TOTAL-Anvers : Deux morts dans un accident qui devait arriver

L’enquête concernant cet incident survenu dans un système à vapeur d’une unité de production d’essence et qui a coûté la vie à deux travailleurs d’un sous-traitant n’a pas encore débuté. Mais l’on peut, sans exagérer, parler d’une véritable ‘‘bombe à retardement’’ dans cette affaire. Si l’accident a eu lieu dans la raffinerie de la multinationale Total, il aurait tout aussi bien pu prendre place dans chaque grosse entreprise pétrochimique d’Anvers. Les autres entreprises (BASF, Bayer, Evonik Degussa, Monsanto, Exxon Mobil,…) fonctionnent de manière similaire en termes de production et de maintenance.

Par un correspondant

Une bonne part des risques actuellement présents dans l’industrie pétrochimique n’existent que pour des raisons de gains financiers, les salaires inférieurs des travailleurs des sous-traitants étant fortement attractifs pour les patrons. Dans l’entretien et les départements techniques des grandes entreprises pétrochimiques se trouvent aujourd’hui presque autant que d’employés que dans la production. Mais ces services ont été externalisés et/ou relégués à des sous-traitants.

Les grands arrêts de production pour l’entretien et le travail quotidien d’entretien sont chaque jour effectués par des milliers de travailleurs sous-traitants parce que ‘‘le temps, c’est de l’argent.’’ Les employeurs du secteur pétrolier ne considèrent plus l’expertise, la connaissance des produits chimiques, l’expérience des travailleurs et la sécurité; tout cela passe à la trappe pour obtenir le coût le plus bas possible pour les arrêts et l’entretien.

Des gens viennent du Portugal, de Pologne, de Roumanie,… afin de travailler ici pour une bouchée de pain. Ils logent dans des parcs à bungalows ou même dans des voitures et des caravanes garées sur le parking des entreprises chimiques. Ces situations sont monnaie courante. Souvent, ces employés ne font que ‘‘voyager’’ de site en site. A chaque fois, ils doivent travailler de longues heures dans un stress permanent, car un jour de boulot supplémentaire signifie une perte qui se calcule en millions pour les patrons. Concernant la sécurité, les délégations syndicales du secteur pétrochimique pointent du doigt depuis longtemps déjà le manque de connaissance des produits ou du système de production, mais aussi de la langue. Cela conduit inévitablement à des incidents et des accidents. Les services d’inspection Seveso (du nom d’un accident industriel survenu près de Seveso, en Italie, en 1976) ont d’ailleurs été contactés par les syndicats à plusieurs reprises sur cette question.

Pour les travailleurs de TOTAL et des sous-traitants, ces décès sont pénibles à double titre, car les avertissements des syndicats n’ont pas manqué concernant l’inéluctabilité d’accidents si les investissements nécessaires n’étaient pas consacrés à la sécurité.

Il faut aussi parler de l’impasse actuelle dans les négociations pour une convention collective de travail, la direction voulant imposer une proposition unilatéralement pro-patronale qui offense les travailleurs et ne leur permet en aucune manière de toucher aux milliards de profits de TOTAL.

L’explosion le 19 novembre a fait deux morts. Nous exprimons nos condoléances aux familles, aux amis et aux collègues des victimes.


Pour un contrôle sur la sous-traitance !

Actuellement, le contrôle est extrêmement limité concernant la sous-traitance, ce qui ouvre grand la porte aux fautes professionnelles et à la croissance d’accidents. En France, un contrôle plus structuré est dorénavant obligatoire pour la sous-traitance mais, pour parvenir à ce résultat, il a fallu la catastrophe de l’explosion de l’usine chimique AZF à Toulouse en 2001. Après ce désastre, le parlement français avait même brièvement débattu de l’interdiction pure et simple de la sous-traitance dans les entreprises à risque. Pour assurer la sécurité, le Comité pour la prévention et la protection au travail (CPPT) doit être en mesure de contrôler les sous-traitants. Un organe de consultation réunissant les syndicats de l’entreprise-mère et des sous-traitants constituerait un pas en avant bien utile, et cela renforcerait également l’unité sur les lieux de travail.

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