La face cachée du soleil

Un dimanche au soleil, c’est agréable. Ça fait partie de ces petits bonheurs que les talibans de l’austérité n’ont pas encore réussi à nous prendre. Donc, nous en avons profité. Après un marathon d’une bonne heure nous trouvons finalement une place au pied de la Cathédrale à Metz. On boit un verre, on mange, le temps passe et la nuit est déjà tombée.

Par Jean L.

Nous sommes les derniers sur la terrasse que le personnel a déjà commencé à ranger. Il reste juste une autre table à côté de la nôtre. Une serveuse en profite pour s’asseoir un instant. Elle s’excuse… Je lui réponds qu’il n’y a pas de quoi, que sa journée a certainement été dure…

« J’ vous dis pas… », Répond-elle. « C’est ma première pause depuis midi. Je regarde ma montre, il était passé 23 heures… « C’est sûr, avec ce beau temps… Pour nous c’était dur de trouver une place », dis-je.

– Et vous en faites souvent des journées comme ça ?

– « Ça dépend, en semaine c’est plus calme l’après-midi, normalement on peut s’arrêter un peu, mais le week-end c’est souvent comme aujourd’hui ».

– OK, vous récupérez vos heures du week-end la semaine alors…

– « Ah non, en moyenne je fais 80 heures par semaine… payées 35 bien sûr »

– Quoi… ? Pas possible !

– « Ben oui, j’ai déjà réclamé, mais le patron ne veut rien entendre, il dit que c’est comme ça dans la restauration, si on n’est pas content, on n’a qu’à partir… »

– Non mais honnêtement, on vous donne une compensation en black ou quelque chose, dis-je tout bas…

– « Non, rien. Nada. On nous a dit que c’était compris dans le salaire. Bon, c’est vrai je gagne 1600 euros par mois ».

– Oui, mais même au SMIC, si on vous paye toutes vos heures, vous aurez beaucoup plus.

– « C’est clair. En plus, pas moyen d’aménager mes horaires pour mon gamin… Et quand je rentre plus tard que prévu à cause du boulot, la nounou ne me fait pas cadeau de son heure supplémentaire, elle. C’est facturé ! »

– En plus vous avez un enfant ?

– « Ben oui, ça aussi on me l’a reproché : Quand on travaille dans l’hôtellerie, on ne fait pas d’enfants, il m’a dit le patron ».

– Merde…

– « Comme vous dites. On n’a même plus le droit d’avoir la vie qu’on veut. En plus on s’est fait avoir avec leur histoire de TVA à 5,5 pc… il y en a plein qui n’ont pas changé leur prix, ou alors juste sur des produits qu’on ne vend que tous les 36 du mois. Donc la différence, c’est pour leur poche (ndlr : en France, la TVA est passée de 19,6 à 5,5 pc dans la restauration). Et pour nous, rien. Ni embauche ni augmentation… »

Bref, le soleil n’a pas encore été privatisé, mais il tape dur sur la tête de ceux qui bossent pour nous en faire profiter un petit peu.

A présent, les vacances sont finies. C’est la rentrée, les capitalistes vont encore essayer de nous faire payer l’addition de leur crise. Travailler plus pour gagner moins, c’est le seul menu qu’ils nous proposent. Il est temps de renverser la table et de prendre possession des fourneaux.

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