Suède. Nouvelles manifestations de masse contre la violence nazie

Rattvisepartiet Socialisterma (CIO-Suède)

De nouvelles mobilisations antifascistes ont encore eu lieu ce week-end, notamment à Göteborg (5.000 personnes) et à Malmö (10.000 personnes). Nos camarades de Rättvisepartiet Socialisterna (parti-frère du PSL en Suède) ont participé à ces mobilisations, et ont notamment eu un orateur à la tribune lors de la manifestation de Göteborg.

Alors qu’ils rentraient chez eux après une manifestation à l’occasion de la Journée Internationale des Femmes le 8 mars dernier à Malmö (dans le sud du pays), des militants ont brutalement été tabassés et poignardés par un groupe de néo-nazis. L’un des manifestants, Showan, est hospitalisé dans un état critique suite à ses blessures. Le lendemain, des milliers de personnes sont sorties en rue dans plusieurs villes de Suède afin de protester contre la violence nazie. D’autres manifestations ont suivi et davantage sont encore prévues.

La violence nazie est en sérieuse augmentation en Suède. Cette fois-ci, les 3 personnes arrêtées pour tentative de meurtre sont membres du Parti des Suédois (SvP). En décembre dernier, un groupe de 30 membres du mouvement concurrent Mouvement de Résistance de Suède (Smr) a violemment attaqué une manifestation anti-raciste à Kärrtorp, au Sud de Stockholm (voir notre article à ce sujet).

La réaction des masses fut la plus grande manifestation antiraciste qui ait jamais eu lieu en Suède, avec au moins 20.000 participant le 22 décembre. Au total, 43.000 personnes ont participé aux manifestations antifascistes et antiracistes qui se sont tenues dans 37 villes du pays le mois suivant.

Ces deux attaques étaient politiquement motivées contre ceux que les néo-nazis considèrent comme leurs principaux ennemis – les antiracistes, les socialistes anticapitalistes, les féministes.

La vague antiraciste de décembre

La force de la vague antiraciste de décembre a surpris presque tout le monde. Dans la plupart des endroits, il s’agissait de manifestations organisées par la base, ce qui a également exprimé l’insatisfaction générale ressentie contre la direction prise par la société et en opposition à la politique dominante. Cela a causé une crise parmi les néonazis eux-mêmes, le SvP critiquant le Smr pour l’attaque. Quelques défections s’en sont suivies.

Ces événements ont également ébranlé les médias dominants et les politiciens de droite. Après la manifestation de masse du 22 décembre, un journaliste de premier plan du journal Expressen s’en est ainsi pris à la manif concernant ses discours et artistes – clairement marqués à gauche – et a notamment souligné la présence d’un membre de Rättvisepartiet Socialisterna (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Suède et parti-frère du PSL) en tant qu’orateur et représentant de la plateforme organisatrice de la manifestation.

L’establishment craint comme la peste le développement de tout mouvement indépendant contrôlé par la base. Pour l’élite dominante, c’est à la police de contrer le nazisme et le racisme, à personne d’autre. Parallèlement, elle saute sur toutes les occasions qui se présentent pour placer sur un pied d’égalité l’extrémisme de droite (ils évitent en général le terme « nazis ») et « l’extrémisme de gauche », alors que les néonazis suédois ont assassiné pas moins de 30 personnes en Suède depuis le milieu des années 1980 !

Suite à l’attaque de décembre, la pression de la base avait repoussé les tentatives visant à accuser « les deux camps ». Après la récente tentative de meurtre à Malmö, cependant, les médias et la police ont à nouveau décrit les attaques comme des « troubles » et de la « violence politique » entre militants de gauche et de droite, même si les faits démontrent clairement que les néonazis étaient à la recherche de victimes à attaquer. Le quotidien « Dagens Nyheter » a écrit dans un éditorial : « la violence politique dans une démocratie est toujours un tort. La ligne de démarcation n’est pas entre la droite et la gauche mais entre ceux qui prônent la violence et ceux qui veulent changer la société par des moyens démocratiques ». Cet éditorial réduit la violence nazie à « de la violence politique.»

