Les dockers remportent d’importantes victoires au Portugal et au Chili

Longue vie à l’internationalisme de la classe ouvrière ! Un exemple pour les autres secteurs. 

Danny Byrne, CWI

Dans un contexte où les partons et les gouvernements infligent aux travailleurs du monde entier leur agenda de « choc et effroi », attaque antisociale après attaque antisociale, toute victoire considérable obtenue par le mouvement ouvrier international doit être criée sur tous les toits. C’est le cas des dockers qui, ces dernières semaines, ont remporté d’importantes victoires dans des conflits-clé au Portugal et au Chili. Ils en sont revenus aux méthodes militantes testées et éprouvées par le mouvement ouvrier : une lutte conséquente et durable avec l’organisation de la solidarité internationale au-delà des frontières,  notamment avec des gréves de solidarité.

Portugal: victoire éclatante après 2 ans de lutte

Ces exemples montrent que malgré le rôle pernicieux des directions syndicales de droite dans la plupart des pays, qui agissent comme un véritable frein pour la lutte, la classe ouvrière peut encore effectuer des pas en avant quand elle est organisée sur base de méthodes militantes. Ils montrent aussi comment, malgré la domination du syndicalisme de négociation et de conciliation et de la quasi-passivité des dirigeants syndicaux devant les attaques patronales, les fières traditions militantes de notre classes ne se sont pas du tout éteintes.

Au Portugal, les travailleurs et les jeunes ont fait face à l’austérité de la Troïka depuis des années et ont courageusement résisté, y compris au cours de quatre grèves générales. Cependant, la direction du mouvement syndical au niveau national a échoué à unir ces luttes dans un plan d’action militant durable pour vaincre les attaques de la Troïka et du gouvernement, permettant aux mobilisations d’une journée isolées de se perdre dans de longues périodes de démobilisation.

Les dockers, en rompant avec cette approche et en s’engageant dans un combat militant de deux ans, ont présenté une voie alternative à l’ensemble du mouvement : celle de l’action durable et déterminée qui peut obtenir des résultats. Ils faisaient face à un plan destiné à transformer le port de Lisbonne en un repaire du travail précaire, dans le cadre du programme de privatisations imposé par la Troïka et appliqué par le gouvernement. Les patrons avaient établi une compagnie de recrutement parallèle chargée d’employer du personnel sur des bases précaires avec une un tiers de salaire en moins, afin de mettre un terme aux conditions de travail décentes dans le port.

La riposte des travailleurs a été faite de deux années de grève militante et de « grève du zèle ». Ils ont héroïquement fait face à la répression, 47 travailleurs ont été licenciés en raison de leur rôle dans la grève. Leur victoire a été éclatante. Non seulement ils ont obtenu la ré-embauche des 47 camarades licenciés, mais aussi la fin des contrats précaires et un nouvel accord de négociation collective qui va inclure les travailleurs initialement embauchés comme précaires. Cette victoire lance une clé à molette dans les projets de la classe capitaliste visant à rendre de plus en plus précaires les conditions de travail de toute la classe ouvrière portugaise.

Ce conflit a été exemplaire en termes de militantisme mais aussi de par la démocratie ouvrière instaurée par le syndicat, les décisions importantes étant discutées et décidées dans des assemblées générales de travailleurs. Comme le commente Francisco Raposo, militant de la CGTP et membre de Socialismo Revolucionario (section du Comité pour une Internationale Ouvrière au Portugal) : « Cette lutte était vraiment une percée dans la lutte des classes au Portugal. Le syndicat des dockers n’est pas affilié à la CGTP, la principale centrale syndicale. Cependant les méthodes et le militantisme des dockers provoquent une réaction dans certaines couches de la CGTP. »

Chili : La grève des dockers locaux s’étend et obtient des victoires nationales

Au Chili en janvier, quand les dockers de Mejillones se sont mis en grève seuls pour des revendications salariales et contre les pratiques anti-syndicales (leur deuxième grève en un an) certains ont condamné cette lutte à l’isolement et à l’échec. Cependant, quand la police a attaqué le camp des grévistes qui abritait aussi leurs femmes et enfants, blessant un travailleur, le vent a tourné.

Cette grève était également importante parce qu’elle défiait non seulement le patronat portuaire, mais aussi le Code du Travail draconien du pays, hérité de la dictature de Pinochet. Sous ces lois, les patrons refusent de négocier collectivement avec les travailleurs, insistant pour diviser ceux qui ont des contrats fixes et les travailleurs temporaires (qui représentent 80% des dockers).

Les travailleurs ont refusé cette imposition anti-démocratique et ont intensifié leur action. Les travailleurs de 9 ports de tout le pays ont rejoint la grève, amenant leurs propres revendications (contre la répression anti-syndicale et le non-paiement des salaires dans la plupart des cas). A nouveau, cela est très significatif puisque ce même Code du Travail de Pinochet interdit les grèves de solidarité !

Après un mois de grève, les dockers ont obtenu au niveau national la grande majorité de leurs revendications, dont le droit de négocier collectivement. Werken Rojo, le nouveau journal de Socialismo Revolucionario (section du CIO au Chili) explique : « ce conflit aura de grandes implications sur toute la classe ouvrière du Chili. Tout d’abord, il montre que l’action déterminée, la solidarité, qui suppriment la camisole de force du Code du Travail, peuvent permettre aux travailleurs de gagner ».

Leur victoire, comme celle des dockers portugais, reflète aussi le grand pouvoir économique dont jouissent les dockers (mais aussi les travailleurs de beaucoup d’autres secteurs) étant donné le « tournant vers l’exportation » du capitalisme dans beaucoup de pays, en particulier ceux du Sud de l’Europe. Au Chili, la presse capitaliste a fait état de pertes de plusieurs millions de dollars pour les compagnies exportatrices en raison de la grève, en particulier en ce qui concerne l’export de marchandises périssables.

Longue vie à la solidarité internationale en action !

De plus, ces deux victoires montrent un autre élément, crucial pour le mouvement ouvrier mondial – celui de l’action de solidarité internationale. Deux journées d’action internationale ont été organisées en soutien aux dockers portugais ; la dernière a compté des actions de solidarité et des grèves en Suède, en France, aux USA et dans d’autres pays. Au Chili, en même temps que de se propager à tout le pays, la lutte des dockers a reçu un soutient actif crucial des dockers de toute l’Amérique Latine et au-delà, avec des ports argentins bloquant les marchandises chiliennes et des menaces d’actions de ce type dans des ports européens et états-uniens dans les jours précédant la victoire.

Le CIO a souvent souligné la nécessité pour le mouvement ouvrier mondial de coordonner l’action au-delà des frontières, en mobilisant le pouvoir international de la classe ouvrière dans une économie mondiale de plus en plus interconnectée. Ce besoin est particulièrement criant en Europe, où la Troika et les gouvernements capitalistes infligent une offensive de misère coordonnée aux travailleurs sur tout le continent, en particulier dans le Sud, ce qui pose la nécessité d’une résistance coordonnée internationalement, y compris par des grèves internationales. Nous appelons le mouvement syndical mondial à suivre le brillant exemple des dockers portugais et chiliens qui ont montré que ces méthodes donnent des résultats.

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