Snowpiercer, un mariage efficace de science-fiction et de lutte des classes

Par Nicolas Croes

Juillet 2014. Face au réchauffement climatique, plusieurs dizaines de pays répandent dans l’atmosphère un gaz destiné à refroidir la température terrestre. 17 ans plus tard, alors que le monde est plongé depuis autant d’années dans une terrible ère glaciaire, les derniers survivants de l’Humanité sillonnent le paysage désolé à bord d’un train forcé à rouler continuellement et très strictement hiérarchisé. A sa tête l’élite et son dirigeant, Wilford, qui possède tout, du train au droit de vie et de mort sur ses occupants. En queue de train, la masse des ‘‘queutards’’ survit dans un espace surpeuplé, dans une misère sans nom. Ils n’ont pour eux que l’espoir de la révolte, et Snowpiercer, le transperceneige raconte leur soulèvement.

La science-fiction s’est régulièrement faite le vecteur de réflexions, d’espoirs mais aussi (et surtout) d’inquiétudes concernant notre société et son évolution. Ces dernières années, certains ont plus franchement abordé le cas de la révolte contre un système inégalitaire (notamment Elysium, de Neill Blomkamp, 2013). Ce n’est bien entendu pas un hasard dans l’actuel contexte de crise du capitalisme et de révolte de masse à travers le globe.

Mais ce qui frappe dans Snowpiercer, et ce qui le distingue singulièrement d’autres productions d’anticipation du style de Time Out (d’Andrew Niccol, 2011), c’est la clarté avec laquelle est exposée le système de classes sociales ou encore la notion que le pouvoir dépend de la propriété des moyens de production (la ‘‘machine sacrée’’ qui permet au train de rouler indéfiniment dans ce cas-ci).

L’élément collectif du processus révolutionnaire est aussi plus fortement souligné, davantage même que dans la bande-dessinée originale de 1982. Curtis (Chris Evans), le dirigeant du soulèvement, est loin de l’image du héros solitaire tentant à sauver le monde par sa seule force individuelle. Une question abordée et qui est fondamentale pour toute personne désireuse de lutter pour améliorer ses conditions d’existence est celle de la réforme ou de la révolution (se contenter de quelques wagons ou prendre possession de la machine?). Enfin, la tentative de géo-ingénierie à la base de cet univers post-apocalyptique est également une sérieuse mise en garde face aux ‘‘solutions’’ que les élites capitalistes peuvent mettre en œuvre face au péril climatique plutôt que d’opérer un changement de système.

Mais si ce film aborde avec brio une thématique forte (même si la conclusion de l’intrigue peut ouvrir la voie à de nombreuses discussions), c’est loin d’être son seul attrait. Les acteurs sont brillants (notamment John Hurt et Tilda Swinton, cette dernière étant tout bonnement époustouflante en Ministre du Train) et le réalisateur sud-coréen Bong Joon-h confirme ce talent que la scène internationale avait pu déjà voir à l’œuvre avec le splendide thriller fantastique The Host (2007). Un film à voir, donc, et à faire voir.

 

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