Bruxelles : Une région marquée par les pénuries et les inégalités (1)

Cette semaine, une grande attention sera portée à la situation politique et sociale de la capitale, sur base du texte de perspectives élaboré pour le Congrès régional des sections bruxelloises du PSL qui s’est tenu fin novembre dernier. Ce texte sera publié cette semaine en 5 parties. Nous commençons ici avec la croissance démographique de la capitale et ses conséquences sur le logement.

Introduction

Le congrès de district est l’occasion pour les membres du parti de se concentrer sur les discussions autour des perspectives locales. Quels sont les plans d’assainissements aux différents niveaux de pouvoir ? Quelles sont les effets sur la population et les réactions ? Cet approfondissement doit en définitive nous permettre d’être parés à intervenir. En plus de nos secteurs d’intervention traditionnels, nous avons acquis une nouvelle expérience ces deux dernières années : le terrain communal, à Ixelles et surtout à Saint-Gilles. Les textes de congrès permettent également de collectiviser cette expérience, pour affiner nos futures interventions.

Le 7 mai 2013, Charles Picqué (PS) a démissionné de son mandat de président du gouvernement de la région bruxelloise, laissant par la même occasion la place à Rudy Vervoort (PS), bourgmestre de la commune d’Evere. Celui qui présida la région bruxelloise durant 20 ans (1989-1999 ; 2004-2013) laisse en héritage une véritable « fracture sociale », conséquence de deux décennies de politiques néolibérales. Avec ce texte, nous voulons rentrer dans le détail de cet héritage et des politiques qui en sont la cause.

Y a-t-il un problème démographique à Bruxelles ?

Ces dernières années, les médias n’ont cessé de parler du « boom démographique » comme étant la cause de tous les maux à Bruxelles. La population bruxelloise augmente actuellement de 20.000 personnes en moyenne chaque année (soit une croissance d’un peu moins de 2%), du fait d’un solde migratoire positif pour les 15-30 ans et d’un taux de natalité plus important que les décès, reflétant ainsi le rajeunissement de la population. Aujourd’hui, après une croissance démographique de 9,8% entre 2006 et 2011, la région bruxelloise compte 1,140 million d’habitants, soit le même niveau de population que durant les années ’70. Cette croissance est nettement plus marquée dans les quartiers les plus pauvres (16% à Saint-Josse, 15% à Molenbeek, 13% à Berchem et Bruxelles et 12% à Anderlecht et Schaerbeek) que dans les plus riches (3% à Uccle et Woluwé Saint-Pierre, 0,8% à Watermael-Boitsfort). Saint-Gilles a connu elle une croissance légèrement inférieure à la moyenne régionale à 9,4%.

D’ici 2020, on estime qu’il y aura environ 140.000 personnes de plus en région bruxelloise, nécessitant 80.000 logements supplémentaires. A l’heure actuelle, il n’y a que 4.000 nouveaux logements par an, en incluant les réhabilitations, ce qui est donc loin de répondre aux besoins. Parmi ces nouveaux logements, deux tiers sont mis sur le marché par le privé et seulement 2,5% sont du logement social. A ce rythme, le soi-disant objectif de Christos Doulkeridis (secrétaire d’Etat bruxellois en charge du logement, Ecolo) d’atteindre 15% de logement « à finalité sociale » à Bruxelles pour 2020 semble bien illusoire.

Selon le dernier rapport annuel de l’agence immobilière bruxelloise Trevi, « si l’offre persiste à être aussi inférieure aux besoins, une pénurie va se consolider à Bruxelles, maintenant à la hausse les prix de logements et les loyers ». Cela signifie que si le gouvernement régional laisse encore se développer la pénurie, les promoteurs et autres investisseurs privés n’hésiteront pas à faire encore plus de profit là-dessus. A l’inverse, une politique de construction massive de logements sociaux publics permettrait non seulement de répondre aux besoins mais aussi d’endiguer l’augmentation des prix en réalisant une pression à la baisse sur le marché du logement privé.

Les Bruxellois payent au prix fort les pénuries de logement

A la place de cela, les appartements, qui représentent 90% des 550.000 logements à Bruxelles, sont vus par les détenteurs de capitaux comme un investissement rentable puisque les loyers ont augmenté en moyenne de 45% depuis 2002. Cette tendance est également illustrée par le faible taux d’occupation de leur logement par les propriétaires, qui n’est que de 40%, alors qu’en Wallonie et en Flandre ce taux est d’environ 70%.

