Mais jusqu’où vont-ils assainir ?
Depuis lundi les postiers ont débrayé à différents endroits à Bruxelles. Mercredi dernier Woluwe, Ixelles ou encore Laeken, entre autres, étaient bloqués. En cause : une nouvelle mouture du logiciel géoroute qui vise à supprimer 8 postes dans la distribution du courrier à Woluwe. Il s’agit de 20% des effectifs !
Par Nico M. (Bruxelles)
En discutant avec les travailleurs sur le piquet, on peut appréhender ce que la direction de La Poste, devenu Bpost, a entrepris durant les dernières années : une réduction conjuguée des effectifs et des conditions de travail. Certains postiers expliquent qu’au début de leur carrière, le nombre de tournées dépassait les 50 pour un bureau donné. Aujourd’hui, dans ce même bureau, avec les plans successifs, on se retrouve avec une vingtaine de tournées. On comprend mieux la colère accumulée depuis toutes ces années. La direction a détruit peu à peu les conditions de travail des facteurs (avec notamment une surcharge). Géoroute, qui a été présenté comme un progrès pour la distribution du courrier, n’est que l’instrument qui a organisé ce saccage.
On ne s’arrête pas là : la surcharge de travail s’est accompagnée de l’élimination progressive des anciens statuts de facteur plus avantageux (salaires, protection,…). Au piquet, les facteurs encore nommés ne sont plus majoritaires et sont côtes-à-côtes avec les nouveaux facteurs, les ‘‘remplaçants’’. Ceux-ci font exactement le même boulot mais sont moins payés et ne reçoivent pas les divers avantages des nommés (les chèques-repas par exemple).
On réduit les effectifs, on casse les statuts, on ne nomme plus les travailleurs : on organise le service public comme une entreprise privée. C’est de toute façon cela qu’ils prévoient : la libéralisation totale de la distribution du courrier. Cette politique de privatisation est payée en première instance par les travailleurs qui font concession sur concession. Ensuite, comme c’est le cas avec l’énergie par exemple, on présentera la facture aux usagers en augmentant les prix : rien n’arrête la soif de profit.
… et quand allons nous mettre en place un plan d’action?
Une victoire à Woluwe
A la sortie de la réunion de concertation pour le bureau de Woluwe, les nouvelles étaient bonnes. En effet la direction est revenue sur le plan de suppression de 8 postes et elle garantit le maintien de toutes les tournées.
Ces trois jours de grève ont été cruciaux et déterminant pour obtenir cette victoire. Nous devons saluer l’action coordonnée des postiers de Woluwe et des bureaux d’Ixelles ou Laeken venus en solidarité.
Cette victoire illustre la capacité des travailleurs à remporter des victoires significatives. Cela donne aussi la direction à prendre pour récupérer les conditions de travail mises à mal durant toutes ces années.
Sur le piquet, la colère s’accompagne de combattivité. Ce mouvement de grève est spontané, il illustre la possibilité d’organiser la lutte. Ce mercredi matin, les syndicats rencontraient la direction de Bpost pour une concertation autour des problèmes à Woluwe. Les conclusions de cette réunion ne sont pas encore connues (voir le cadre ci-contre, NDLR) mais il y a peu de chances que Bpost revienne en arrière et recule d’elle-même sur ses attaques. Au mieux elle ne supprimera pas 20 % mais un peu moins. Or au même moment, dans le Hainaut, les postiers sont aussi en grève : en cause l’absence de clarté sur la notion de ‘‘norme’’ censée régir la charge de travail. Dans ces deux cas, la question du manque de personnel est centrale, les plans de restructuration successifs ont supprimés des milliers d’emplois.
Il est urgent d’organiser à la base, dans chaque bureau dans chaque dépôt, des discussions qui posent la question de structurer ces luttes. Par exemple, au piquet, la question de géoroute est un point mais les conditions de travail des ‘‘remplaçants’’ constituent aussi un des sujets discutés.
Les syndicats devraient organiser ces débats rapidement et collectivement mettre en place un plan d’action capable d’unifier tous les travailleurs du secteur autour d’un carnet de revendications. Un tel plan permettrait de donner aussi confiance aux travailleurs qui n’ont pas encore débrayé en illustrant qu’il s’agit d’une lutte collective pour les conditions de travail de tous.
Une lutte unifiée de tout le secteur est plus que nécessaire. Mais si on se remémore les questions brûlantes que vivent les cheminots avec leur propre calendrier en vue de la privatisation du rail, il n’y a qu’un pas à franchir pour mettre à l’ordre du jour une lutte collective entre ces deux secteurs. Au même moment, ce mercredi matin pendant que nous étions au piquet à Woluwe, une réunion à Genk entérinait la fermeture complète du site de Ford pour 2014. La question d’une lutte généralisée en Belgique pour la défense de l’emploi doit être mise à l’ordre du jour. Ne négocions pas chacun dans notre coin mais luttons tous ensemble pour nos emplois, pour nos conditions de travail et contre l’austérité !