Sommet de Glasgow. Good COP or bad COP?

À l’issue de la COP26 à Glasgow, le climatologue belge Jean-Pascal van Ypersele résumait le bilan en ces termes : « Bien plus que du bla-bla, mais c’est très insuffisant ! ». Notre expert national est donc nettement moins pessimiste que Greta Thunberg qui estime que la COP26 n’était rien d’autre qu’une opération de greenwashing sans aucune avancée réelle. Qui a raison ?

Article de Jean Larock issu de l’édition de décembre-janvier de Lutte Socialiste

Pour Jean-Pascal van Ypersele, « la reconnaissance encore plus nette de l’urgence de l’action et un accueil favorable du dernier rapport du GIEC » sont des motifs de satisfaction ainsi que l’appel à réduire l’usage du charbon et des subsides aux énergies fossiles. « L’ensemble des textes adoptés à Glasgow ne diminue pas immédiatement les émissions de gaz à effet de serre, mais crée un cadre et des signaux de plus en plus clairs vers la décarbonisation pour tous les gouvernements, tous les acteurs économiques et tous les citoyens. Maintenant, au boulot !», conclut le climatologue. Il reconnaît donc explicitement qu’aucune mesure concrète et immédiate n’est sortie de la COP26… Ce qui donne implicitement raison à Greta Thunberg.

Sur base des annonces faites lors de la Conférence, les experts parlent d’un réchauffement compris entre 1,8 et 2,4 °C. Soit mieux que les 2,7°C auxquels nous étions condamnés avant la COP. Pour les optimistes, chaque dixième de degré gagné est une victoire. On pourrait le voir comme cela si ces victoires étaient tangibles et garanties. Or elles ne sont encore qu’à l’état de promesses non contraignantes ou d’engagements sans réelles sanctions prévues en cas de non-respect.

Nous ne sommes pas dans un simple débat philosophique entre optimistes et pessimistes. Dire que chaque dixième de degré gagné est une victoire ne doit pas nous faire oublier que chaque dixième de degré perdu représente une menace mortelle pour des dizaines voire des centaines de millions de personnes sur cette planète.

Mais regardons d’un peu plus près les résultats de cette « COP de la dernière chance » dans les domaines clés : réduction globale des émissions, sortie des énergies fossiles, aide aux pays du Sud, méthane, déforestation,… et enfin compensation carbone.

La réduction des émissions globales représente sans doute le plus grand échec de cette COP. Comme indiqué, les efforts supplémentaires n’atténueront que très peu le réchauffement. Une cinquantaine de pays n’ont fait aucun effort pour améliorer leur copie de 2015. La seule minuscule avancée réside dans l’accord de réviser les objectifs plus fréquemment que tous les 5 ans. Mais ce n’est évidemment rien de concret.

Concernant les énergies fossiles, pour la première fois, à Glasgow, une COP a envisagé la fin du pétrole et du charbon. Mais à la dernière minute, l’Inde, soutenue par la Chine et l’Afrique du Sud, a obtenu un affaiblissement notable du pacte : au lieu d’une « disparition progressive » du charbon, l’accord n’appelle qu’à « intensifier les efforts vers sa « diminution progressive » . « Pour la première fois, les énergies fossiles sont pointées du doigt dans un texte de COP. Ce qui ressemble à un pas en avant à l’échelle des négociateurs, reste une lapalissade tragi-comique à l’échelle du monde réel. Aucun calendrier de sortie des hydrocarbures, pourtant principales responsables du réchauffement climatique, n’est en effet évoqué. Les dirigeants des pays riches préfèrent hypothéquer l’avenir des jeunes générations et la survie des pays vulnérables plutôt que remettre en cause les intérêts criminels de leurs industries fossiles », souligne Greenpeace France.

Au niveau de l’aide aux pays du Sud qui sont les plus touchés par la crise climatique, c’est un nouvel échec et les promesses faites déjà en 2009 aux pays pauvres n’ont toujours pas été tenues. Seules l’Écosse et la Wallonie ont brisé un tabou en annonçant respectivement 1,17 million et 1 million d’euros pour répondre aux pertes et dommages. Au pied du mur, les pays vulnérables ont dû se contenter d’un lot de consolation avec l’organisation d’un dialogue de 2 ans pour discuter des arrangements de financements pour éviter, limiter et répondre aux pertes et dommages sans garantie qu’il aboutira à des engagements concrets. Proposeriez-vous à quelqu’un qui est en danger de mort de venir l’aider, mais seulement d’ici deux ans ?

Côté méthane et déforestation, il y a eu de nombreuses annonces en parallèle des négociations, mais leur portée reste incertaine, car des pays clés ont refusé de les signer (comme le Canada, l’Argentine ou la Nouvelle-Zélande dans le cas de l’élevage) tandis que l’on peut douter de la sincérité de certains signataires (le Brésil de Bolsonaro dans le cas de la déforestation).

La révision des mécanismes de compensation carbone est présentée par certains comme une avancée, car l’Article 6 des accords de Paris qui prévoyait un système d’échange des droits d’émission piétinait depuis 2015. La COP26 a donc réussi à mettre au point des règles d’encadrement du marché de la compensation carbones. «Malgré le fait que les marchés carbone peuvent s’avérer dangereux à la fois pour atteindre l’objectif de +1,5 °C et pour le respect des droits humains, les États ont adopté un texte qui donne quelques garanties sur l’intégrité environnementale et les droits humains», estime le Réseau Action Climat. Cette « victoire » en demi-teinte ne doit pourtant pas nous faire oublier les défauts fondamentaux de ce mécanisme de compensation.

Tout d’abord, il crée un décalage entre des émissions de CO2 déjà réalisées, et des projets de compensation qui mettront des années à se construire et dont les résultats restent hypothétiques et fonction de la performance encore incertaine de certaines actions. Par exemple, planter des arbres sur certains types de sols peut engendrer des émissions de CO2 supérieures au volume que les arbres pourront absorber… Ensuite, mettre le CO2 sur un marché, c’est permettre aux entreprises qui en ont les moyens de continuer à polluer, en « rachetant leurs péchés » comme au temps des indulgences. Cela crée également un nouveau terrain de jeux pour les spéculateurs. Bref, c’est un petit pas dans une direction hasardeuse. Il serait beaucoup plus judicieux de mettre en place une planification démocratique de la transition et de la décarbonation de l’économie au lieu de jouer l’avenir de la planète en bourse.

Enfin, la COP26 a battu un triste record : celui de ses propres émissions de CO2. Selon des estimations encore provisoires, son bilan carbone dépasserait les 100000 tonnes de CO2, soit 2 fois plus que pour la COP21 de Paris et 4 fois plus que la COP15 de Copenhague. Autre détail illustrant toute l’hypocrisie du sommet : l’industrie fossile comptait la plus grosse délégation à la COP26, avec 503 délégués, largement devant les pays les plus impactés par le changement climatique.

Notre Internationale ASI (Alternative Socialiste Internationale) avait mobilisé massivement et a réalisé un grand pas en avant dans la construction d’une résistance internationale contre le greenwashing et la destruction capitaliste. Notre énergie révolutionnaire est 100% renouvelable. Alors si le résultat de la COP26 ne vous satisfait pas et que vous voulez sauver notre planète, rejoignez-nous !

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Première page de Lutte Socialiste