1er mai : Journée internationale de lutte et de solidarité pour le socialisme !

Le 1er mai, fête des travailleurs, constitue l’une des plus grandes traditions du mouvement ouvrier. Cette journée de lutte est étroitement liée au combat destiné à imposer la journée des 8 heures et à l’avènement de la Deuxième Internationale, à la fin du 19ème siècle. Le mouvement ouvrier était alors en pleine expansion et de nouvelles organisations de masse voyaient le jour.

Par Kim (Gand)

Le 1er mai puise ses racines aux Etats- Unis où, le 1er mai 1886, une grève nationale fut organisée pour revendiquer l’instauration de la journée des 8 heures. A cette époque, le 1er mai était aux USA le ‘‘Moving Day’’, c’est-à-dire le jour où tous les contrats de travail annuels étaient renouvelés. Au total, environ 340.000 travailleurs se mirent en grève de concert, un énorme succès pour le pays. Le résultat de cette grève a varié de région en région, mais, à certains endroits, la journée des 8 heures fut effectivement appliquée.

À Chicago, où 40.000 travailleurs étaient entrés en grève, les revendications furent rejetées. Le 3 mai, la grève se poursuivait toujours aux usines McCormick. Les patrons tentèrent alors de casser la grève en recourant à des briseurs de grève, et les affrontements furent violents. L’intervention des forces de l’ordre fit perdre la vie à six grévistes. Le 4 mai, un meeting de protestation massif à Haymarket Square, avec environ 15.000 participants, eut également à affronter l’attaque de la police. Un agent provocateur lança une bombe dans les rangs de la police, qui a ensuite tiré sur la foule sans discernement. Huit dirigeants syndicaux furent arrêtés, certains condamnés à mort, d’autres condamnés à vie. Quelques années plus tard, la fédération syndicale américaine pris l’initiative de réorganiser une journée d’action le 1er mai, toujours pour revendiquer l’application générale des 8 heures.

A cette époque, de nombreux pays européens connaissaient l’essor de partis ouvriers de masse. Ainsi, le Parti Ouvrier Belge (POB, l’ancêtre du PS) fut par exemple fondé en 1885. Un siècle après la Révolution française, ces partis se sont réunis à Paris en 1889 pour fonder la Deuxième Internationale, un regroupement international des organisations du monde du travail. Lors de son Congrès de Fondation, l’idée d’une journée d’action internationale dans le cadre de la lutte pour la journée des 8 heures fut soulevée. Quand il devint clair que les Américains allaient de toute manière organiser une action dans leur pays le 1er mai 1890, il fut facile de mettre cette date en avant auprès de tous.

En Belgique, ce jour-là, quelque 150.000 travailleurs furent en grève. Le mot d’ordre fut particulièrement suivi dans le secteur minier : environ 100.000 des 110.000 mineurs s’étaient mis en grève à cette occasion ! Des manifestations eurent lieu à Bruxelles, Charleroi, Liège, Le Centre, Frameries, Anvers, Gand et Louvain.
Au niveau international, les manifestations furent massives à Vienne, Prague, Budapest, Bucarest, en Suisse, aux Pays-Bas et en Scandinavie. En Angleterre et en Espagne, les manifestations eurent lieu le dimanche 4 mai. En Allemagne, encore sous la botte de Bismarck et de ses lois antisocialistes, la grève toucha tout de même un travailleur sur dix dans les centres industriels, entrainant par la suite une vague de licenciements et de grèves. L’enthousiasme autour du 1er mai 1890 fut si grand et si évident que la date devint une journée de lutte annuelle sur le plan international.

L’élite capitaliste a depuis lors tenté par tous les moyens de minimiser l’impact du 1er mai. Aux Etats-Unis, le président Cleveland (président entre 1885 et 1889 et entre 1893 et 1897) exigea de déplacer la journée d’action au début du mois de septembre afin d’éviter qu’elle ne devienne une commémoration des évènements de Haymarket. Dans d’autres pays, dont la Belgique et la France, le 1er mai devint un jour férié, afin d’empêcher les grèves de prendre place.

Aujourd’hui, les célébrations du 1er mai sont souvent limitées, en taille et en combativité. Mais dès que le mouvement des travailleurs entre en lutte, il revient aux origines de la tradition de cette journée. Aux États-Unis par exemple, le 1er mai 2006, une grève générale des sans-papiers a rencontré un gigantesque succès, avec des millions de participants, contre un projet de loi contre l’immigration clandestine. En 2011, il y a eu 100.000 manifestants à Milwaukee, au Wisconsin, contre les attaques antisyndicales du gouverneur Walker. En 2010, le régime turc a été forcé d’accepter, pour la première fois depuis plus de 30 ans, que le 1er mai soit commémoré place Taksim. Des centaines de milliers de manifestants étaient présents. En 2011, ce succès fut répété. En Espagne, le 1er mai 2011 s’est déroulé tout juste avant le début du mouvement des Indignés, mais au moins 200.000 personnes étaient descendues dans les rues contre les mesures d’austérité des gouvernements.

