Le parcours d’intégration : un moyen de cohésion ou de division ?

Est-ce le contexte de crise économique qui pousse la droite européenne à épouser les thèses de l’extrême-droite ? Est-ce la proximité des élections communales ? Les libéraux ont créé le buzz ces dernières semaines avec les déclarations de Didier Reynders sur le fait que ‘‘Molenbeek, c’est déjà l’étranger’’ puis en proposant (en urgence s’il vous plaît !) une loi sur un nouveau parcours d’intégration.

Il faut dire qu’ils ont étés bien aidés par les intégristes de sharia4belgium à qui on pourrait décerner la palme de l’idiot utile de la xénophobie. On est habitué depuis longtemps aux accents poujadistes du MR et à ses poussées de fièvres conservatrices ou xénophobes. Afin de convaincre les plus sceptiques, rappelons simplement que certains des parlementaires MR avaient voté contre la loi permettant l’adoption pour les couples homosexuels.

On aimerait être étonné que des partis comme le PS et Ecolo ne remettent pas en question la nécessité du parcours d’intégration mais on est hélas habitué à ce que ces partis emboîtent le pas à la pensée dominante du moment. Si ces partis proposent une version adoucie du parcours d’intégration, aucun ne s’est interrogé sur sa pertinence et sur sa signification. Le parcours d’intégration apparaît pour renforcer et donner raison au préjugé xénophobe ‘‘les étrangers ne s’intègrent pas à la société belge.’’ Première mise au point : les travailleurs immigrés font partie de la société belge. Ils sont cette société au même titre que les travailleurs belges de souche. La surpopulation des écoles d’alphabétisation et d’apprentissage des langues nationales prouve à elle seule la volonté des étrangers primo-arrivants de se donner la possibilité d’évoluer au sein de cette société. Le parcours d’intégration, obligatoire ou non, ne va pas influer sur cet état de fait et sert donc surtout à conforter ceux qui voudraient voir les travailleurs immigrés renoncer à leur culture pour adopter tous les aspects de la culture dominante.

Cet angle d’approche ne doit pourtant pas masquer d’autres raisons, plus profondes, pour lesquelles le MR fait de la question de l’intégration des immigrés son cheval de bataille. Nous vivons des temps de crise économique profonde. Si l’austérité ne frappe pas la Belgique de plein fouet, on a commencé à en voir la tête avec les premières mesures contre les chômeurs. Dans ce contexte de crise, et face à des travailleurs qui pourraient vouloir s’organiser contre des mesures qui vont aller croissantes pour défaire leurs acquis sociaux, les bonnes vieilles recettes du patronat refont surface pour semer la division. Faire croire que les travailleurs belges et immigrés n’ont pas les mêmes intérêts est un de ces tours de passe-passe. Il est important pour le MR, surtout face à un PS fort en Wallonie, de montrer au patronat belge qu’il est le meilleur pour ce job. Le PS, bien sûr, ne voudra pas laisser si facilement filer sa place de premier de la classe, raison pour laquelle il emboîte le pas au MR. Et si Ecolo fait de même, il aura démontré publiquement ce qu’il est devenu : un autre parti du patronat qui n’a pas encore fait son coming out.

Le fait qu’aucun parti traditionnel ne veuille prendre position pour l’unité des travailleurs, contre un parcours d’intégration et pour la création d’une société solidaire et respectueuse de la culture de chacun où le vivre ensemble est le maître mot, montre encore plus clairement l’urgence de se doter d’un parti de classe. Un parti qui défende les intérêts de l’ensemble des travailleurs de façon aussi efficace que l’ensemble des politiciens défendent les intérêts de la bourgeoisie. A ce titre, le soutien de Bernard Wesphael (qui vient de lancer son Mouvement de Gauche) à la demande d’urgence déposée par le MR au Parlement wallon concernant le parcours d’intégration est une très mauvaise indication.

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