Une grève des services publics a lieu aujourd’hui en Belgique. Le sous-investissement chronique a mis sous pression l’ensemble des services, avec de très néfastes conséquences pour les usagers et pour le personnel. Des transports en commun à l’enseignement en passant par les crèches, le manque de ressource se fait sentir partout et le constat s’impose : c’est inacceptable.
La lutte pour plus de moyens bénéfice donc d’un bon potentiel, qui doit être saisi et organisé. Là où des revendications spécifiques avaient été utilisées pour renforcer l’appel à la mobilisation d’aujourd’hui, comme dans l’enseignement communal à Anvers, la participation a été plus remarquable. C’était également le cas à l’université de Gand (UGent). Tim, délégué de CGSP, l’a constaté : « Le piquet de grève au rectorat contre les coupes budgétaires dans l’enseignement supérieur a été un succès. Depuis 2008, nous avons perdu un montant annuel de 590 millions d’euros en raison des économies réalisées, l’UGent perdant à elle seule 104 millions d’euros par an. Nous exigeons du conseil d’administration de ne pas faire d’économies en trompant les étudiants par le biais des frais d’inscription, ni en procédant à des coupes antisociales dans le personnel. Nous leur demandons de nous rejoindre dans la lutte pour un refinancement public de l’enseignement supérieur ! » C’était également le cas à Liège, où toutes les crèches de la Ville de Liège ont été fermée cette semaine : du jamais vu. Les puéricultrices en lutte réclament que la pénibilité de leur travail soit reconnue. Elles étaient visibles en solidarité sur de nombreux autres piquets de grève.
Construire un mouvement demande de rechercher à impliquer les collègues le plus possible, en partant de leurs intérêts, de leurs inquiétudes et de leurs réflexions. A partir de là, un plan peut être élaboré pour construire la lutte sur le long terme et arracher des victoires. Dans plusieurs endroits, c’est dans ce cadre que la Journée de lutte pour les droits des femmes du 8 mars avait été utilisée : comme élan pour développer des revendications spécifiques et assurer la mobilisation d’aujourd’hui.
Tout cela ne semblait hélas pas évident partout aujourd’hui. Après avoir subi les conséquences du manque de moyens durant des années, un certain découragement a pu s’installer. D’autant plus que les partis traditionnels parlent à nouveau de coupes budgétaires.
Mais il est possible de vaincre. En termes de méthodes de combat et de construction d’un rapport de force, nous pouvons nous inspirer de l’exemple français. Il y a plus d’un an, le débat public en France était dominé par la bataille entre Le Pen et Zemmour, c’est-à-dire entre l’extrême droite et l’extrême droite. Cette semaine, le 7 mars, il y a eu 3,5 millions de grévistes et de manifestants contre la réforme des retraites de Macron ! Cela démontre de manière éclatante comment les choses peuvent s’inverser. Quand le mouvement ouvrier se manifeste et se bat de manière offensive, il lui est possible d’attirer avec lui de larges couches de la société. Une majorité écrasante de la population française soutient la protestation sociale et refuse d’entendre parler d’une augmentation de l’âge de la retraite. Si cet âge est aujourd’hui plus bas en France qu’en Belgique, c’est d’ailleurs en raison de la contestation sociale.
Pour susciter l’enthousiasme pour la lutte sociale, simplement riposter aux propositions et attaques antisociales est insuffisant. Nous devons défendre nos propres propositions et revendications, telles qu’un plan radical d’investissement public dans les services publics visant à répondre aux besoins de la population. Plus de moyens publics pour de meilleures infrastructures, plus de ressources humaines pour les services essentiels comme l’enseignement, les transports publics, la fonction publique… c’est ce qui s’impose. Oui, mais il n’y a pas d’argent, objecte-t-on souvent, notamment de la part de certains responsables politiques.
Si nous nous limitons à la logique de ce système, aux étroites limites de ce qu’il permet, il n’y aura jamais assez de moyens pour des services publics décents. Il faut oser aller à l’encontre de la logique du système. Il y a suffisamment d’argent dans la société, un petit groupe de super-riches se porte de mieux en mieux. Les multinationales de l’énergie ont fait des milliards de profits, mais pour une transition verte, elles se tournent vers les subventions gouvernementales. Les banques font à nouveau de gros bénéfices qu’elles distribuent à leurs actionnaires. Nous devons chercher l’argent là où il se trouve et nationaliser les secteurs de l’énergie, de la finance et d’autres secteurs essentiels pour les placer sous contrôle et gestion démocratiques. Les ressources nécessaires pourront alors être mobilisées pour fournir des services répondant aux besoins de la population.