Régularisation des sans-papiers : bilan après deux mois d’occupation de l’église du Béguinage 

Des collectifs de sans-papiers occupent l’église du Béguinage depuis le 31 janvier, fédérés en tant qu’Union des Sans-Papiers pour la Régularisation (USPR). Depuis le 8 février, le mouvement occupe également de nouveaux lieux, comme l’ULB et la VUB. Quel bilan provisoire tirer de cette lutte afin de la renforcer via un plan d’action et une stratégie claire ?­

Par Lahoucine et Pietro (Bruxelles), article tiré de l’édition d’avril de Lutte Socialiste

Les sans-papiers et le silence de la politique établie

Durant les 5 années du gouvernement Michel, les personnes sans-papiers ont été durement attaquées par des politiques migratoires brutales. Le racisme institutionnel a été aggravé. Mais nous n’avions pas d’illusions quant aux possibilités de changement du nouveau gouvernement. Le secrétaire d’Etat à l’asile et à la migration Sammy Mehdi (CD&V) refuse d’écouter les sans-papiers. Il veut continuer à traiter les dossiers au cas par cas sans rien céder concernant un changement de législation. Une fois de plus, les personnes sans-papiers sont sacrifiées.

Les travailleuses et travailleurs sans-papiers se sont retrouvés en première ligne pendant la pandémie : en soignant des personnes à domicile, en fabriquant des masques, en travaillant sur des chantiers et dans les métiers essentiels. Ils comblent une pénurie structurelle dans ces secteurs tandis que l’Etat regarde ailleurs. Au lieu de permettre aux travailleuses et travailleurs sans papiers de cotiser à la sécurité sociale via leur régularisation, le secrétaire d’Etat préféré les laisser dans la clandestinité. De cette manière les sans-papiers sont exploités par les patrons qui profitent de cette main d’œuvre à bon marché tout en faisant pressions sur l’ensemble des salaires.

Les tendances du mouvement

La pandémie est arrivée à un moment où le mouvement des sans-papiers se cherchait une nouvelle stratégie. La crise a radicalisé le mouvement et différentes approches se sont développées.

Il y a les sans-papiers regroupés dans l’USPR qui en ont eu marre d’attendre et qui ont relancé un mouvement d’occupations pour la régularisation. Leur énergie a réussi à redonner une visibilité à ce combat dans l’opinion publique, notamment avec leurs actions devant le Béguinage. La recherche d’une solidarité large autour des occupations est décisive, la victoire ne s’obtient pas en étant isolés.
Il y a des années de travail accompli par plusieurs collectifs des sans-papiers, mais il faut reconnaître qu’une certaine fatigue s’est installée dans les dernières années en même temps qu’une incapacité à construire des actions de masse.

Le mouvement d’occupations politiques de l’USPR a été capable de répondre à la difficulté de mobiliser dans le contexte difficile de la pandémie. Il a donné une nouvelle visibilité à la cause des sans-papiers avec une chaîne humaine autour de l’église du Béguinage et l’organisation de plusieurs meetings et rassemblements, donc l’action organisée conjointement avec la Campagne Solidarity le 21 mars à l’occasion de la Journée internationale de lutte contre le racisme.

Notre approche

Une nouvelle occasion se présente, il ne faut pas la gâcher en raison d’un manque de clarté stratégique. Les militants sans papiers du PSL ont joué un rôle important dans ce mouvement. Ils essayent de souligner systématiquement la nécessité de se lier au mouvement ouvrier ainsi qu’au récent mouvement « Jeunesse en lutte ». A l’occasion de 8 mars, les femmes sans-papiers se sont mobilisées autour de la Campagne ROSA.

La phase actuelle de la lutte est compliquée, la seule issue est la construction d’une unité solide entre les travailleurs – avec et sans papiers – pour lutter ensemble pour la régularisation. Car, oui, les sans-papiers sont aussi des travailleurs. Nombre d’entre eux se seront d’ailleurs impliqués dans la grève du 29 mars sur les salaires. Il ne peut y avoir de solution sérieuse contre le dumping social sans régularisation de tous les sans-papiers.

En ouvrant le mouvement à des couches plus larges de la société et en le structurant notamment via des assemblées démocratiques et transparentes, il sera possible de politiser toutes les personnes impliquées et de repousser la division qui sert les ennemis de la régularisation. Une victoire exige de rassembler toutes les forces possibles dans la construction d’une véritable relation de forces grâce à un plan d’action national lié aux autres mouvements sociaux.

Les prochaines étapes seront la chaîne humaine qui partira de l’église du Béguinage pour rejoindre l’Office des étrangers le 2 avril et la marche du 24 avril vers Vilvorde, où le Secrétaire d’Etat Sammy Mehdi est également chef de groupe au conseil communal. Ces dates permettront de populariser les revendications du mouvement et de construire un élan vers une mobilisation nationale début juin, après la manifestation du groupe d’action militant La Santé en Lutte.

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