Témoignage depuis la ville de Bagh
Hier, je me suis rendu à Bagh, une ville dans le Jammu-et-Cachemire. Je suis arrivé avec un camion d’aide collecté par des travailleurs et des syndicalistes de Lahore. Ce n’est qu’un des cinq camions d’aide que nous avons collecté à Lahore, trois étant pour le Cachemire et deux autres pour la Province du Nord-Ouest. Le camion dans lequel je me trouvais avait une banderole à l’avant afin de l’identifier comme venant de la campagne pour les droits des syndicats et du Mouvement socialiste du Pakistan. Une fois entré au Cachemire, cette banderole attira l’attention car c’était le premier camion arborant une bannière socialiste provenant du Pakistan. Nous apportions de la nourriture, des vêtements, de l’eau potable et des couvertures.
Khalid Bhatti, membre de la campagne pour les droits des syndicats, Pakistan
Cette région est complètement dévastée et ici, les gens se battent toujours pour les besoins élémentaires de survie. Il est très difficile de dire exactement combien de gens sont morts ici mais on peut facilement deviner que 25 à 30% de la population a péri dans le désastre qu’a connu cette région. Les gens demandent des tentes- c’est leur principal besoin pour pouvoir se protéger du froid et du vent. Il y a encore plusieurs zones dans les montagnes où les gens n’ont toujours reçu aucune aide jusqu’à maintenant. Le gouvernement a déclaré que les autorités avaient atteint presque toutes les régions mais ce n’est pas vrai. Il y a beaucoup de régions où ni le gouvernement ni l’administration centrale n’ont été vus une seule fois. A présent ce sont essentiellement des volontaires des différentes parties du Cachemire qui ont livré de l’aide, que ce soient de la nourriture, des médicaments,…
La dévastation que nous avons aperçue dans les montagnes est encore pire que tout ce que nous avons déjà vu. Dans certains villages il n’y a plus une seule maison qui n’ai subie aucun dommage et dans certains autres, toutes les maisons ont été rasées.
Dans la ville de Bagh, il y a quelques bâtiments qui tiennent encore debout, comme des hôtels ou d’autres buildings. Mais une chose est claire : toutes les zones où les riches habitent, dans des villes telles que Rawalakot, ne semblent ne même pas avoir été touchées par le tremblement de terre. Cela parce qu’elles ont été construites avec précaution et avec de bons matériaux de construction. Dans certains de ces quartiers, pas une seule brique n’est craquelée !
Le gouvernement a essayé de cacher ces contradictions et a déclaré que tous les quartiers étaient affectés de manière égale. Il n’y a toujours pas d’Etat ou d’autorité officielle dans cette région. C’est pourquoi il y a énormément de chaos et de panique. Beaucoup de routes sont toujours bloquées, et donc inaccessibles. Pendant que certaines personnes dans les villes ont de quoi manger et font même des stocks, les habitants des régions montagneuses crèvent de faim. Il n’y a aucun plan ni aucune stratégie mis en place par le gouvernement pour faire face à la catastrophe et aider la population.
Le gouvernement n’a rien trouvé de mieux que de proposer de déménager la capitale du Cachemire occupé par le Pakistan à Islamabad (la capitale fédérale du Pakistan) et a également l’intention d’amener des bureaucrates en service civil pour diriger les efforts de reconstruction au Cachemire. Ces deux mesures à elles seules vont provoquer un fort mécontentement. Comme résultat de la faillite du gouvernement, les tensions autour de la question nationale ont déjà commencé à croître. Mais elles risquent d’exploser si le gouvernement applique ses plans, et cela sera suivi d’une augmentation importante du nationalisme.
Unc chose est sûre : il y a une énorme colère et la population est très mécontente de l’inaction du gouvernement. La nuit passée, quand je suis arrivé à Bagh, il y avait une manifestation de plus de 500 personnes contre le gouvernement avec comme slogan : « nous voulons des tentes et non de la charité ! ». Ce sentiment va continuer à se développer. Quand le choc de la perte de proches va s’éloigner (et il y a au moins entre 7 et 9 morts dans chaque famille), alors cette colère va s’exprimer d’elle-même.
Les membres du TURCP sont en train d’organiser un centre de secours qui pourra aussi être utilisé pour réunir tous les syndicalistes et les travailleurs politiques de la ville. Dans un futur proche, nos membres pensent qu’il y aura une augmentation des sentiments nationalistes et qu’il sera d’autant plus important et nécessaire de mettre en avant une alternative de classe lorsque cela surgira.
C’est pourquoi les dons qui ont déjà été faits sont très importants. Ces fonds vont nous aider à mener à bien nos tâches dans cette période difficile : fournir de l’aide et des ressources pour cette campagne dans l’intérêt de la classe ouvrière et des syndicats.