Cette situation se reflète également dans l’augmentation du prix moyen des appartements depuis 2002 : +122,3% pour l’ensemble de la région, ce qui est supérieur à l’augmentation des prix dans le reste de la Belgique. En particulier, cette augmentation est de +134,9% à Saint-Gilles, +137,1% à Ixelles et +168,1% à Saint-Josse. Cela n’est pas très étonnant lorsque l’on compare l’évolution de la population de ces communes avec l’évolution du nombre de logements durant ces dix dernières années. A Saint-Gilles par exemple, pendant que la population a augmenté de 14% en dix ans, le nombre de logements n’a augmenté que de 3%. Le prix moyen d’un appartement en région bruxelloise est estimé aujourd’hui à 224.547 €, soit l’équivalent d’une villa en province de Liège, Namur, Hainaut ou Luxembourg. Quant aux maisons, la tendance est similaire : l’augmentation sur la même période est de +191,3% pour l’ensemble de la région (+330,9% à Ixelles !), alors que l’augmentation des prix sur l’ensemble de la Belgique est de +118,1%.

Pourtant, selon Doulkeridis, le prix et le manque de logements à Bruxelles sont des faux problèmes et il existerait toute une série de solutions : construction, réhabilitation de logements et bureaux vides, rénovations… Et surtout le développement de « l’habitat groupé », au sein duquel plusieurs générations d’une même famille vivraient sous le même toit. Parmi les pistes proposées, les logements sociaux n’y figurent pas vraiment, au mieux il s’agit de solutions hybrides en partenariat avec le privé dites « conventionnées », quand le rôle des pouvoirs publics n’est pas limité à « soutenir à de bonnes conditions le privé ». La tendance est de ne parler systématiquement que de logements publics et non plus de logements sociaux. Ainsi le PS promet 350 nouveaux logements publics et 150 logements « conventionnés » à Saint-Gilles dans son programme électoral de 2012, mais aucun logement social !

Les autorités communales de Saint-Gilles se félicitent de disposer de la deuxième plus importante régie foncière du pays après Bruxelles-Villes, disposant de plus de 800 logements (170 en plus sur la dernière législature communale). Après les élections de 2006, il a été demandé aux communes et CPAS de fixer un plafond pour les conditions d’octroi de ces logements. Seules les communes d’Anderlecht, Evere, Molenbeek et Schaerbeek ont fixé un plafond destiné à un public à bas revenu mais toujours au-dessus des conditions d’accès à un logement social. Les autres communes fixent également des plafonds de revenus mais à des montants bien plus élevés, c’est notamment le cas de la commune de Saint-Gilles qui fixe un plafond de revenus annuels imposables à 40.000 € (isolé) ou 70.000 € (ménage).

L’effet de cette condition de revenus maximums aboutit quasiment à ne pas fixer de limite, quand on sait que 92% de la population bruxelloise déclarait en 2007 des revenus inférieurs à 50.000 €. En conséquence, les loyers de ces logements suivent les prix du marché privé. Ils appellent cette régie le « bras armé » de la commune en matière d’urbanisme. Dans les faits, cette régie achète les bâtiments peu entretenus dans les quartiers pauvres, les rénove et les remet sur le marché locatif vers des couches à plus hauts revenus.

En tout cas, Doulkeridis n’a jamais été capable d’expliquer comment il était concrètement possible d’arriver à 15% de « logement public à finalité sociale » pour 2020. S’agissait-il d’une promesse électorale malhonnête de la part d’Ecolo ? Par « logements publics à finalité sociale», on considère essentiellement les logements sociaux, les logements « assimilés à du logement social », dont le plafond de revenus est supérieur de 20%, et le logement public pour lequel une allocation-loyer est accordée. Cette allocation est octroyée par la région au locataire de logement public qui se trouve dans les conditions d’octroi d’un logement social1. Cette dernière invention de Doulkeridis lancée en grande pompe en 2008 est un véritable flop. Initialement, 2 millions € étaient prévus au budget de la Région. Lors des deux premières années, seuls 30.000 € avaient été utilisés. Depuis, le montant budgétisé a été revu à la baisse à 266.000 €.

Comment expliquer cela ? Les communes ne souhaitent pas octroyer les logements publics aux bas revenus et font par conséquent leur possible pour éviter d’accorder les aides dues. À Ixelles par exemple, pour une partie du parc, les revenus du ménage doivent atteindre des plafonds minimums. A Saint-Gilles les conditions d’accès au logement public stipulent que le loyer ne doit pas dépasser les 40% des revenus du ménage. Selon les différents règlements communaux, ce chiffre varie entre 33% et 50%. Or, une famille bruxelloise consacre en moyenne plus de 30% de son revenu au logement. Pour les plus bas revenus cela dépasse souvent les 50%. Dès lors ces conditions permettent d’éviter les « mauvais payeurs » et d’assurer la rentabilité de la location, en excluant les plus bas revenus.