L’organisation mondiale de la résistance contre le capitalisme et l’exploitation est à la base de la tradition du 1er mai. Refaisons à nouveau de cette fête des travailleurs une journée de lutte pour la solidarité et le socialisme !


Quelles sont les origines du 1° mai ? – Par Rosa Luxemburg

Rosa Luxembourg (1871-1919) est une révolutionnaire marxiste cofondatrice de la Ligue spartakiste, puis du Parti communiste d’Allemagne. Elle fut assassinée à Berlin en janvier 1919 pendant la révolution allemande, lors de la répression de la révolte spartakiste.

L’heureuse idée d’utiliser la célébration d’une journée de repos prolétarienne comme un moyen d’obtenir la journée de travail de 8 heures [1], est née tout d’abord en Australie. Les travailleurs y décidèrent en 1856 d’organiser une journée d’arrêt total du travail, avec des réunions et des distractions, afin de manifester pour la journée de 8 heures. La date de cette manifestation devait être le 21 avril. Au début, les travailleurs australiens avaient prévu cela uniquement pour l’année 1856. Mais cette première manifestation eut une telle répercussion sur les masses prolétariennes d’Australie, les stimulant et les amenant à de nouvelles campagnes, qu’il fut décidé de renouveler cette manifestation tous les ans.

De fait, qu’est-ce qui pourrait donner aux travailleurs plus de courage et plus de confiance dans leurs propres forces qu’un blocage du travail massif qu’ils ont décidé eux-mêmes ? Qu’est-ce qui pourrait donner plus de courage aux esclaves éternels des usines et des ateliers que le rassemblement de leurs propres troupes ? Donc, l’idée d’une fête prolétarienne fût rapidement acceptée et, d’Australie, commença à se répandre à d’autres pays jusqu’à conquérir l’ensemble du prolétariat du monde.

Les premiers à suivre l’exemple des australiens furent les états-uniens. En 1886 ils décidèrent que le 1° mai serait une journée universelle d’arrêt du travail. Ce jour-là, 200.000 d’entre eux quittèrent leur travail et revendiquèrent la journée de 8 heures. Plus tard, la police et le harcèlement légal empêchèrent pendant des années les travailleurs de renouveler des manifestations de cette ampleur. Cependant, en 1888 ils renouvelèrent leur décision en prévoyant que la prochaine manifestation serait le 1° mai 1890.

Entre temps, le mouvement ouvrier en Europe s’était renforcé et animé. La plus forte expression de ce mouvement intervint au Congrès de l’Internationale Ouvrière en 1889 [2]. A ce Congrès, constitué de 400 délégués, il fût décidé que la journée de 8 heures devait être la première revendication. Sur ce, le délégué des syndicats français, le travailleur Lavigne [3] de Bordeaux, proposa que cette revendication s’exprime dans tous les pays par un arrêt de travail universel. Le délégué des travailleurs américains attira l’attention sur la décision de ses camarades de faire grève le 1° mai 1890, et le Congrès arrêta pour cette date la fête prolétarienne universelle.

A cette occasion, comme trente ans plus tôt en Australie, les travailleurs pensaient véritablement à une seule manifestation. Le Congrès décida que les travailleurs de tous les pays manifesteraient ensemble pour la journée de 8 heures le 1° mai 1890. Personne ne parla de la répétition de la journée sans travail pour les années suivantes. Naturellement, personne ne pouvait prévoir le succès brillant que cette idée allait remporter et la vitesse à laquelle elle serait adoptée par les classes laborieuses. Cependant, ce fût suffisant de manifester le 1° mai une seule fois pour que tout le monde comprenne que le 1° mai devait être une institution annuelle et pérenne.

Le 1° mai revendiquait l’instauration de la journée de 8 heures. Mais même après que ce but fût atteint, le 1° mai ne fût pas abandonné. Aussi longtemps que la lutte des travailleurs contre la bourgeoisie et les classes dominantes continuera, aussi longtemps que toutes les revendications ne seront pas satisfaites, le 1° mai sera l’expression annuelle de ces revendications. Et, quand des jours meilleurs se lèveront, quand la classe ouvrière du monde aura gagné sa délivrance, alors aussi l’humanité fêtera probablement le 1° mai, en l’honneur des luttes acharnées et des nombreuses souffrances du passé.

Notes :

[1] L’usage était alors une journée de travail d’au moins 10 à 12 heures par jour.

[2] Il s’agit du premier congrès de la II° internationale.

[3] Raymond Lavigne (1851- ?), militant politique et syndicaliste.

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