bulle immobilière s’est développée et menace d’éclater à son tour…

Pour Paul, la politique du gouvernement se résume à écraser la population: ‘‘Au lieu de lever le pied, le gouvernement continue à couper dans les budgets des services cruciaux tels que la santé et imposera une taxe sur l’eau draconienne d’ici quelques mois. La population a déjà du mal à joindre les deux bouts, ayant souffert de coupes salariales, de la généralisation des temps partiels et de l’augmentation du taux de chômage. Les bas salaires des nouveaux emplois et la flexibilité qu’ils requièrent tendent à créer une économie de bas salaires.’’

L’intérêt du ‘‘miracle irlandais’’ pour l’establishement européen se situe ailleurs : ‘‘les 300 personnes les plus riches ont vu leur richesse augmenter de 50 à 66 milliards d’euros entre 2010 et 2012 tandis que les multinationales bénéficient de conditions dignes d’un paradis fiscal à côté d’une main d’oeuvre très bon marché.’’

‘‘En réalité, c’est une vraie lutte pour survivre, pas une réelle reprise économique ou un avenir éclairci, à laquelle fait face la majorité de la population et les jeunes en particulier’’, confie Paul Murphy. ‘‘Un programme réellement socialiste peut offrir un véritable avenir. Ne pas payer les intérêts de la dette des actionnaires libérerait déjà 8 milliards d’euros cette année. Taxer les millionnaires de seulement 5% rapporterait 3 milliards et augmenter la taxe des entreprises afi qu’elle atteigne la moyenne européenne représenterait 5 milliards d’euros par an. Un programme de 5 milliards d’euros pour de vrais emplois pourrait engendrer de suite la création de 150.000 emplois et ainsi développer un réel dynamisme économique.’’

Mais, fondamentalement, sortir de la crise nécessitera l’instauration d’une alternative socialiste à la dictature des marchés, avec la nationalisation sous contrôle réellement démocratique des banques et des secteurs clés de l’économie pour une planification démocratique de l’économie répondant aux besoins de la population.


Un militant au parlement !

Paul Murphy n’a eu de cesse de dénoncer la politique pro-capitaliste en Irlande, au côté notamment de Joe Higgins, élu du Socialist Party au parlement irlandais. Il a fait de même au parlement européen dans le cadre de la fraction parlementaire de la Gauche Unitaire Européenne (qui réunit des organisations comme le Front de Gauche (France), Syriza (Grèce), Izquierda Unida (Espagne) et Die Linke (Allemagne)). Mais il s’est également engagé dans le développement de nombreuses campagnes de terrain anti-austérité en Irlande et ailleurs, dont l’une des dernières est consacrée à la lutte contre l’exploitation subie par la jeunesse au travail et pour un réel programme de création d’emploi. Il y a également eu les campagnes contre l’imposition de nouvelles taxes par un boycott de masse de celles-ci. Pour ces élections, il a notamment reçu le soutien de l’Alliance Anti Austérité (AAA).

Il a également activement participé à la lutte pour le droit à l’avortement en Irlande et au sein du Parlement européen, a dénoncé l’homophobie et la discrimination auxquelles fait face la communauté LGBTQI en Irlande et internationalement, participe au combat contre le Traité Transatlantique (qui vise à créer la plus grande zone de libre-échange au monde entre les USA et l’UE),…

Paul s’est aussi rendu en Grèce, en Espagne, en Italie ou encore au Portugal pour soutenir les travailleurs en lutte et défendre la nécessité d’une résistance unifiée contre l’austérité à travers toute l’Europe. Il a également été apporter son soutien aux travailleurs en grève dans les raffineries du Kazakhstan, a dénoncé le massacre des 40.000 Tamouls par les autorités du Sri-Lanka et s’est rendu à Istanbul durant les manifestations de masse qui ont défié le gouvernement turc d’Erdogan en juin 2013. Il a aussi participé en 2011 à la ‘Flottille pour la Liberté’ en route vers Gaza. Capturé par l’armée israélienne dans les eaux internationales, il a passé une semaine dans les geôles israéliennes. Il a d’ailleurs répétitivement dénoncé la complicité de l’Union européenne dans l’oppression palestinienne.

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