Après les aveux, changement de cap au FMI ? Hum hum…

Le FMI admet s’être trompé

Les ‘aveux’ des responsables du Fonds monétaire international (FMI) ont fait la une des médias du monde entier en juin dernier. Ils admettaient que leurs projections économiques concernant la Grèce avaient été trop optimistes (en termes de croissance et de réduction de la dette) et que le premier ‘plan de sauvetage’ (hum) accordé en 2010 par la Troïka en échange d’économies budgétaires drastiques s’était soldé par des “échecs notables”. Les centaines de milliers de victimes de la crise apprécieront.

Par Stephane Delcros

Le FMI en a même profité pour critiquer la Troïka, dans laquelle il serait difficile de négocier et de lire la réelle répartition des rôles entre les 3 organisations la composant : la Commission européenne, la Banque centrale européenne et, donc, le FMI. Les propos de l’institution tiennent visiblement surtout ici à mettre en avant que les institutions européennes n’avaient pas les ‘compétences’ pour mener une telle politique ‘d’aide’, contrairement à elle. Elle leur reproche de n’avoir pas accepté une restructuration de la dette grecque dès 2010. La Commission, bien sûr, a tout rejeté en bloc et défendu la politique de la Troïka. Les chômeurs grecs apprécieront à nouveau.

Cela faisait plusieurs mois que le FMI, par la voix de certains de ses économistes, tentait de montrer qu’il remettait en cause la politique d’austérité. Dans une étude publiée en début d’année, son économiste en chef Olivier Blanchard reconnaissait que l’austérité était plus destructrice de croissance et d’emploi que prévu.

La politique du FMI ne change pourtant pas. Dans une conférence de presse donnée le lendemain de la sortie médiatique des ‘aveux’, Gerri Rice, du département Communications du FMI, a rappelé que la Troïka avait bien fonctionné et fonctionnait toujours bien. Et que l’aveu d’échec concernait seulement le plan de 2010, et certainement pas celui de 2012. C’est donc dans ce cadre qu’il faut regarder les récentes visites de la Troïka en Grèce, venant vérifier la situation avant de décider si la Grèce a droit à un nouveau déblocage de plusieurs milliards d’euros d’aide. Vérifier la situation ? Vérifier en fait que la réforme de l’appareil d’Etat (lire: les coupes budgétaires et la diminution du nombre de fonctionnaires) et la libéralisation du secteur de l’énergie se poursuivent bien.

On s’est trompé, mais pas de raison que ça change

L’économiste Xavier Timbeau, de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), nous avait déjà prévenus : “Il y a deux FMI, la tête et le corps. En Grèce, c’est lui le plus ferme sur l’austérité, encore plus que la Commission et que la BCE. Quoi que disent Blanchard ou Lagarde, sur le terrain, le Fonds applique le plan décidé entre le pays et ses créanciers.” (1)

La décision du gouvernement grec de fermer la partie télévisuelle du groupe audiovisuel public (ERT) s’inscrivait d’ailleurs parfaitement dans la lignée de l’énorme pression budgétaire exercée par le FMI et les autres institutions défendant la classe capitaliste.

Deux semaines seulement après avoir avoué s’être trompé concernant le plan d’austérité de 2010 en Grèce, le FMI a imposé à l’Espagne une deuxième réforme du marché du travail, après celle adoptée en février 2012, avec pour objectifs de baisser les salaires et de flexibiliser le marché du travail, soi-disant pour diminuer le chômage de masse (27%). Et l’institution va même plus loin dans l’hypocrisie en préconisant la poursuite de la cure d’austérité “mais à un rythme assoupli”. Cela va de soi. Dans les pays du monde néocolonial, principalement en Afrique et en Amérique latine, les politiques d’ajustement structurel du FMI continuent à ravager les populations à coup de privatisations et de limitations des dépenses budgétaires, notamment dans la santé et l’éducation.

Alors, changement de cap ? On voit d’ici la scène : arrivant à un carrefour dans leur auto de luxe appelée FMI, le copilote Blanchard lit les injonctions des classes dominantes du monde entier et confirme le chemin à suivre au pilote Lagarde : “Keep it that way”.


(1) Libération, “Oups, le FMI s’est trompé sur l’austérité”, 8 janvier 2013.

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