L’Italie vers les élections européennes : entre rigueur et instabilité

La naissance du gouvernement Renzi a renforcé le sentiment de haine et de dégoût vis-à-vis de la politique traditionnelle parmi les travailleurs et les masses populaires italiennes. Il s’agit du troisième gouvernement non-élu consécutif, nommé après consultations entre le président de la république Giorgio Napolitano qui va éteindre ses 88 bougies et l’état-major de la Banque Centrale Européenne.

Matteo Renzi, le nouveau premier ministre, est un jeune homme qui a construit son succès politique contre la vieille garde social-démocrate du PD (Parti Démocrate) et en s’entourant de personnalités du monde du spectacle et de richissimes entrepreneurs incarnant une ‘‘nouvelle philosophie d’entreprise’’…

Pour l’establishment politique italien et européen, et dans un cadre de fort discrédit du système politique, Renzi est le bon homme arrivant au bon moment. Les stratèges du capital estiment que l’Italie a besoin de réformes et de stabilité, notamment en relation au semestre de présidence du Conseil Européen qui s’ouvrira en juillet et à l’Exposition universelle qui se tiendra à Milan en 2015. Pour cette raison, Renzi incarne le désir de stabilité de la classe dominante qui navigue à présent dans l’ombre et qui aspire à se doter d’une façade plus propre après les parenthèses ‘techniques’ et les multiples scandales qui se sont abattus sur l’ancien premier ministre Silvio Berlusconi. Berlusconi a été condamné à quatre ans de réclusion pour fraude fiscale et a été jugé inéligible. Sa peine a été commutée en 4 heures de service social par semaine.

Renzi qui a plus d’ambition et de soutien que ces prédécesseurs aura plus de marge de manœuvre. Toutefois, la dégradation permanente des conditions de vie de la majorité de la population, les contradictions politiques au sein de sa ‘grande majorité des responsables’ et la forte instabilité politique qui continue a caractériser la situation italienne indiquent que la lune de miel du gouvernement sera de courte durée.

Lors des dernières élections politiques en février 2013, le mouvement 5 étoiles était parvenu à obtenir le résultat exorbitant de 25% des suffrages exprimés. Ce résultat était révélateur du rejet de la politique dominante, de ses mesures d’austérité, de ses scandales et de ses trahisons.

Lors de ces dernier mois, le caractère fortement hétérogène de ce mouvement structuré autour du blog de Beppe Grillo, l’incapacité d’exprimer des prises de position unitaires sur les questions les plus diverses et la méthode fortement autoritaire et pyramidale de gérer le mouvement ont conduit à une longue série de scissions individuelles de parlementaires et d’expulsions de dissidents dans les régions. Le Mouvement 5 Etoiles est prisonnier de son caractère de mouvement virtuel, de son absence de programme véritable et de la faiblesse de sa base sociale de référence, ce mouvement va inévitablement se dégonfler cela engendrera une augmentation de la frustration chez une couche d’activistes qui recommenceront à chercher une solution de lutte et d’organisation politique contre les partis de la Troïka. Il est toutefois fort probable que le Mouvement 5 Etoiles obtiendra son dernier triomphe électoral lors des élections européennes à venir. Un bon résultat électoral pour ne pas parler d’une victoire du Mouvement 5 Etoiles risque de fortement affaiblir le gouvernement Renzi et de freiner ses multiples projets de réforme. Conscient des risques de fragmentations au sein de son mouvement, Beppe Grillo a imposé à tous les candidats un ‘accord’ qui les force à verser 250.000 euros au mouvement s’ils trahissent le pacte avec leurs électeurs. De cette façon, Grillo et Casaleggio (le gourou de l’informatique cofondateur et copropriétaire du mouvement) essayent de renforcer leur emprise sur le mouvement contre toute voix dissidente.

Pour ce qu’il en est des grands parti traditionnel, le Parti Démocrate, le Nouveau Centre Droit et Forza Italia portent des campagnes politiques très similaires qui n’intéressent ou ne passionnent pratiquement personne. La gauche radicale incapable de se présenter sous ses propres symboles souillés par des décennies de petites tactiques et de trahisons ouvertes a choisi de se présenter derrière le visage réconfortant d’Alexis Tsipras, le leader du parti grec de gauche radicale Syriza, pratiquement inconnu en Italie. La liste Tsipras ‘dirigée’ par un comité de six intellectuels, véritables vieux dinosaures de la petite gauche progressiste et de la ‘société civile’ italienne risque d’aboutir à un résultat décevant. Dans cette éventualité, la gauche radicale italienne serait privée de représentant pour la quatrième fois d’affilée lors d’élections importantes, alors qu’elle était encore relativement forte jusqu’il y a peu. Cette perspective risque de mettre un terme à la longue agonie du PRC et d’autres petites forces résiduelles.

A la veille des élections, la situation politique Italienne reste caractérisée par une forte dose d’incertitudes et par une très forte instabilité politique. A l’heure actuelle, le mouvement ouvrier est saigné par une avalanche de licenciements, de délocalisations et de fermetures de sites de production. Mais il est le grand absent des discussions politiques. L’inévitable reprise du conflit social modifiera cette situation et réinitiera dans la société une discussion autour de la nécessité de construire un nouveau projet politique pour les jeunes et les travailleurs qui puissent prendre l’initiative de lancer une offensive frontale capable de mettre fin aux massacres sociaux que nous subissons actuellement.

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