Le parti de gauche a le potentiel de devenir le plus grand parti du pays
Les sondages consacrés aux élections législatives du 12 septembre prochain aux Pays-Bas confirment les uns après les autres la percée du SP. Même le parti libéral (VVD) semble rester derrière le parti de la tomate rouge (son symbole). Evidemment, les débats électoraux doivent encore avoir lieu au moment d’écrire ces lignes, et le résultat final peut être influencé par divers évènements.
Par Gerbrand Visser, Socialistisch Alternatief (Alternative Socialiste, CIO-Pays-Bas)
Image ci-contre : Le magazine ‘Quote’ mène campagne contre le SP et Emile Roemer, car il veut s’en prendre aux super-riches…
La tendance est claire: les gens se détournent des partis traditionnels. Ils les tiennent à juste titre responsables de la crise économique et rien n’indique qu’ils puissent changer leur fusil d’épaule : ils ne font au contraire que promettre encore plus d’assainissements, plus d’Union Européenne, plus de soutien aux banques, moins de droits sociaux, moins d’enseignement et, très important, moins de soins de santé. Le rythme de l’austérité et ses accents divergent quelque peu entre eux, mais la recette est fondamentalement identique.
A deux exceptions près : le PVV et le SP. Le PVV (parti de la liberté, populiste de droite et très réactionnaire) critique l’Union Européenne, mais est par contre lié aux 18 milliards d’euros de coupes budgétaires opérées par le gouvernement Rutte, tombé un peu avant l’été. Actuellement, la crise de l’euro n’étant (temporairement) pas en première page de la presse, la course se développe entre les libéraux du VVD et le SP (Parti Socialiste, bien à gauche du PS de Di Rupo, représenté aux Pays-Bas par le Parti Travailliste). Le PVV reste en ce moment à l’arrière plan.
L’attitude qu’adopteront les autres partis après les élections est claire. Que ce soit avec le dernier cabinet (les libéraux du VVD, les chrétiens-démocrates du CDA, et les populistes de droite du PVV), avec le précédent (les sociaux-démocrates du parti travailliste PvdA et le CDA) ou encore avec la coalition ‘‘Kunduz’’ (VVD, CDA, D66, GroenLinks et ChristenUnie), la politique fut à chaque fois faite d’attaques antisociales. Les attentes sont donc grandes envers le SP. Le SP se prononce contre l’Union Européenne néolibérale, contre les coupes budgétaires et ne s’est pas compromis dans un cabinet appliquant les décisions prises par la dictature des marchés. Tout cela est suffisant pour une bonne victoire électorale, c’est certain. Mais le SP deviendra-t-il ‘‘grand’’ ou ‘‘le plus grand’’ ?
Les partis traditionnels font tout pour mettre hors jeu le dirigeant du SP Emile Roemer, en le dépeignant comme “extrémiste, irresponsable, dépensier”, avec pour l’instant comme seul effet de confirmer aux électeurs qu’il est différent des politiciens établis. Si Roemer ne commet pas lui-même de fautes, les autres partis semblent bien incapables d’empêcher sa victoire. Soyons clair : plus grande sera la victoire du SP, plus grand sera le pas en avant posé pour la classe ouvrière néerlandaise. Alternative Socialiste appelle à voter pour le SP et à s’impliquer activement dans la campagne, et ensuite faire en sorte que Roemer tienne réellement ses promesses. Les structures syndicales ont malheureusement sérieusement abdiqué face à la politique d’austérité, une victoire écrasante du SP constituerait un certain rempart contre la logique néolibérale. Il faut assurer que cela devienne bien le cas !
Tout en soutenant le SP, nous ne partageons cependant pas l’enthousiasme de la direction du SP concernant une éventuelle participation gouvernementale. Le SP collabore déjà dans certaines localités avec le VVD, une approche qui promet un désastre politique à court terme. Quant au PvdA et au CDA, le PvdA refusera d’être sous la domination du SP et le CDA commettrait un suicide politique en entrant en coalition avec les deux plus grands partis “de gauche”.
L’élite politique fera tout pour isoler le SP et éviter de lui donner le pouvoir, une option qui ne lui est envisageable qu’en tout dernier recours. La bourgeoisie n’a pas peur des dirigeants du SP qui ont déjà démontré à plusieurs reprises qu’ils sont bien conciliables. La bourgeoisie a peur de l’influence des travailleurs sur le SP. Ce sont eux qui votent pour lui et qui l’animent jusqu’à un certain point.
De plus, la bourgeoisie a besoin de partis fiables pour appliquer l’austérité, des partis inflexibles face aux sentiments des masses. La situation la plus probable après le 12 septembre est un cabinet composé de plusieurs partis unis par l’impasse de l’austérité et l’absence de toute idée sur ce qui convient d’être fait, avec un SP dans l’opposition qui continuera à profiter de cette situation compliquée. De plus en plus, le SP peut représenter l’alternative politique aux yeux de ceux qui en ont marre des assainissements.
Les populistes de droite du PVV n’ont aucune chance d’instrumentaliser la situation pour l’instant, en raison de leur racisme virulent et de leur responsabilité dans l’application des mesures d’austérité du gouvernement précédent. Le SP pourra alors prendre la voie de la résistance active contre l’austérité et organiser la colère en transformant le soutien électoral en un soutien militant, vers une rupture avec la société capitaliste, vers une société socialiste. L’arrivée d’un gouvernement majoritaire du SP, basé sur un programme socialiste, est un objectif réalisable.