Finalement, ces politiques signifient que le marché public ne vise pas à résoudre les problèmes sociaux des habitants mais au contraire vise de plus en plus à les remplacer par d’autres habitants disposant d’un revenu plus important. Dans ce contexte, le logement social est clairement mis sur une voie de garage par le gouvernement bruxellois, et ce alors que le parc en logement social ne permet même pas de répondre à 50% de la demande officielle. Environ 39.000 logements sociaux étaient dénombrés en mai 2013 (à peine 440 de plus qu’il y a 10 ans !), soit l’équivalent de 8% seulement de l’ensemble des logements. La liste d’attente quant à elle dépasse les 41.000 personnes. Cette liste d’attente est telle qu’elle ne représente même plus le besoin réel, beaucoup de ménages abandonnant l’idée d’introduire une demande, celle-ci n’étant au mieux rencontrée que dans une dizaine d’années pour les plus chanceux. Selon un dossier du Soir « SOS Bruxelles », plus de 50% des ménages bruxellois rentrent dans les conditions d’accès à un logement social.

Pas de logement pour les plus pauvres, mais de beaux projets pour les plus aisés

Il y a une volonté claire du gouvernement de maintenir une pénurie, pour mieux attirer les promoteurs et investisseurs privés en charge alors de réaliser un processus de gentrification dans les communes, comme dans les autres grandes villes de Belgique. Avec ce processus, les communes tentent d’attirer la classe moyenne, aux revenus plus élevés, dans des quartiers modestes de sorte à augmenter les revenus fiscaux. L’argent public est alors dépensé pour développer l’attractivité plutôt que dans le bien-être des habitants. Sous prétexte d’organiser une mixité sociale, il s’agit en réalité d’évacuer les plus pauvres à la place de traiter la pauvreté en soi. Dans ce contexte, construire des logements sociaux serait non seulement non-productif mais surtout cela engendrerait le risque pour les communes d’attirer les pauvres que les autres chassent.

Dans un entretien au Soir sur les enjeux de l’immobilier bruxellois en juin dernier, le nouveau directeur de la Société de Développement pour la Région de Bruxelles (SDRB, institution publique pararégionale en charge de l’immobilier), Benjamin Cadranel (PS, jusque-là directeur du cabinet de Picqué depuis 2007), prenait la position suivante : « A Bruxelles, la population précarisée est captive au cœur de la ville, or la population qu’il faut convaincre de rester ou revenir au centre de Bruxelles c’est la classe moyenne ». Il précise ainsi que cela nécessite « d’éviter de concentrer dans le noyau urbain un nombre excessif d’allocataires sociaux », s’accordant sur ce point avec l’échevin de l’urbanisme de la Ville de Bruxelles, Geoffroy Coomans de Brachène (MR). Un nombre « excessif » étant probablement pour eux ce qui correspond à plus de 2,5% de logements sociaux.

Cette politique a été poussée à son paroxysme notamment dans certains quartiers huppés à Ixelles, où les majorités communales ne cessent de faire la cour aux exilés fiscaux qui chercheraient à profiter du paradis pour les riches qu’est la Belgique. La manifestation de la FGTB du 14 septembre dernier pour plus de justice sociale et de pouvoir d’achat avait pris son départ symboliquement à la place Brugmann à Ixelles pour dénoncer cette différence de traitement accordé aux riches par les différents niveaux de pouvoir en Belgique.

Mais c’est aussi dans les quartiers les plus précaires du croissant pauvre que prennent place les projets d’embellissement. Cela est d’autant plus choquant quand, dans ces quartiers, il est mis en avant qu’aucun moyen n’est disponible pour les besoins sociaux. La tour UpSite, qui sera construite en 2014 le long du canal dans le quartier de Tour & Taxis, en est un bon exemple. Cette tour, qui sera la plus haute tour à logements de Bruxelles, comportera des commerces ainsi que 106 appartements qui seront vendus à un prix de 3.500 €/m². Avec la tour UpSite, le gouvernement bruxellois tente de réaliser son vieux fantasme d’attirer les classes moyennes dans les quartiers autour du canal pour les transformer en quartiers résidentiels huppés, sur les modèles d’Amsterdam ou Paris, et en chasser la pauvreté qui s’y est concentrée à la suite de la désindustrialisation. Les bureaux et logements vides ? Offerts aux promoteurs pour encore plus de beaux projets !

