Quand la perception se heurte à la réalité

Entre-temps, rue de la Loi…

L’Establishment politique est en difficulté. Il aurait besoin de stabilité pour faire avaler un plan d’austérité canon après les élections du 13 juin. Mais les libéraux s’empoignent sur la place publique.

Eric Byl

Les Chrétiens-Démocrates remontent dans les sondages en Flandre, mais la faiblesse du CDH n’en fait pas une alternative valable. La famille sociale-démocrate devient incontournable et l’extrême-droite rit sous cape.

Ainsi s’arrêtent quelques fables tenaces. Après la défaite historique des Chrétiens-Démocrates en 99, beaucoup pensaient que la famille libérale allait reprendre le rôle d’instrument politique le plus important pour la bourgeoisie. Les vieilles contradictions de classes seraient dépassées et réduites à une contradiction parmi beaucoup d’autres dans la société. Le VLD et le MR se sont profilés par conséquent comme des partis «populaires» d’un nouveaux type. Pas comme le vieux CVP, sur la base de branches socio-économiques («standen») et de classes, mais de «citoyens». De plus Verhofstadt prétendait que ce n’est pas la réalité qui est la plus importante, mais plutôt la perception de cette réalité qui est décisive. A gauche nous retrouvons cette même idée dans la surestimation du rôle des médias. L’optimisme de Verhofstadt I et II a été contagieux un petit temps, tant qu’il y avait de l’argent dans les caisses.

Le MAS a dû nager à contre-courant. Dans notre texte du congrès de 2000, nous écrivions qu’il était prématuré d’enterrer le CVP et que la Belgique évoluerait à terme vers la domination de deux pôles bourgeois, un conservateur (l’aile droite du CD&V, du CDH, du VLD, du MR et aussi de ce qui s’appelait encore la Volksunie) et un pseudo pôle progressiste (autour du SP.a, du PS et des verts, des nationalistes de gauche, des libéraux de gauche et surtout le MOC). Nous y ajoutions que le pôle «progressiste» jouirait légèrement de la préférence de la bourgeoisie grâce à son contrôle de l’appareil syndical.

La crise du capitalisme mettra de nouveau à l’avant-plan la contradiction fondamentale dans la société, entre travail et capital. Finalement, reconnaissant l’importance de la perception, nous y ajoutions que «en dernière instance ce sont les conditions matérielles qui déterminent le mouvement et pas le contraire».

La crise a miné l’autorité des instruments politiques traditionnels. Mais pas nécessairement comme nous le voulions. Dans les années 90 cela a mené à la croissance de l’extrême-droite et au morcellement politique. Quand il y a de l’insatisfaction, il y a toujours un aventurier pour en tirer parti. Mais quand cela devient vraiment important, l’aventurier fait le choix le plus payant, comme par exemple Duchâtelet, le fondateur de Vivant. Le morcellement du paysage politique est par définition un phénomène temporaire. Dans une époque de cartels politiques les politiciens interprètent volontiers le morcellement politique comme la raison de l’impossibilité de gérer. En réalité le morcellement n’est pas la cause, mais une conséquence temporaire de cette impossibilité de gérer. Aujourd’hui les politiciens découvrent le principe de «l’unité dans la diversité». En Flandre, «cartel» est un nouveau mot à la mode. La question cruciale est cependant jusqu’où il y a une unité dans cette diversité. Le VLD peut utiliser un peu plus de cohérence. Pour le MR, Richard Fourneaux, n’est pas vraiment un cadeau. Après Ducarme, c’est déjà le deuxième politicien MR en difficulté avec le fisc. Le CD&V, se positionne bien dans les sondages et a de la chance que le NVA ne passe pas le seuil électoral.

Le cartel peut cependant faire tourner à l’aigre le CD&V: le N-VA bruxellois veut aller seul aux élections, mais c’est surtout le départ de Bert Peirsegaele, secrétaire national à la mutualité chrétienne, qui trouve que le CD&V est poussé trop à droite par son alliance avec le N-VA, qui constitue un dangereux précédent. Une opinion que partagent bien des membres de l’ACW (MOC flamand). En attendant, le SP.a semble le plus malin. Il a déjà digéré Spirit et une partie des verts. Le PS attend simplement que le CDH et le MR s’entre-déchirent.

Ecolo ne peut plus inquiéter le PS. Le SP.a et le PS deviendront probablement incontournables après le 13 juin. Le réel défi ne se situe cependant pas encore là. La tension grimpe déjà avant les élections entre l’aile wallonne et l’aile flamande de la FGTB. En outre la CSC ne va pas rendre la situation plus facile pour le gouvernement.

Les dirigeants syndicaux auront plus de difficultés de tenir leurs troupes en mains après les élections, lorsque le gouvernement lancera l’offensive contre les pensions, la SNCB, la Poste et les soins de santé. Alors les masques du SP.a et du PS tomberont vite. Plus que jamais il faut une réelle opposition de gauche à la politique de droite.

Aidez le MAS à relever ce défi.

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