Massacre à Gaza. Travailleurs et jeunes en action contre les livraisons d’armes à Israël

Dans de nombreux pays, les travailleurs et les jeunes ont mené des actions contre les livraisons d’armes à Israël et contre le massacre de Gaza. Ces actions nécessaires et urgentes doivent être généralisées et intensifiées. Elles répondaient notamment à l’appel lancé par les syndicats palestiniens le 16 octobre pour « mettre fin à toute complicité et arrêter d’armer Israël ».

Leur déclaration contient cinq points concrets adressés aux syndicats et aux travailleurs au niveau international :

  • Refuser de fabriquer des armes destinées à Israël.
  • Refuser de transporter des armes vers Israël.
  • D’adopter des motions à cet effet au sein de leur syndicat.
  • De prendre des mesures contre les entreprises complices qui participent à la mise en œuvre du siège brutal et illégal d’Israël, en particulier si elles ont des contrats avec votre institution.
  • Faire pression sur les gouvernements pour qu’ils cessent tout commerce militaire avec Israël et, dans le cas des États-Unis, qu’ils cessent de le financer.

Par Philip Chmel

Le 31 octobre, le front commun des syndicats belges du transport (CNE, UBT, Setca et CSC-Transcom) a déclaré dans un communiqué commun que leurs membres refuseraient de manipuler des armes destinées à l’État israélien pour être utilisées dans son assaut contre Gaza, qui présente déjà des caractéristiques génocidaires.

Depuis, des dockers et des syndicats de Catalogne et de Gênes (Italie) se sont également mobilisés contre les livraisons d’armes à Israël, tout comme des travailleurs et des jeunes d’autres pays. Les dockers affiliés aux syndicats italiens USB (Unione Sindacale di Base) et SI Cobas (Sindacato Intercategoriale Cobas) soutiennent le boycott des transferts d’armes dans les ports italiens, en particulier la compagnie maritime israélienne ZIM, un important transporteur d’armements.

En Australie, des centaines de syndicalistes et de manifestants ont forcé un navire israélien ZIM à reprogrammer ses arrivées au port de Melbourne et à Port Botany à Sydney grâce à l’occupation des ports. Aux États-Unis, des centaines de manifestants se sont rassemblés à Oakland et à Tacoma pour bloquer les navires militaires à destination d’Israël. A Saint Louis, des jeunes ont bloqué les entrées d’une usine Boeing et à Toronto, au Canada, plus de 100 travailleurs et activistes ont bloqué l’entrée du fabricant d’armes INKAS, qui se vante dans la presse d’avoir « fourni au gouvernement d’Israël plus d’unités de commandement et de contrôle que n’importe quel autre fournisseur dans l’histoire ». De l’autre côté de l’Atlantique, en Grande-Bretagne, des travailleurs et des militants ont bloqué une usine d’armement de BAE Systems dans le Kent, ainsi que plusieurs sites d’Elbit Systems et de ses filiales, dont les usines du Kent et de Shenstone. Elbit Systems est l’un des plus grands fabricants d’armes israéliens et produit 85 % de l’équipement militaire terrestre d’Israël ainsi que ses drones de surveillance et de combat.

En Afrique du Sud, des membres et des sympathisants du WASP (Workers and socialist party, section sud-africaine d’ASI) ont participé, le vendredi 10 novembre, à une manifestation devant le siège de Paramount Group. Cette société a des liens avec Elbit Systems et des bureaux à Tel Aviv.

Par ailleurs, des travailleurs ont également manifesté en solidarité avec leurs collègues massacrés à Gaza par le régime d’extrême droite israélien. Les travailleurs des médias palestiniens, dont le Syndicat des journalistes palestiniens, ont manifesté le mardi 7 novembre à Ramallah pour condamner l’assassinat de leurs collègues. Aux États-Unis, « des travailleurs des médias ont mené une marche jusqu’au New York Times et ont ensuite occupé l’entrée du bâtiment du journal pendant plus d’une heure » pour s’opposer à la partialité des reportages du NYT. Des travailleurs du secteur de la santé de plusieurs pays ont également organisé des manifestations dans le cadre de l’indignation internationale suscitée par le bombardement dévastateur de l’hôpital Al Ahli Arab, le 17 octobre dernier.

Action directe, grèves et des millions de personnes dans les rues : Organisons un mouvement de grève de masse à l’échelle internationale

À l’instar du All India Central Council of Trade Unions ou du Doro-Chiba japonais (National Railway Motive Power Union of Chiba), de nombreux syndicats et fédérations syndicales dans de nombreux pays ont publié des déclarations de solidarité avec le peuple palestinien et appelé à l’arrêt immédiat du massacre à Gaza. Certains sont allés plus loin et ont rejoint ou appelé à des manifestations, comme les confédérations syndicales françaises CGT et Solidaires. Il s’agit là de mesures importantes qui peuvent également contribuer à faire reculer les forces de droite qui attisent l’islamophobie et les gouvernements qui tentent de réprimer ou d’affaiblir le mouvement.