Pour la première fois en 2012, le gouvernement bruxellois s’est attaqué aux bureaux vides pour les convertir en nouveaux logements. Christos Doulkeridis et Charles Picqué ont ainsi choisi huit projets « emblématiques », en accordant pour chacun de ces projets une prime de 30 €/m² aux promoteurs. En juin 2012, la région a délivré le premier permis de reconversion de bureaux en logements à Cofinimmo pour l’immeuble « Livingstone » dans le quartier européen. Les travaux devraient se terminer en décembre 2014 pour y installer notamment 122 appartements haut de gamme. Ces appartements seront vendus à 3.500 €/m², et sont ouvertement destinés aux hauts fonctionnaires européens.

Le soin de la réhabilitation des bureaux vides est volontairement laissé aux promoteurs par la région, toujours dans le même objectif d’embellissement des quartiers et de construction de logements pour la classe moyenne. Pourtant, la « loi Onkelinx » datant de 1993 permet la réquisition des logements vides (il y en aurait 15.000 à 30.000 à Bruxelles) par les autorités publiques pour les mettre à disposition des sans-abris. Dans le contexte actuel, ce raisonnement pourrait très bien être étendu aux bâtiments dans lesquels se retrouvent les quelques 1,6 millions m² de bureaux vides de la région (2,5 millions m² si l’on compte la périphérie), ce qui permettrait d’offrir un logement accessible à des couches plus larges que les seuls sans-abris. A la place de cela, la région offre l’opportunité aux promoteurs de faire leur beurre là-dessus. A nouveau, c’est un choix politique qui n’a rien de démographique.

Jean-Edouard Carbonnelle, le patron de la plus grande société immobilière de Belgique Cofinimmo dont l’activité est centrée à Bruxelles, a bien perçu la nouvelle poule aux œufs d’or que lui a offert le gouvernement Picqué IV. Lors de sa prise de fonction en avril 2012, il explique la réorientation de l’activité immobilière de son groupe, jusque-là concentrée sur l’immobilier de bureau. « A Bruxelles, depuis le milieu des années 2000, l’offre de bureaux est devenue trop importante. Parallèlement, Bruxelles est soumise à une pression démographique de plus en plus importante. Une manière d’y répondre est de convertir des immeubles de bureau en logements et c’est ce que nous commençons à faire avec le projet Livingstone dans le quartier européen ». Cofinimmo a clôturé l’année 2012 avec un bénéfice net en hausse à 121,8 millions €, contre 113,2 millions € en 2011.

Cependant, pour le gouvernement bruxellois, les communes et les promoteurs, il y a une exception à cette tendance car la demande de nouveaux bureaux continue de croître autour des gares. Ces nouveaux projets de bâtiments de bureaux ne répondent pas à un besoin supplémentaire en bureaux mais visent en réalité à attirer ceux déjà présent à Bruxelles pour mieux s’accaparer des parts de marché. Le projet immobilier d’Atenor et CFE de construire trois tours de bureaux dites « Victor » situés sur la frontière de Saint-Gilles et d’Anderlecht dans le quartier de la Gare du Midi est un bon exemple. Ces tours d’une hauteur de 148 m, soit un peu moins que la Tour du Midi, devraient accueillir 104.000 m² de bureaux et 6.000 m² de logements. Face à la pression des riverains, Picqué a suspendu temporairement ce dossier. Un autre projet envisagé est celui d’Eurostation qui envisage la création de 250.000 m² de nouveaux bureaux, dont le projet de prestige Jean Novel qui consiste en un bâtiment en V au-dessus des voies.

Le quartier du Midi possède déjà 300.000 m² de bureaux qui ont été construits des deux côtés des voies, au prix de la démolition de nombreux logements et de l’expropriation de leurs habitants. Le quartier du Midi à Saint-Gilles est un quartier pauvre composé également d’une forte population issue de l’immigration portugaise et espagnole ainsi que marocaine depuis les années ‘70. De 1992 à 2008, la région a réalisé 5 plans d’expropriation accompagnés d’un « harcèlement administratif systématique, de manœuvres dilatatoires » ou encore « d’attitudes injurieuse »2. Ce développement accompagnait l’introduction du TGV en Gare du Midi. Dans un article du « Soir » datant de 1990, Jean-Claude Vantroyen écrivait alors : « Charles Picqué veut vraiment « son » TGV dans « sa » gare du Midi pour nettoyer le bas de « sa » commune… »

Depuis l’urbanisation de Saint-Gilles entre 1850 et 1925, il y a toujours eut un « haut » ou l’on retrouvait des maisons bourgeoises et un « bas » ouvrier avec le développement d’industrie (fabrique de produits chimiques et filature de lin) qui remplacèrent les terrains agricoles. L’ancienne chocolaterie Côte d’Or quant à elle ferma ses portes fin des années ‘80 pour faire place à un immeuble de bureau et à la rénovation de la place Victor Horta. Depuis l’ère Picqué, cette situation s’est renforcée avec l’attraction de toujours plus de couches « plus aisées » dans le haut de la commune et l’éradication continue du quartier du Midi livré en pâture aux promoteurs construisant bureaux et hôtels.

