Nouveaux mouvements de protestations sur les lignes du froid à ArcelorMittal

De nombreux arrêts de travail se sont déroulés cette semaine à Liège sur les différents sites de la phase à froid à ArcelorMittal, et plusieurs piquets se prolongeront jusqu’à la fin de la semaine. Pour cause, la négociation finale du plan social que direction et syndicats ont prévu normalement de clôturer le samedi 30 novembre. Pour rappel, c’est le 24 janvier 2013 qu’ArcelorMittal avait annoncé la fermeture de 7 lignes de la phase à froid. Sur les 3053 travailleurs concernés, il n’en restera plus que 845, dont 370 ouvriers. 260 externalisations sont également prévues.

Par Cécile (Bruxelles)

Ce mercredi 27 novembre, je me suis rendue sur trois piquets de grève, Flerbatil, Kessales et Flemalle afin de montrer le soutien du PSL avec les grévistes et pour m’informer de la situation.

Un climat d’insécurité dans un contexte de chômage de masse

C’est d’abord un climat d’insécurité et de crainte quant à l’avenir qui transparaît dans les discussions avec les travailleurs. A Flerbatil, il y a une dizaine de jours, les nouvelles structures de travail avaient été présentées aux travailleurs, ce qui avait provoqué au sein des travailleurs une quarantaine de malaises (1). C’est à ce moment-là que la direction annonçait la suppression de presque la moitié des emplois. Les ouvriers attendent pour l’instant anxieusement lesquels d’entre eux passeront à la trappe. Comme me l’exprime François (2), 51 ans, ouvrier sur le site de Tilleur depuis 10 ans, l’avenir a toujours été incertain à ArcelorMittal. Les ouvriers sont toujours dans la crainte qu’un jour ou l’autre on leur annonce la fermeture de l’usine. Aujourd’hui, cette peur est redoublée par le contexte de crise économique. Comment retrouver du travail ? La reconversion des ouvriers comme François est très difficile car ceux-ci n’ont pas de qualification autre que le boulot qu’ils ont toujours effectué à l’usine mais qui n’existe pas ailleurs. Christophe, délégué syndical FGTB sur le même site, me parle de ce contexte : la plupart des ouvriers du site sont déqualifiés par rapport au marché du travail et en plus, il y a une véritable chasse aux chômeurs qui est mise en place par le gouvernement. Il en résulte une situation plus qu’inquiétante pour les ouvriers et leur famille.

Que faire ? ‘‘Pourquoi on lutte ?’’

‘‘Le monde politique ne reflète plus la société’’ affirme Christophe, ‘‘on ne cesse d’aider les patrons pour qu’ils créent de l’emploi mais ça ne marche pas, il y en a de moins en moins.’’ Les 138 millions que la Région Wallonne va ‘‘prêter’’ à ArcelorMittal pour investir les quelques lignes stratégiques restantes du froid en sont l’exemple même (3). Sur le piquet de Kessales, Marc, autre délégué syndical FGTB, m’explique également qu’ils n’ont aucune confiance dans les solutions que Jean-Claude Marcourt tente d’établir. Celui-ci, après qu’un bureau d’expertise ait prouvé que la sidérurgie liégeoise valait la peine d’être sauvée car elle possédait des outils de qualité, avait proposé un décret d’expropriation temporaire pour trouver un repreneur. Son plan est tombé à l’eau assez rapidement. ‘‘Notre première revendication était le rachat de l’outil, comme ils ont fait avec la FN à Herstal, c’était la seule solution pour sauver les emplois. Mais le plan industriel a été ficelé au mois de juillet, maintenant c’est trop tard pour ça’’, commente Marc.

C’est sur le troisième piquet à Flémalle qu’Alain, qui travaille depuis 30 ans dans la sidérurgie, donne le même point de vue sur la situation politique et ses conséquences sur le syndicalisme : ‘‘On n’a plus de relai politique, c’est ça le grand problème, ici la structure syndicale de la FGTB est complètement inféodée au PS et à Marcourt, ils essayent de calmer la base.’’ Il m’explique que les piquets de grève actuels sont le résultat d’une pression de la base qui a poussé à mettre en place ces actions à la fois spontanées et organisées. Il m’explique également que ce qui se passe à ArcelorMittal, c’est la faillite du mouvement syndical et de son indépendance. On en conclut tout les deux que l’appel de Daniel Piron à construire une nouvelle alternative de gauche est dans ce contexte très important.

Dans cette situation très difficile, revient souvent la question de ‘‘pourquoi faire grève, à quoi ça sert ?’’. Véronique, travailleuse à ArcelorMittal et militante très combative, me dit qu’il faut tout le temps expliquer aux travailleurs à quoi sert de lutter : ‘‘on ne lutte plus pour sauvegarder les emplois, c’est finit ça, mais on lutte pour garder nos acquis sociaux. Avec tout l’argent que Lakshmi Mittal s’est mis en poche, on peut bien avoir des plus grosses primes que ça !’’ Alain partage le même avis et ajoute que la lutte, c’est pour affirmer haut et fort qu’un changement politique et social est nécessaire et possible, qu’il faut changer les consciences. Il ajoute : ‘‘chaque jour de lutte est un jour de fête, parce que l’outil nous appartient.’’ La lutte, la grève, permet de mettre les conditions matérielles en place pour faire évoluer les consciences et pour affirmer au gouvernement que, cette politique, on en veut plus.

Actuellement, le site de Flerbatil repart en grève pour 24h. Certains veulent une grève ‘‘au finish’’. D’autres camarades du PSL ont visité le piquet le mercredi soir (voir photos ci-dessus).


(1) http://www.lalibre.be/economie/libre-entreprise/des-travailleurs-d-arcelormittal-font-un-malaise-apres-la-presentation-des-organigrammes-528275603570ea593db99246

(2) Tous les noms sont fictifs.

(3) http://www.7sur7.be/7s7/fr/1536/Economie/article/detail/1732569/2013/10/31/La-Wallonie-va-preter-138-millions-a-Mittal.dhtml


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