Quel type de parti révolutionnaire pour aujourd'hui?

Lequel de ces deux mots est le moins populaire pour l’instant? Difficile à dire, mais à coup sûr les événements en Tunisie et en Egypte ont joué un rôle crucial dans la popularisation des idées de mouvements de masse et de révolution. Mais la conscience reste faible et vague. Quand on parle de la révolution, les gens peuvent en venir à parler de révolution dans notre façon de penser, dans nos esprits,… C’est à nous qu’il incombe de donner une vision concrète de la notion de révolution, de comment le pouvoir peut être retiré des mains du 1% pour être transféré dans les mains des 99%.

Rapport d’une discussion tenue à l’école d’été du CIO

Rien que sur l’année 2011, nous avons vu des mouvements comme les Indignados, le vote grec, le mouvement Occupy et tous avaient des éléments de sentiments anti-parti, plus forts dans certains pays que d’autres. Dans tous les pays, les sondages montrent une faible confiance envers la politique. La politique de gauche également, à cause de la trahison des partis sociaux-démocrates et des verts, sont touchés aussi.

Ces 20 dernières années, nous avons vu toutes sortes de soi-disant «nouvelles formes d’organisation» – aucunes d’entre elles n’étaient vraiment nouvelles, mais c’était le reflet d’une recherche d’alternative de la part de quelques éléments parmi les plus conscients de la société touchés par le sentiment anti-parti, le sentiment anti-politique.

Les jeunes ont formé des réseaux, des comités ad hoc, des groupes d’entraide, n’importe quoi, avec n’importe quel nom, mais pas celui de parti. Un parti est vu par eux comme bureaucratique, un instrument où la trahison et la corruption sont inévitables.

Pour nous, un parti n’est ni plus ni moins que la nature de l’outil nécessaire pour organiser l’avant-garde de la classe ouvrière dans sa conquête du pouvoir, pour atteindre l’objectif de la transformation socialiste de la société.

La seule classe capable de mener une révolution socialiste et de créer un état des travailleurs en tant que première étape vers une société sans classes est la classe ouvrière. Le rôle décisif de la classe ouvrière dans la révolution socialiste se pose en raison de la conscience de classe collective qui se développe dans le lieu de travail et qui lui permet de préparer la base pour le contrôle démocratique collectif et de la gestion de la société.

Ce n’est pas non plus une coïncidence si les méthodes d’action et de lutte de la classe ouvrière sont les mêmes partout dans le monde et sont fondées sur le rôle central qu’ils ont dans le processus de production. Ils vont utiliser leurs forces : leur nombre, avec des manifestations et des actions de masse, et leur place dans la production, avec des arrêts de travail, des grèves et des grèves générales. La classe ouvrière est la classe la plus unie en raison de son rôle dans la production et dans la société.

Les autres classes sociales reflètent tous d’une certaine manière l’individualisme du propriétaire, comme les petits agriculteurs,les petits commerçants,…

Pourquoi un parti, pourquoi un parti de cadre?

Si nous étudions l’histoire révolutionnaire, c’est pour que le parti puisse utiliser la mémoire collective de la classe ouvrière et incorporer toutes les leçons du passé. Chaque individu apprend sur la base d’expériences propres, mais ces expériences sont limitées. Suivant les expériences propres, nous apprenons beaucoup d’autres personnes. La vie serait plus difficile si nous ne pouvions pas utiliser l’expérience acquise par ceux autour de nous.

De la même manière pour les révolutionnaires de la classe ouvrière, il est nécessaire de passer par des expériences propres, assorties de l’apprentissage à partir des énormes expériences des générations passées dans les différents pays. Nous avons besoin d’étudier les événements révolutionnaires, de connaître ses victoires et ses défaites. Celui qui n’apprend pas de l’histoire est condamné à la répéter, et ce n’est pas ce que nous voulons.

Cette expérience collective tient sa plus forte expression dans le parti révolutionnaire et dans l’Internationale révolutionnaire.

Comment est construit un tel parti?

Toutes les informations génétiques d’une personne sont déjà présente chez le fœtus. C’est la même pour le développement d’un parti révolutionnaire de masse. L’information génétique est représentée ici par la théorie et des méthodes sur base desquelles un groupe de cadres est développé et tous les grands flux de prochaines étapes de cette situation.

