Capitalisme
Selon Verhofstadt l’économie belge est en excellente forme. La Banque Nationale prédit une croissance de 2,5% cette année, ce qui, en Belgique, devrait être suffisant pour accroître légèrement le taux d’emploi.
La Banque Nationale, comme la plupart des économistes bourgeois, fonde ses prévisions sur base d’un pifomètre plutôt que sur une réelle méthode. Ces derniers mois, on a pu constater au niveau international, une instabilité croissante et une évolution des Bourses en " yoyo ". Début juin, la Bourse belge a perdu tous les profits de cette année. Avec une telle instabilité internationale, les prévisions de la Banque Nationale ou du gouvernement concernant la croissance en Belgique s’apparentent à ce qu’on peut déduire à la lecture du marc de café.
Un passé fait de "croissance sans emploi"?
Depuis la crise aux Etats-Unis en 2001, l’économie belge connaît une relance très faible. Entre 2001 et 2005, la croissance belge a été de 1,5% en moyenne, le type de maigre croissance qui s’accompagne de pertes d’emplois. La productivité (produire plus avec le même nombre de travailleurs par l’utilisation de machines plus performantes ou en augmentant l’exploitation) s’élève en moyenne de 1 à 1,5% par an en Belgique.
La réalité c’est qu’après des années de ce "redressement" économique, notre économie est déjà menacée par un nouveau déclin de la croissance mondiale. De ce "redressement", on s’oriente vers un essoufflement de la croissance ou une récession (quand l’économie régresse plutôt que de se développer).
Des années de croissance… artificielle
Partout à travers le monde, les gouvernements capitalistes ont mené après 2001 une politique de crédit à bas prix pour maintenir l’économie la tête hors de l’eau. En Belgique également, beaucoup de familles en ont profité pour entamer la construction d’une maison à l’aide d’un emprunt à bas taux d’intérêt. L’accumulation de dettes dans les ménages combinée à l’amnistie fiscale -qui a surtout profité à une petite couche de gens aisés !- et, plus récemment encore, aux effets des diminutions d’impôts ont soutenu la consommation belge pendant une certaine période.
La tendance à la constitution de dettes est visible de façon très aigüe dans l’économie la plus importante au monde: celle des Etats-Unis. Depuis 2001, 80% des travailleurs américiains ont connu une diminution salariale. Cependant, beaucoup de gens ont continué de s’endetter dans l’euphorie du crédit bon marché et de la bonne santé de l’immobilier qui en découlait. Cette bulle financière ne pouvait enfler éternellement.
La Federal Reserve (banque centrale américaine) a commencé à relever les taux d’intérêt, les emprunts sont donc devenus moins bon marché. Aujourd’hui, la plupart des travailleurs ne voient toujours pas leurs salaires augmenter, mais ils sentent bien que le prix de l’essence s’envole et que – surtout – la bulle du marché immobilier commence à éclater.
Selon l’Association Nationale des Constructeurs de Maisons aux Etats-Unis, la confiance du secteur a été en juin la plus basse en 11 années. Le nombre de demandes de construction de nouvelles habitations a baissé en mai de 8,5% sur base annuelle. "La tendance (sur le marché immobilier) est fortement à la baisse", selon certains économistes. Cela menace de saper les fondements de la consommation aux Etats-Unis, qui est dans une grande mesure le moteur de l’économie mondiale…
Des déséquilibres intenables dans l’économie mondiale
Les récents mouvements boursiers ont été une réaction à l’inflation (augmentation des prix) plus forte, provoquée par l’augmentation du prix des matières premières, et à la croissance plus faible qu’espéré aux Etats-Unis. On a ainsi assisté à un mouvement des grands fonds de placement d’actions risquées et surévaluées vers des placements plus sûrs.
Cette place plus grande de la spéculation financière dans l’économie est une expression du déclin du capitalisme qui, à cause de sa tendance à la surproduction, investit moins dans la production réelle. Les profits des institutions uniquement financières ont grimpé aux Etats-Unis de 10 à 15% dans les années ’50 et ’60 et de 30 à 40% aujourd’hui.
Si une inflation croissante doit être combattue avec de plus hauts taux d’intérêt, cela menace au niveau mondial d’en finir avec le régime d’intérêt à bon marché. L’inflation – et l’arme du pétrole aux mains de pays comme l’Iran ou le Vénézuéla – menace de se combiner à la stagnation économique, ce que l’on appelle la stagflation.
La Federal Reserve pourrait aussi être forcée de faire monter les taux d’intérêt pour continuer d’attirer de l’argent de l’extérieur avec la vente d’obligations d’Etat, effort supplémentaire pour soutenir un dollar qui pourrait glisser très rapidement.
Des riches plus riches et des pauvres plus pauvres
La politique néolibérale a fait en sorte que la plupart des travailleurs soient confrontés à un pouvoir d’achat qui stagne ou diminue, pendant que les patrons s’approprient des profits et une richesse jamais vue jusqu’alors, avec par exemple l’augmentation de la productivité aux Etats-Unis.
Entre 1995 et 2005 la productivité moyenne par heure prestée d’un travailleur aux Etats-Unis a augmenté de 30%. Cette exploitation plus intensive était entre autres une conséquence de l’enjeu des nouvelles technologies et des nouvelles techniques de gestion de personnel.
Entre 2001 et 2006 les profits aux Etats-Unis ont plus que doublé: une croissance de 123%, du jamais vu depuis la seconde guerre mondiale. Sur le même laps de temps, la partie des profits dans le revenu national a augmenté de 7% du revenu mondial vers 12,2%, une croissance inconnue depuis la période de l’après-guerre.
Alors que dans les années ’70 un patron aux Etats-Unis gagnait en moyenne 30 fois plus que le salaire moyen d’un travailleur, il s’agit aujourd’hui d’un rapport de 1 à 300 ! Le capitalisme va inévitablement recréer une conscience de classe et provoquer d’intenses luttes des masses opprimées contre leurs exploiteurs. Durant les 10 à 15 années à venir, on peut s’attendre à des chocs violents dans ce système, des chocs probablement déterminants pour la survie même du système ou de la planète.