Quelle stratégie contre l’extrême-droite? Après le cordon sanitaire, l’illusion de la “bonne gestion”

Dans le cadre de la lutte contre l’extrême-droite, beaucoup d’idées ont été lancées ces dernières années par les partis traditionnels et leurs politiciens. Au début, il fallait simplement ignorer l’extrême-droite. Il y a eu ensuite le cordon sanitaire. Puis certains ont avancé l’idée qu’une participation de l’extrême-droite au pouvoir permettrait de la „mouiller“ dans la gestion quotidienne. La nouvelle “tactique” contre le VB s’appelle maintenant “la bonne gestion”.

Geert Cool

Cordon sanitaire

Le cordon sanitaire se veut un barrage contre toute participation de l’extrême-droite au pouvoir. C’est en fait le prolongement de la stratégie basée sur la négation des résultats de l’extrême-droite. Si toute participation des fascistes au pouvoir doit bien entendu être rejetée, nous ne pensons pas que cela change fondamentalement quelque chose au succès de l’extrême-droite.

Certains cultivent l’illusion qu’en associant l’extrême-droite au pouvoir, il y aurait moyen de diviser le VB entre ceux avec qui on peut travailler et les autres. Mais chaque scission de l’extrême-droite observée au niveau international n’a pas mené à un renforcement des “modérés”. Lors des élections autrichiennes en octobre – après plusieurs années de participation au pouvoir du parti d’extrême-droite FPÖ de Haider suivie de la scission de ce parti – le BZÖ (la scission „modérée“ du FPÖ à l’intérieur de laquelle se retrouvent Haider, les ministres et presque tous les parlementaires) n’a obtenu “que“ 4% alors que le FPÖ a récolté 11% des suffrages. Les “radicaux” l’ont donc emporté sur les “modérés” et ont même poussé le BZÖ à défendre des positions plus radicales qu’avant durant sa campagne électorale.

De plus, la base de cette scission n’était pas le résultat direct de la participation gouvernementale, mais la conséquence du fait que le FPÖ a été rejeté sur la défensive suite à la large mobilisation des travailleurs contre les mesures gouvernementales, qui a connu son apogée en 2003 et a montré à beaucoup de gens que le FPÖ n’était pas du côté des travailleurs et de leurs familles.

Vous avez dit “bonne gestion”?

L’écrivain anversois Tom Lanoye a déclaré après les élections: “Anvers a montré qu’en Flandre, avec une bonne politique et un projet clair, on peut remettre à sa place un parti négatif”. C’est une remarque dangereuse quand on regarde les résultats dans presque toutes les communes en Flandre, y compris dans les districts anversois tels que Hoboken, Merksem ou Deurne, où le VB gagne encore du terrain. La “bonne gestion” n’existait pas dans toutes ces localités?

De plus, nous ne sommes pas d’accord sur le constat de “bonne gestion” menée à Anvers et Gand. En guise de gestion, les projets de prestige ont repoussé les problèmes – et les populations en difficultés – en dehors du centre-ville. Les difficultés n’ont été que déplacées. La détérioration de la position du VB dans les districts d’Anvers et de Borgerhout est entièrement compensée par les progrès qu’il réalise dans les districts situés autour du centre ville.

Des expériences tirées de l’histoire belge nous montrent les limites de la “bonne gestion” par des “techniciens” et des “experts”. En 1935, en réponse à l’instabilité et à la crise économique, un gouvernement d’experts extérieurs au monde politique a été formé sous la direction d’un haut dirigeant de la Banque Nationale, Paul Van Zeeland, pour gérer le pays. Ce gouvernement et sa politique ont mené à une victoire sans précédent de l’extrême-droite aux élections de 1936…

Une “bonne gestion” est évidemment nécessaire. Mais, pour nous, elle exige de partir des intérêts de la majorité de la population et non des couches les plus aisées. Comment les partis traditionnels en seraient-ils capables alors qu’ils sont les prisonniers – volontaires – d’une logique néolibérale ?

Les antifascistes qui veulent offrir une réponse politique aux électeurs du VB doivent plutôt s’engager dans des initiatives qui viennent du mouvement ouvrier et dans les luttes. L’initiative du Comité pour une Autre Politique (CAP) offre une chance d’avancer dans cette voie.

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