La théorie du marxisme telle que nous la connaissons aujourd’hui a été testée, affinée et développée à travers une histoire riche de plus de 150 ans de socialisme scientifique. Lorsque nous discutons et nous étudions la construction d’un parti révolutionnaire, nous essayons d’apprendre de l’expérience la plus importante, l’histoire des bolcheviks. Ils ont mené une révolution ouvrière et ont conquis le pouvoir. "Ils sont les seuls à avoir osé », a déclaré Rosa Luxembourg, et la bourgeoisie et ses agents ne leur pardonneront jamais. Jusqu’à aujourd’hui, la classe dirigeante vit avec une grande peur de la révolution. Ils investissent dans des moyens importants pour lutter contre les idées révolutionnaires par la propagande, la littérature, l’éducation, les médias,… A nous d’étudier et de diffuser ces idées.

Les origines des bolcheviks russes se trouvent dans le groupe de l’Émancipation du travail, un groupe de pas plus de 5 personnes qui ont jeté les bases théoriques et les racines pour le mouvement, parmi eux Plekhanov, le père du marxisme russe.

Pendant toute une période, ce groupe était isolé, devait se battre contre la répression, et l’exil. De loin, on pourrait croire que ce groupe avait peu d’impact, mais ils ont jeté les bases, ils ont formé l’embryon du puissant parti révolutionnaire qui, 34 ans plus tard, conduirait la révolution russe.

Dans les années 1880, la classe ouvrière s’est manifesté en tant que classe à travers les grèves héroïques, mais elles avaient encore un caractère faible, spontané et inorganisé. Il manquait une direction. Sur la base de capitaux extérieurs des développements économiques ont eu lieu dans le cadre d’une société féodale. En 1898, 1,43 million de travailleurs travaillaient dans les usines avec plus de 100 travailleurs. Jusqu’en 1900, la Russie était le plus grand producteur de pétrole au monde. Une armée du prolétariat s’est alors développée, mais il lui manquait un état-major général. C’est pendant cette période que les marxistes russes ont gagné la confiance des gens, avec patience, et ont fait connaître leurs idées.

Dans cette période, le parti a été construit à travers des milliers d’actes ordinaires, des activités routinières de construction du parti, comme des discussions, des réunions, la rédaction de tracts et d’articles, des rencontres. Le genre d’activités qui passent inaperçues pour les historiens, mais qui constituent les origines historiques de la transformation révolutionnaire.

Il vint une période d’agitation croissante par les cellules révolutionnaires et c’est à cette époque que Plekhanov a formulé sa définition classique de la propagande et l’agitation."Une secte politique peut se contenter d’une propagande générale dans les petits cercles, mais pas un parti politique, un propagandiste peut donner beaucoup d’idées pour un petit nombre de personnes, mais l’histoire est faite par les masses, c’est l’agitation d’un nombre limité d’idées mais pour un public de masse, qui construit le lien nécessaire entre les masses et leurs dirigeants."

En l’an 1900, 50% de tous les travailleurs à Saint-Pétersbourg étaient dans les usines de plus de 500 travailleurs. Les cellules existantes étaient composées de groupes de lecture qui firent progresser l’agitation «illégale», la distribution de tracts, à travers lesquels cette petite quantité de gens ont commencé à jouer un rôle au-delà de leur proportion.

Mais ce développement a suscité débats et controverses. Un certain nombre de vieux marxistes, qui travaillaient en sous-sol depuis longtemps avait adopté un mode de vie et de travail, une routine, à travers lequel il était difficile de briser la mentalité des petits cercles. D’autre part, parmi la jeune génération, il y avait une trop grande attention à l’agitation et l’activisme et une négligence de la construction de structures.

Bien que la répression ait été forte en 1898, le Parti Ouvrier Social Démocrate de Russie a été créé. Pendant longtemps, ce parti n’était tout simplement qu’une feuille de papier. Ce n’est qu’après 1900, avec la publication du journal du parti, l’Iskra, qui a été produit en exil, qu’il y avait un instrument pour donner une base théorique et programmatique.