Les politiciens établis condamnent les mobilisations antiracistes, mais ils ne peuvent pas suggérer d’alternative. Comme le remarque l’auteure et journaliste de gauche Asa Linderborg : « Si la gauche n’organise pas de manifestations, qui va le faire ? »

Après la tentative de meurtre à Malmö, des manifestations ont immédiatement été organisées. A Malmö, 2000 personnes sont sorties en rue le lendemain et un nombre équivalent à Stockholm. Il était aussi clair que plus de personnes entreraient en action et plus ils verraient un lien évident entre la politique de droite néo-libérale et la montée de la violence nazie.

L’approche socialiste bénéficie d’un bon écho

Les réactions ont été vives suite à la prise de parole d’Ammar Khorshed – de Rättvisepartiet Socialisterna (CIO-Suède) – lors de la manifestation tenue à Stockholm le 9 mars. Son discours avait abordé la façon dont les politiques de droite et l’impérialisme sont directement responsables de la montée du racisme et du néofascisme en Suède et en Europe. « Les nazis ne sont pas nombreux, mais l’attaque de la nuit dernière à Malmö, l’attaque à Kärrtorp et d’autres exemples suggèrent qu’ils se sentent plus forts et passent de plus en plus du discours à l’action. Malheureusement, le racisme se renforce : criminalisation et stigmatisation des réfugiés par le gouvernement, agitation raciste des Démocrates Suédois contre les musulmans et immigrés, actes de violence et meurtres par les nazis organisés, etc.

« Les néonazis n’agissent pas dans le vide. La politique néo-libérale du gouvernement approfondit les inégalités dans la société, ouvrant les portes aux Démocrates Suédois. Et les succès électoraux des Démocrates Suédois ouvrent les portes aux nazis pour passer aux attaques physiques.

« Il y a une forte connexion internationale », continue-t-il. « Les nazis s’inspirent aussi d’autres pays d’Europe. Ce n’est pas une coïncidence si la Grèce, le pays où les politiques de la droite détruit le plus les vies des gens, est aussi le pays où le parti néonazi Aube Dorée obtient environ 10% des suffrages.

« En Ukraine, le parti d’extrême-droite Svoboda fait partie du nouveau gouvernement ukrainien, soutenu par Carl Bildt [l’ancien ministre des affaires étrangères suédois, NDT], l’UE et les USA. Svoboda est le parti-frère de du Parti des Suèdois, une organisation néonazie à laquelle appartiennent les responsables de l’attaque de la nuit dernière. »

L’un des agresseurs, Andreas Carlsson du SvP, revenait d’une visite en Ukraine. Il s’y est inspiré de la façon dont les néonazis ont gagné du terrain dans la rue, jusqu’à entrer dans le gouvernement ukrainien. Ces leçons ont été mises en pratique à Malmö.

Les mobilisations antiracistes et la volonté d’agir de dizaines de milliers de personnes montrent que la montée du racisme et du fascisme n’est pas inévitable. Ce qu’il faut maintenant, c’est un mouvement qui continue et organise dans les écoles, les lieux de travail et les quartiers, liant la lutte directe antifasciste au combat contre la politique de droite et pour des conditions de vie décentes pour tous.

L’organisation antifasciste et antiraciste lancée par Rattvisepartiet Socialisterma « Etudiants contre le racisme » a pu obtenir une attention considérable pour sa manifestation de 200 jeunes à Stockholm devant une école où des croix gammées et les slogans nazis ont été tagués. A Eskilstuna, des étudiants ont empêché l’organisation raciste Démocrates Suédois d’entrer dans une école.

Les syndicats ont exprimé leur solidarité avec les manifestants gravement blessés après l’attaque de Malmö. Ceux qui connaissent Showan affirment que ce n’est nullement une coïncidence si les néonazis l’ont attaqué lorsqu’ils l’ont vu. Il avait auparavant été mis au pilori sur un site internet néonazi en raison de son engagement antiraciste. Showan est connu pour avoir lancé les « supporters de foot contre l’homophobie » parmi les supporters de Malmö. Il est toujours à l’hôpital, son état s’est stabilisé et il montre des signes de rétablissement.

Ce weekend, de nouvelles grandes manifestations contre le racisme étaient prévues dans tout le pays.

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