Élections présidentielles vénézueliennes : La menace de la contre-révolution grandit

Les travailleurs doivent prendre des mesures urgentes pour contrer le capitalisme et la droite

Lors d’un vote très serré, Nicolas Maduro a réussi de justesse à remporter les élections présidentielles vénézueliennes contre le candidat de droite Capriles, avec seulement 200.000 suffrages de plus. On attendait de Maduro, le successeur attitré de Chavez, qu’il triomphe avec une plus large majorité. Ce succès limité démontre clairement la menace d’une victoire des forces contre-révolutionnaires de droite.

W. Prieto et J. Rivas, Socialismo Revolucionario (CIO Venezuela)

Depuis les élections, la droite, qui a exigé un recomptage des votes (tout comme John Kerry, représentant de l’impérialisme américain), semble vouloir freiner la confrontation directe. Elle semble désormais décidée à saper le nouveau faible gouvernement, avec pour objectif de le renverser de force, vraisemblablement avec l’organisation de nouvelles élections dès que possible.

Après l’annonce de la mort de Chavez le 5 mars de cette année, des millions de personnes ont envahi les rues en affichant leur chagrin et leur soutien à la Révolution Bolivarienne. Cet évènement, combiné aux résultats des élections gouvernementales de décembre lors desquelles le chavisme a remporté 20 sièges sur 23, illustre que les chavistes étaient bien placés pour remporter n’importe quelle élection présidentielle populaire.

Quand l’élection présidentielle fut appelée le 14 avril, tout indiquait une victoire claire de Maduro, malgré le mécontentement grandissant parmi les masses vis à vis de la situation économique et l’inefficacité et la bureaucratisation des structures étatiques.

Avant ces élections, Socialismo Revolucionario (SR) avait publié un document basé sur notre position antérieure, celle des élections présidentielles d’octobre 2012, dans lequel nous déclarions :  »Un vote pour Maduro ne suffira pas » (voir la version de ce texte en anglais). SR a défendu un programme de revendications révolutionnaires démocratiques et socialistes pour pousser la révolution en avant, vaincre le capitalisme et corriger le programme actuel qui n’ouvre aucune voie vers l’achèvement de la révolution socialiste.

La position de SR était clairement en contraste avec celles d’autres organisations de gauche. Beaucoup mettaient en avant la position sectaire d’un vote blanc sans tenir compte des conséquences d’une victoire de la droite, de l’extrême polarisation dans le pays et de la conscience actuelle des masses. D’un autre côté, il y avait un appel opportuniste à voter pour Maduro sans aucune critique du processus ou du programme qu’il défendait.

Contrairement à bon nombre de ces groupes, nous avons distribué des tracts dans les stations de métro à Caracas lors des jours précédents les élections et pendant la manifestation finale de la campagne électorale de Maduro. Ce faisant, nous avons reçu de vives critiques mais également beaucoup d’intérêt de la part des membres de base du parti de Chavez, le PSUV.

Ces membres affirmaient penser que la mort de Chavez allait ouvrir un espace pour discuter de la direction de la révolution. Mais dans les faits, la direction du PSUV a fait comprendre qu’il n’était pas temps pour les dirigeants du parti de soulever les critiques car il fallait soutenir la candidature de Maduro.

Beaucoup de dirigeants chavistes étaient, et sont toujours, menacés d’expulsion, pour avoir fait des critiques même si celles-ci étaient de plus faible mesure que celles défendues par les membres de SR. De telles méthodes visant à empêcher le débat et les critiques internes, une méthode bien connue du stalinisme, ont eu un effet extrêmement négatif, particulièrement au sein d’un parti qui prétend agir au nom du socialisme révolutionnaire.

Maduro a remporté les élections avec un score minimal. Cela a été une sonnette d’alarme, même pour les membres les moins critiques du PSUV, qui soulève des questions au sein des rangs du parti et qui portera ces critiques sur le devant de la scène. En seulement sept mois après les dernières élections présidentielles, Maduro a perdu près de 700.000 voix des 8 millions qu’avait obtenu Chavez.

Même Diosdado Cabello, l’actuel président de l’Assemblée Nationale et un des dirigeant du PSUV, s’est interrogé publiquement sur le fait qu’un travailleur puisse voter pour ses oppresseurs (Capriles) et a affirmé que qu’il était désormais temps pour une  »auto-réflexion ».