Dans ces premières années du marxisme russe, nous pouvons trouver de nombreuses leçons pour nous aujourd’hui, même si les conditions sont différentes à bien des égards. Contrairement aux partis capitalistes, nous encourageons tous les membres à jouer un rôle actif dans la construction du parti.

Une révolution ouvrière qui conduit à un Etat ouvrier doit être fondée sur la participation consciente de la masse des travailleurs. Un parti révolutionnaire de masse doit guider les travailleurs à une transformation socialiste réussie. Dans un tel parti, des membres individuels devraient être en mesure de jouer un rôle d’avant-garde dans leur milieu de travail, lotissement, école, dans les syndicats, au niveau local, régional et national. Pour en arriver à un tel parti, nous devons développer les moyens nécessaires pour s’assurer que les membres soient conscients de leur mission historique. Il faut que les activités du parti et ses méthodes puissent élever leur confiance, leur compréhension, leur courage et leur prise d’initiative. Il s’agit de stimuler l’activité de réflexion et d’initiative pour les membres, de stimuler une atmosphère de discussion.

Pour atteindre la classe ouvrière avec nos idées, il faut que nous soyons organisés. La section est la clé de la construction du parti. Elle constitue, au niveau local, le lieu où les membres se réunissent pour élaborer une stratégie afin de construire le parti. Certaines sections travaillent avec des sections jeunes ou étudiantes. En Belgique, nous avons en général choisi d’avoir des sections mixtes, où il peut y avoir un échange entre les travailleurs et les jeunes, entre les expérimentés et les moins expérimentés.

La réunion de section est l’endroit où les membres peuvent avoir une participation active dans toutes les discussions du parti, sur le programme, l’analyse, les perspectives et les décisions. C’est le lieu où l’activité des membres peut être guidés et discutées collectivement. C’est l’endroit crucial où les camarades peuvent acquérir les connaissances politiques nécessaires pour être en mesure de jouer un rôle en tant que révolutionnaires. La direction générale joue également un rôle primordial dans l’éducation et le développement des membres du parti. La façon dont nous construisons le parti et ses sections est bien sûr également déterminée par les conditions concrètes, le niveau de lutte de classe et la conscience.

La période de lutte de classe et la conscience aura évidemment un impact sur nos racines et le fonctionnement. La chute du stalinisme a eu un impact dévastateur sur de nombreux partis de gauche. Le Comité pour une Internationale Ouvrière a été capable de passer par cette période avec des dommages limités sur base de discussion profondes et d’une forte analyse tout en développant de nouvelles initiatives destinées ) continuer à nous construire, comme en se tournant vers la jeunesse.

Toutes les sections plus importantes ont connu des périodes de forte croissance et des périodes de consolidation. Les périodes de forte croissance se posent souvent avec des périodes d’intensification sociale et / ou de lutte politique. Dans de telles périodes, il est important d’ouvrir notre parti, d’adapter nos méthodes pour être en mesure de maximiser les possibilités de recrutement et de consolidation.

C’est pourquoi les responsables de sections et leur équipe au sein du comité de section jouent un rôle important dans le parti. Ils ont à élaborer des propositions qui se traduisent par le projet du parti au niveau national ou régional. Ils doivent développer une approche dynamique pour stimuler et convaincre tous les camarades de jouer un rôle dans ce projet.

Les sections doivent travailler avec un comité composé de 3 à 6 membres du parti. La direction est faite de membres qui sont les camarades principaux qui tirent en avant le travail montrant l’exemple, en inspirant et en aidant tous les membres à intervenir et à aider à construire le parti.

Le comité établit des plans pour la section, pour les activités et les discussions et cherche à développer chaque camarade d’une manière qui permette de scinder la section et de cette manière, de doubler le montant des camarades impliqués dans le parti et en augmentant les capacités du parti dans son travail quotidien, les interventions, le recrutement et ainsi de suite.

Il y a eu des périodes au cours desquelles nous avons opté pour les petites sections. Ça stimule les camarades à prendre un rôle, il est plus facile de prendre la responsabilité d’un aspect du travail. Il y a une différence pour un trésorier si vous devez suivre 20 ou 10 membres. Mais le fractionnement d’une section peut également être prématuré si les conditions ne sont pas bonnes, s’il n’y a pas assez de camarades pour garantir le fonctionnement et l’activité de cette section.