Ainsi Picqué déclarait à propos de sa commune de Saint-Gilles en 1992 : « Si on veut, à terme, garantir un meilleur équilibre budgétaire local, il est évident qu’une mutation sociologique de certains quartiers doit être encouragée sans tarder ». Qu’en est-il 20 ans plus tard ? Si on regarde le budget 2012, il y une augmentation prévue de 5% sur les recettes de l’IPP, tout comme sur les recettes liées au revenu cadastral ou aux taxes sur les bureaux. Au même moment, le nombre d’aides sociales a augmenté de 20% en 2 ans.

Les additionnels au précompte immobilier (PRI) sont, avec 29%, la principale source de revenu des communes bruxelloises. Les communes qui accueillent les populations les plus aisées ont un rendement important contrairement au plus pauvres, à l’exception de Bruxelles et Saint-Josse qui ont le rendement le plus élevé du fait de la présence de nombreux bureaux sur leur territoire. En dehors de celles-ci, Saint-Gilles a le meilleur rendement des communes du croissant pauvre. En plus du PRI, les bureaux et chambres d’hôtels sont également taxés. Les taxes sur le patrimoine équivalent à 45% de l’ensemble des taxes communales.

En 1995, Saint-Gilles était la commune avec le revenu moyen par habitant le plus faible derrière St-Josse. Dix ans plus tard, Molenbeek l’a dépassé dans ce triste classement. Durant toute cette période, le revenu moyen des Bruxellois s’est terriblement dégradé à l’exception de Saint-Gilles et Saint-Josse. Entre 2005 et 2009, c’est à Saint-Gilles et à Watermael-Boisfort que la croissance est la plus élevée avec 3,66% en moyenne annuelle, au-dessus des 2,5% pour l’ensemble de la région bruxelloise, des 3,32% de la région flamande et des 3,45% de la région wallonne. En ce qui concerne les revenus sur l’IPP (qui représentent 13% des recettes budgétaires des communes bruxelloises), c’est Etterbeek, Saint-Gilles, Ixelles qui ont connu une croissance de plus de 7% par an entre 2006 et 2010. Ceci est le reflet du changement de composition sociale de certains quartiers sur fond d’un appauvrissement généralisé.

Toute cette attitude de la région bruxelloise et des communes par rapport au logement démontre qu’il s’agit plus d’un choix politique que d’un impondérable problème démographique. L’utilisation du phénomène de « boom démographique » par le gouvernement Picqué est une stratégie pour se déresponsabiliser des pénuries en logement, en présentant le manque de moyens sous un autre angle. Il s’agirait d’une demande trop importante, et non d’un manque de moyen. Aborder une pénurie sous cet angle permet aussi à Picqué de ne pas avoir à remettre en question les assainissements et d’éviter d’aborder la question « Où peut-on aller chercher les moyens nécessaires pour répondre aux besoins ? »

Ces projets de standing se retrouvent également sur le campus de « La plaine » à l’ULB avec des tours à appartements privés haut de gamme, et ce alors que les prix des kots étudiants ont augmenté ces dernières années suite au manque de logements disponibles. Alors que les promoteurs immobiliers étaient seuls contre tous dans ce projet, la commune a malgré tout délivré les autorisations, illustrant encore une fois le caractère antidémocratique de la gestion des logements à Bruxelles.

Pour les étudiants, cette politique de prestige s’additionne à la marchandisation de l’enseignement consécutive aux politiques néolibérales comme le traité de Bologne. Les études supérieures représentent un investissement financier toujours plus important, comme l’illustre l’augmentation continuelle des recours aux jobs étudiants. En 2012, 450.000 étudiants ont travaillé comme jobistes en Belgique, soit l’équivalent de 8,9 millions de jours prestés, une hausse de 16% par rapport à l’année 2011. Plus significatif encore, le recours des étudiants au CPAS. Par rapport à il y a dix ans à Bruxelles, on estime que leur nombre a plus que triplé !

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