La réponse à la question de Cabello est qu’il n’y a aucune alternative révolutionnaire qui soit présentée à la classe ouvrière, aux pauvres et aux exploités, tout comme à des parts de la classe moyenne. Beaucoup, malheureusement, considèrent la droite hypocrite, populiste et opportuniste comme la solution à leurs problèmes. Ces problèmes basiques quotidiens et l’absence de discussion autour de ceux-ci rendent difficile pour certain de soutenir le gouvernement. La réticence des dirigeants soi-disant révolutionnaires pour la discussion a écarté beaucoup de personnes du gouvernement. Le travailleur qui se voit dire que les fréquentes coupures d’électricité sont en partie de la faute de sa consommation et le travailleur qui paie la crise actuelle par la dévaluation monétaire et qui doit faire face à des pénuries alimentaires peuvent malheureusement être séduits par une droite populiste dangereuse qui se dépeint désormais elle-même comme une force démocratique et désirant simplement  »l’unité ».

Les pénuries alimentaires d’ailleurs sont le résultat de l’existence persistante d’une couche bourgeoise parasitaire au Venezuela aujourd’hui. C’est également la responsabilité du gouvernement qui continue à la soutenir financièrement dans l’importation des produits mais qui ne placera pas cette même industrie dans les mains des travailleurs.

Et maintenant ?

Aujourd’hui, nous avons une droite qui a retrouvé sa confiance et obtenu une base sociale importante. Electoralement, elle est presque au même niveau que le chavisme. Cela a été en partie dû à la capacité de la droite de tirer démagogiquement parti des erreurs et des faiblesses du gouvernement et de combler partiellement le vide d’une opposition socialiste d’une gauche critique qui n’a pas été en mesure de se développer dans le processus révolutionnaire.

Le gouvernement Maduro a maintenant la balle dans son camps. Il peut choisir la voie de la réconciliation avec la droite ou la voie de radicalisation et d’approfondissement du processus vers le socialisme. S’il opte pour cette dernière option – ce que nous espérons et ce pour quoi nous nous battrons – il devra prendre en compte la large base sociale qui voit aujourd’hui la droite comme son alternative pour le changement et proposer une nouvelle voie pour gagner une fois de plus son soutien.

Après 14 ans de lutte, un affaiblissement général du mouvement et un nombre considérable de mécontentements et d’erreurs accumulés, il faudra une lutte massive pour surmonter ces obstacles et développer un mouvement pour pousser en avant la révolution socialiste sur une base démocratique.

Cela est l’un des nombreux défis auquel est confronté le gouvernement Maduro. Nous ne pouvons pas tomber dans le piège de penser que les sept millions de personnes qui ont voté pour Capriles sont capitalistes ou oligarques. Comme Fidel Castro l’a dit à Chavez lors d’une réunion il y a quelques années :  »Ne croyez pas que les cinq millions de personnes qui sont aujourd’hui dans l’opposition au Venezuela sont bourgeoises. »

Socialismo Revolucionario met en garde contre la menace grandissante des forces contre-révolutionnaires de droite. Les travailleurs, les pauvres et tous ceux qui veulent pousser la révolution en avant doivent rapidement tirer les leçons de la montée de la droite dans ces élections. Il est nécessaire de continuer la révolution et de rompre avec le capitalisme.

Les masses de travailleurs et de jeunes doivent s’unir de toute urgence afin d’abattre la menace de la contre-révolution. Les masses doivent construire leurs propres organisations et leurs propres forces. Par l’occupation des lieux de travail, l’établissement de comité de contrôle démocratique et de défense contre les attaques de la droite. Elles doivent lutter pour la nationalisation des moyens de production (largement restés dans les mains de la classe parasitaire capitaliste) sous le contrôle inconditionnel des travailleurs et des communautés, et non sous le contrôle bureaucratique actuel. Une organisation démocratique des travailleurs et des communautés est nécessaire au sein de comités pour organiser une économie planifiée qui satisfera nos besoins et non pas ceux de la classe dirigeante. Cette économique sera différente de celle qui existe actuellement sous l’appellation biaisée de  »socialisme » au Venezuela.

De telles mesures ne stopperont pas seulement l’avancée de la droite mais regagneront aussi nos frères et s?urs qui ont été séduits par la droite. Elles gagneront aussi la solidarité internationale de ceux qui se battent pour un véritable changement et nous seront le stimulus pour que ces changements deviennent réalité. De tels pas sont urgents pour contrer le triomphe de la droite.

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