L’ancienne ministre britannique de l’intérieur, Suella Braverman, a émis des propos répugnants, pour lesquels elle a été licenciée. Elle a qualifié les manifestations contre le massacre de Gaza de « marches de la haine » et de « gangs pro-palestiniens ». Malheureusement, il ne s’agit là que de la version la plus extrême de tentatives plus répandues visant à saper la légitimité des manifestations de solidarité et à insinuer qu’elles soutiennent le terrorisme. Le gouvernement britannique a tenté en vain d’interdire la marche pro-palestinienne de samedi dernier, tandis que la France et l’Allemagne ont interdit les manifestations de solidarité au début du mouvement. Ils ont dû changer de position depuis lors, compte tenu de la pression croissante exercée par la base de la société, qui a également conduit la vice-première ministre belge Petra De Sutter (GROEN, le gouvernement compte actuellement 7 vice Premier-ministres) à réclamer des sanctions contre Israël. En Égypte, le régime d’Al-Sisi a été contraint d’autoriser les premières manifestations nationales depuis dix ans sur l’emblématique Place Tahrir. Lorsque les manifestants se sont retrouvés sur cette place du Caire symbole de la révolution de 2011, les slogans sont rapidement devenus anti-régime. Au cri « Où sont les armées arabes ? » répondait celui de « Les voilà, les sionistes », en référence à la police anti-émeute égyptienne.

Cela souligne que ce ne sont pas seulement les froids calculs géopolitiques des gouvernements capitalistes, mais la lutte de classe vivante qui décide en fin de compte du cours de l’histoire. Actuellement, des millions de travailleurs et d’opprimés à travers le monde font clairement savoir qu’ils ne laisseront pas la classe dirigeante s’en tirer à bon compte avec ses actions meurtrières. Les déclarations et mobilisations syndicales doivent servir de tremplin pour élargir et intensifier les actions de grève et de blocage menées jusqu’à présent par une poignée de syndicats.

Les travailleurs et les jeunes du monde entier ont un rôle actif à jouer. Parallèlement aux manifestations de masse qui se multiplient, les actions directes, les débrayages étudiants (en Espagne, en Grande-Bretagne ou aux États-Unis) et les comités de solidarité (dans plusieurs universités françaises) peuvent organiser l’appel à l’action de l’ensemble du mouvement ouvrier et contribuer à faire pression sur les directions syndicales pour qu’elles organisent des actions de grève significatives contre le massacre à Gaza.

Nous devons construire un mouvement de masse qui repose sur des grèves de masse coordonnées et des comités de lutte démocratique, dans l’esprit de la première Intifada (1987-1993), de la Grève de la dignité de palestinienne de 2021 et du mouvement révolutionnaire féministe en Iran l’année dernière. Un changement fondamental ne peut être obtenu que par la lutte des masses, tant au niveau international que dans la région.

Pour parvenir à la victoire et résister non seulement à la répression mais aussi aux tentatives de faire dérailler la lutte (la première Intifada a par exemple effrayé les puissances impérialistes au point qu’elles ont conclu les accords d’Oslo en 1993 afin de trahir la lutte), l’histoire a largement démontré que les mouvements de masse ont besoin d’une direction démocratiquement élue ainsi que d’un programme clair pour le changement.

Un tel mouvement préparerait également le terrain pour lutter contre la militarisation croissante et toutes les formes d’impérialisme et de guerre. Les manifestations et les grèves contre les livraisons d’armes devraient être renforcées et étendues aux luttes contre le complexe militaro-industriel dans son ensemble. Des centaines de milliards sont dépensés en armements par des gouvernements capitalistes qui tentent de faire payer à la classe ouvrière leurs machines de guerre en réduisant parallèlement les budgets de l’enseignement, des services sociaux et des soins de santé. Alors que les fabricants d’armes engrangent des milliards, cela signifie la mort et la destruction pour la classe ouvrière et les opprimés de Gaza et du monde entier.

Cette industrie doit être nationalisée et placée sous le contrôle démocratique des travailleurs afin d’arrêter définitivement la production et la livraison d’armes à Israël et de discuter et décider démocratiquement de la manière dont les compétences et les machines pourraient être utilisées à la faveur d’une production socialement utile. Les puissantes luttes pour la reconversion des industries d’armement menées dans les années 1970 chez Lucas Aerospace en Grande-Bretagne et dans les années 1980 dans plus de 40 entreprises d’Allemagne de l’Ouest peuvent servir d’inspiration à cet égard.

La tâche immédiate des travailleurs, des jeunes et des personnes opprimées au niveau international consiste à généraliser et à intensifier le mouvement pour mettre fin au massacre de Gaza et combattre l’occupation. Les comités démocratiques dans les écoles, les universités, les lieux de travail et les quartiers seront essentiels pour attirer de nouvelles couches dans la lutte et discuter du programme nécessaire, de la stratégie qui en découle et des actions à mener dans cette perspective.

Sur cette base, nous pouvons également développer le combat contre nos propres gouvernements pour qu’ils cessent de financer la guerre et mettent fin à tout soutien qu’il soit militaire ou financier au régime israélien, ainsi que pour qu’ils mettent fin à la militarisation. Les milliards de dollars doivent être investis dans les services publics.

Nous nous faisons l’écho de l’appel de nos camarades qui mènent la lutte dans la région sur le terrain « pour arrêter la guerre, renverser le régime d’occupation et de siège et mettre fin à l’oppression nationale des masses palestiniennes, dans le cadre de la construction d’une lutte pour un avenir d’égalité, de bien-être et de paix véritable pour tous les travailleurs, les pauvres et les jeunes, de toutes les communautés nationales, dans le cadre de la transformation socialiste nécessaire dans la région. »

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