Enseignement supérieur: Vers des universités d’élite en Europe

Enseignement supérieur:

EN ALLEMAGNE, le chancelier Gerhard Schröder prône la mise en place d’universités d’élite sur le modèle américain de Harvard, Standford et compagnies. Le secrétaire général du SPD (social-démocrate) confirme cette idée en avançant la nécessité d’avoir plus de prix Nobel. Le ministère de l’Enseignement supérieur allemand prépare pour cet été un système de notations internationales des universités afin de pouvoir comparer la compétitivité des unifs allemandes avec les universités européennes concurrentes.

Boris Mallarme

Les patrons applaudissent. Ils veulent d’un enseignement adapté au besoin du marché capable de concurrencer les établissements américains. La Table ronde des Industriels européens avance depuis 1989 que l’enseignement en Europe fournit une main-d’oeuvre trop critique, pas assez flexible, que trop de moyens sont consacrés aux études inutiles et que trop peu de jeunes font des études supérieures en rapport avec les besoins du patronat.

Aux États-Unis, les universités décident quels étudiants elles admettent. Les droits d’inscription s’élèvent à des sommes atteignant plusieurs dizaines de milliers d’euros! Bref la sélection est extrême. Seul les génies et les gosses de riches ont accès aux unifs d’élite. Depuis des années les moyens consacrés à l’enseignement diminuent en Allemagne. On financera quelques unifs réservées à une élite au détriment de la masse des étudiants qui accéderont au reste des unifs qui dégénéreront de plus en plus en établissements poubelles.

L’idée d’écoles supérieures pour l’élite ne touche pas que l’Allemagne. La déclaration de Bologne, signée par 29 ministres européens de l’Enseignement en 1999, vise à préparer les universités européennes à la compétition avec celles des États-Unis. L’harmonisation européenne des structures d’enseignement vise à mettre en concurrence les établissements et non à offrir une plus grande mobilité à la masse des étudiants. La mise en concurrence signifie que les formations jugées non rentables par les entreprises passeront progressivement à la trappe. Le stade final du processus est la création de «pôles d’excellence», où l’accès sera filtré par des minervals exorbitants. En Angleterre, un projet de loi permettant aux unifs d’augmenter les droits d’inscriptions à partir de 2006 sera voté dans les prochains jours. Les montants des frais scolaires pourront alors grimper jusqu’à 4.500 euros par an (Le plafond étant pour le moment de 1.656 euros). De nombreux étudiants à la suite de leurs études seront endettés de plusieurs dizaines de milliers d’euros. La dette serait effacée si elle n’a pas été payée entièrement après 25 ans. Cela rappelle les suggestions des économistes de l’UCL d’élever le minerval à 4.000 ou 6.000 euros à rembourser après les études.

Seuls les étudiants les plus aisés capables de payer leurs frais de voyages, leurs logements, leurs droits d’inscription,… pourront étudier à l’étranger.

Bologne conçoit une mobilité accrue pour ceux qui seront admis dans les futurs unifs d’élite étrangère et non pour tous. A côté de ces pôles d’excellence, il y aura des établissements de seconde zone, plus accessibles, mais dont la qualité laissera de plus en plus à désirer et dont les diplômes auront peu de valeur. C’est là qu’échoueront la masse des étudiants les moins fortunés.

L’enseignement en Belgique suit cette tendance néo-libérale européenne.

Le 3 janvier 2004, le gouvernement de la Communauté française a approuvé l’avant projet de décret dit de «Bologne» de la ministre de l’Enseignement supérieur Françoise Dupuis visant à mettre en place l’harmonisation européenne des structures (du coté flamand l’avant-projet de décret correspondant a été voté depuis le 5 juillet 2002). Ce décret remplace le système candis/licences (2+2) par 3 ans de baccalauréat et puis un an de maîtrise (3+1) ou deux ans pour une maîtrise spécialisée (3+2). Les écoles supérieures sont intégrées à ce système. Il faudra dès lors être capable de payer la cinquième années d’études pour avoir le diplôme de maître spécialisé qui vaudra évidemment plus sur le marché de l’emploi que celui de maître. L’autre grosse partie du décret concerne la constitution «d’académies», possible autour de l’ULB, de l’ULG et de l’UCL, associant plusieurs universités francophones du pays. Les universités pourront léguer à souhait à leur «académie», des parties de l’enseignement, de la recherche et des services qu’elles organisent. Ceci permet aux universités de rationaliser, de faire baisser les coûts de fonctionnement (moins d’administration, suppressions de filières, pertes d’emploi,…). Les universités sont en train de se constituer en pôle avec des écoles supérieures. Tout ceci a pour objet de tenter de développer un pôle d’excellence réservé à l’élite du côté francophone.

La vague d’attaques au niveau européen contre les acquis en matière d’éducation visant à augmenter la sélection montre une fois de plus le caractère antisocial de l’Europe capitaliste. L’enseignement est l’un des thèmes de la campagne électorale du MAS pour les élections de juin. Le MAS combat l’idée d’un enseignement élitiste et défend un enseignement gratuit et de qualité à tous les niveaux. Etudiants de Gauche Actifs est solidaire de la campagne électorale du MAS qui est la seule opposition de gauche crédible qui défende nos droits d’étudiants.

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