Un Irlandais sur deux a refusé de payer la nouvelle taxe d’habitation !

L’austérité à travers l’Europe, ce sont des réductions budgétaires, mais aussi de nouvelles taxes. En Irlande, le gouvernement veut instaurer un nouvel impôt sur les ménages, qui était à payer pour le 31 mars. A cette date, suite à une campagne de boycott massif, la moitié des contribuables concernés avait refusé de s’acquitter de cette taxe, malgré les menaces d’amendes et de peines de prison. Nous en avons discuté avec Paul Murphy, député européen irlandais membre de notre parti- frère, le Socialist Party.

Par Finghin Kelly

Peux-tu nous en dire plus sur cette taxe ?

Cette taxe sur les propriétaires fait partie d’une batterie d’attaques et de contre-réformes imposées dans le cadre du ‘memorandum’ conclu entre le gouvernement irlandais et la ‘troïka’ (Fonds Monétaire International, Banque Centrale Européenne et Union Européenne). Il s’agit d’un impôt de 100€ sur chaque maison du pays, sans que ne soient pris en compte ni le revenu, ni la capacité de payer. Pour de nombreuses raisons historiques, l’Irlande possède un taux élevé de propriétaires. Cette taxe sur les ménages est injuste et frappe plus durement les plus pauvres. De plus, le gouvernement prévoit d’augmenter cette taxe après un an et d’en introduire une nouvelle, concernant l’eau cette fois-ci. Au bout du compte, on arrive à une taxe de 1.000 € par an.

Comment l’opposition à cette taxe s’est-elle organisée ?

Le Socialist Party (CIO-Irlande) avait défendu que la meilleure tactique était l’organisation d’une campagne de masse pour le non-paiement. Avec d’autres, notre parti a initié la Campaign Against Household and Water Taxes (CAHWT, campagne contre les taxes sur les propriétaires et sur l’eau). La CAHWT a tenu des meetings publics massivement suivis à travers tout le pays ces derniers mois et des sections locales de la campagne ont été construites dans chaque recoin du pays, jusque dans les villages les plus reculés ! De grandes manifestations ont aussi été organisées, dont une qui a réuni 15.000 personnes à l’occasion d’une conférence des partis au pouvoir. Un meeting à Dublin a rempli le stade national de boxe à tel point qu’il a fallu disposer des haut-parleurs sur le parking.

Combien de personnes ont refusé de payer cette taxe ?

La date limite était le 31 mars. A ce moment, un million de ménages n’avaient pas payé (sur les 2 millions de propriétaires de maison du pays), en dépit d’une offensive massive de la part des médias et de l’establishment politique. Le gouvernement a été jusqu’à menacer la population de grosses amendes et de convocations devant les tribunaux. Cela est extrêmement significatif et représente un des plus grands actes de désobéissance civile de l’histoire de la république irlandaise.

La population s’oppose clairement à cette taxe, mais les gens font-ils le lien entre cet impôt et les autres mesures d’austérité?

La CAHWT représente bien plus qu’une campagne contre une taxe injuste. Lors des quatre années précédentes, les travailleurs et leurs familles ont dû faire face à une austérité affolante, avec des coupes de salaires, des réductions de dépenses dans les services publics, un chômage de masse et des augmentations de taxes de toutes sortes, ce qui a entraîné une grande polarisation politique et une grande radicalisation. Un profond sentiment anti-establishment gagne toute la société. La colère est grande contre l’impact de l’austérité, mais aussi contre cette injustice véritablement brutale et contre les inégalités sociales. Les gens savent très bien que cette taxe est à considérer dans le cadre de la politique d’austérité qui vise à protéger les banquiers et les spéculateurs. Nombreux sont ceux qui considèrent la campagne contre cette taxe comme une bataille par procuration contre toutes les autres mesures d’austérité.

A la fin du mois de mai, il y aura un referendum en Irlande au sujet du traité fiscal européen. Comment cela va-t-il interagir avec la CAHWT ?

Oui, le 31 mai, il y aura en Irlande un referendum sur ce qui est maintenant connu comme étant le ‘‘Traité d’Austérité’’. Ce traité vise à condamner chaque nouveau gouvernement à appliquer une politique d’austérité permanente. L’objectif de réduction de la dette prévu dans ce traité signifierait près de 6 milliards € supplémentaires de réduction budgétaire et d’augmentation de taxes, en plus du programme d’austérité de la troïka. Un ‘‘non’’ lors de ce referendum serait une gigantesque gifle au visage de la troïka et du gouvernement. Ce traité est maintenant discuté dans toutes les sections de la CAHWT et du Socialist Party, et nous invitons tous ceux qui se sont impliqués dans la campagne contre la taxe sur les ménages à militer pour le NON.

Au cours des mois à venir, le gouvernement va accroître ses menaces à l’encontre de tous ceux qui ont refusé de payer. Il est clair que la campagne n’a pas perdu de sa vigueur et continue d’instaurer une pression sur le gouvernement. Ce ne sera pas une bataille facile, car le gouvernement est également sous la pression de la troïka. Mais si la campagne garde sa force actuelle, nous pouvons vaincre. Une telle victoire serait une défaite majeure pour le gouvernement, la troïka et les politiques d’austérité et serait accueillie avec grand enthousiasme par tous les travailleurs d’Irlande, mais aussi de toute l’Europe.

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