Dans certaines situations, il est nécessaire d’avoir de plus grandes sections. Dans les périodes où nous faisons beaucoup de travail de campagne externe, si nous avons beaucoup de camarades impliqués dans le travail en organisations de gauche plus larges ou qui doivent prendre des responsabilités importantes, il n’est souvent pas possible de combiner cela avec une tâche concrète dans la section du parti. Mais dans de grandes réunions, les camarades seront plus réticents à intervenir dans les discussions, la charge de travail pourrait peser sur les épaules d’un petit groupe de membres. C’est pourquoi nous avons toujours besoin de chercher des camarades et de développer ces camarades qui peuvent prendre le travail de la construction du parti comme leur première priorité. Pour tous les camarades que nous envoyons dans le travail avec des formations de gauche plus large, l’équilibre doit être fait pour qu’ils puissent aussi se concentrer sur la construction de notre propre organisation.

Les camarades dans les comités de section jouent le rôle le plus crucial dans le parti. Pour développer ces camarades et l’ensemble de la nouvelle génération, la section Angleterre et Pays de Galles a commencé à organiser des journées de formation pour les organisateurs du parti, une initiative que nous avons suivi en Belgique également. En conséquence de cela, nous préparons une brochure "organisateurs de section", similaire à la version anglaise, mais adapté à la situation belge, qui fonctionne comme un guide pour les camarades anciens et les nouveaux qui prennent la tâche de construire les sections. Il s’agit d’un instrument essentiel pour les membres des nouvelles régions où nous nous implantons, cette brochure pourra les aider dans les étapes qui doivent être prises pour passer d’une poignée de camarades à une section qui fonctionne pleinement.

Le caractère du parti est déterminé en première instance par son programme, mais il n’est pas possible d’avoir une organisation saine révolutionnaire sans les structures nécessaires, les méthodes et le fonctionnement.

L’expérience du SSP (scottish socialist party) a prouvé ce point. Lorsque le SSP a été lancé nos ex-camarades ont confondu la tâche de la construction du parti large et l’organisation des cadres marxistes. Ils ont dissous notre organisation et l’ont remplacées par un réseau avec des réunions mensuelles et un magazine trimestriel. Ils ont prétendu que, parce qu’ils étaient en position dominante dans la direction du SSP, le caractère marxiste du SSP serait garanti et qu’un travail de construction de notre parti frère n’était pas plus nécessaire.

Plus de 10 ans après ce débat, une position qui était sans doute plus favorable que celle que connaissent actuellement nos camarades irlandais a été détruite, pas complètement toutefois grâce à notre groupe écossais qui est restés au sein du Comité pour une Internationale Ouvrière. Il faut du temps et un travail patient pour construire une position et des bases, elle peut être détruite très vite. Les mêmes erreurs ont été faites par la LCR française au sein du NPA. Le résultat pourrait être similaire.

Nous voulons qu’un maximum de nos membres deviennent des cadres, autrement dit qu’un maximum de camarades soient capable d’intervenir dans le mouvement en tant que leaders révolutionnaires. Vous ne pourrez jamais devenir un cadre uniquement par l’étude du marxisme, il faut la pratique de la lutte des classes et de la lutte politique pour être en mesure de traduire les idées en pratique. Mais sans étudier, des erreurs inutiles peuvent être faites. Même si la section est l’unité centrale pour la formation, est utile de prendre des initiatives pour renforcer la formation des membres, sous la forme d’entretiens individuels et de programmes de formation de groupe, des groupes de lecture, la rédaction d’articles, de brochures,… ou des mesures spécifiques pour stimuler les jeunes camarades, les camarades immigrés et les femmes à prendre un rôle de premier plan dans le travail de construction du parti

Notre objectif est de construire un parti révolutionnaire, un parti d’avant-garde, qui peut jouer un rôle de leadership dans la lutte de la classe ouvrière pour le pouvoir et la construction d’une société socialiste.

C’est la science dans laquelle nous voulons que tous nos membres se spécialisent et soient formés et éduqués, afin d’être en mesure de jouer ce rôle historique. La discussion qui s’est développé sur cette base à l’école d’été du CIO a aidé à échanger les diverses expériences, à apprendre les uns des autres et à préparer nos sections pour la période future.

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