Rafle monstre de l’armée israélienne

Le 25 juin, un commando palestinien attaquait un poste militaire israélien, tuant 2 soldats et en capturant un troisième, le caporal Gilad Chalit. Le commando exige la libération de prisonniers palestiniens en échange du caporal. Le gouvernement israélien y a répliqué le 28 juin par une offensive de grande ampleur dans la Bande de Gaza qui s’est déjà soldée par la mort d’une vingtaine de Palestiniens et d’un soldat israélien. Le lendemain, l’armée israélienne arrêtait 64 responsables politiques (des ministres, des parlementaires, des maires) du Hamas, le parti qui forme le gouvernement palestinien.

Thierry Pierret

Le gouvernement israélien justifie son offensive par la nécessité de libérer le caporal Chalit et de faire cesser les tirs de roquettes incessants depuis la Bande de Gaza. Il est déterminé à faire juger les responsables du Hamas arrêtés pour avoir planifié des actes terroristes ou, à défaut, pour « appartenance à une organisation terroriste ». Pourtant, le Hamas avait posé des gestes d’apaisement après sa victoire électorale de janvier. Il avait maintenu la trêve dans les actions armées contre Israël. Mais le gouvernement israélien a pris prétexte du refus du Hamas de reconnaître explicitement Israël pour refuser de traiter avec le nouveau gouvernement palestinien issu de ses rangs.

Pire, Israël, soutenu en cela par l’Union européenne et les Etats-Unis, a pris des sanctions contre l’Autorité palestinienne en refusant de lui reverser la part des recettes douanières qui lui revient (Israël et les Territoires occupés forment une seule unité douanière). Cela a perturbé le payement des fonctionnaires palestiniens et compromis le financement de toute une série de programmes d’aide à la population palestinienne. Israël a tenté de contourner le nouveau gouvernement élu en ne traitant qu’avec le Président de l’AP, Mahmoud Abbas, malgré le discrédit total jeté sur son parti, le Fatah.

L’attitude du gouvernement israélien a eu un double effet désastreux : d’une part, elle a incité les différents groupes armés palestiniens (du Fatah comme du Hamas) à rompre la trêve implicite avec Israël. D’où la reprise des tirs de roquettes à l’aveuglette contre les villes du sud d’Israël et des attaques contre les soldats et les colons. D’autre part, elle a conduit à une quasi-guerre civile entre le Hamas et le Fatah. En effet, des prisonniers palestiniens de toutes obédiences (y compris du Hamas donc) avaient rédigé une plate-forme qui demande la création d’un Etat palestinien dans les frontières de 1967, ce qui équivaut à reconnaître implicitement Israël. Mais le Hamas a refusé de se rallier à ce texte tant que des progrès substantiels n’auraient pas été enregistrés dans les négociations avec Israël. Mahmoud Abbas a tenté de contourner le gouvernement palestinien en soumettant ce texte à référendum. D’où une situation de tension extrême entre le Hamas et le Fatah qui s’est soldée par de nombreux actes de violence de part et d’autre. Finalement, le Hamas s’est rallié au texte à la fin du mois de juin pour éviter le référendum prévu en juillet.

Si le gouvernement israélien d’Ehoud Olmert était vraiment épris de paix comme il le prétend, il aurait saisi cette opportunité pour cesser son boycottage du gouvernement palestinien élu, lever les sanctions et aller de l’avant pour arriver à une solution négociée du conflit. Même si nous pensons que des négociations entre la coalition d’Olmert et le gouvernement Hamas d’Ismaël Hanye se seraient soldées à terme par un échec (les politiciens israéliens et palestiniens actuellement au pouvoir ne sont pas disposés à créer les conditions matérielles de la paix en résolvant les problèmes sociaux aigus qui se posent de part et d’autre de la « ligne verte »), cela aurait au moins créé temporairement un climat plus propice au développement de liens de solidarité entre travailleurs israéliens et palestiniens, voire à la diffusion des idées socialistes au sein du mouvement ouvrier des deux pays.

Hypocrisie israélienne

Mais le gouvernement d’Olmert ne veut pas d’une solution négociée avec quelque gouvernement palestinien que ce soit. Sa politique est d’imposer une solution unilatérale au conflit (notamment la fixation des frontières) sous prétexte qu’il n’y a pas d’interlocuteurs valables en face. Hier, ils boycottaient le « terroriste Yasser Arafat » issu du Fatah, aujourd’hui ils boycottent le « gouvernement terroriste » issu du Hamas en feignant de regretter le Fatah qu’ils ne traitaient pourtant pas avec plus d’égards lorsqu’il dirigeait l’Autorité palestinienne. Il est frappant que l’offensive israélienne actuelle intervient quasiment au lendemain du ralliement du Hamas à la plate-forme des prisonniers.

L’enlèvement du caporal Chalit en a fourni le prétexte. Des membres du gouvernement israélien se disent en faveur de la plate-forme des prisonniers. Mais ils ne peuvent ignorer que l’arrestation de dizaines de responsables du Hamas est une énorme provocation qui lui donne un prétexte en or pour prendre ses distances par rapport à ce texte. Quelle hypocrisie ! L’offensive israélienne réduit ainsi à néant tous les efforts d’Abbas pour infléchir la position du Hamas. Ehoud Olmert est bien le digne successeur d’Ariel Sharon dont la politique de retrait unilatéral de certains territoires palestiniens ne devait rien à une transformation subite du faucon en colombe, mais obéissait à des considérations purement tactiques. On en voit aujourd’hui les conséquences…

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