Nigéria : meeting du DSM pour débattre de l'état de la nation

 »Seule une révolution socialiste peut sauver le Nigéria – un pays immensément riche, mais dont la majorité des citoyens sont perpétuellement pauvres » – Segun Sango

Le dimanche 19 février 2012, le Democratic Socialist Movement (DSM, section nigériane du CIO) a organisé un meeting à Lagos, dont le but était de réunir nos membres, et aussi et surtout les nombreux membres potentiels que nous avons rencontrés à Lagos au cours de la grève générale et des actions de masse de janvier dernier contre la hausse du prix de l’essence.

Une discussion extrêmement intéressante a eu lieu sur l’état du Nigéria et sur les perspectives de progrès. Entamant la discussion, Segun Sango (Secrétaire général du DSM) a expliqué que la dernière grève générale en janvier est la confirmation que les masses laborieuses, les jeunes et les pauvres du Nigéria sont bel et bien capables d’accomplir une transformation révolutionnaire au Nigéria.

Lanre Arogundade a ajouté que cette dernière action ne devrait pas seulement renouveler notre confiance en notre capacité d’accomplir le changement ; nous devons également tirer des leçons utiles afin d’assurer la victoire de la lutte future. Une leçon cruciale tirée de la grève générale est le fait que nous avons besoin d’un parti ouvrier de masse afin de prendre le pouvoir politique.

Ceci est crucial, étant donné le fait que la situation va de mal en pis, malgré les promesses de palliatifs afin d’éviter que les gens ne soient trop fortement touchés par la suppression partielle des soi-disant subsides sur l’essence. Les prix de l’alimentation, des transports et d’autres produits et services de base, qui ont flambé au moment de la hausse du prix de l’essence, ne sont pas encore revenus à leur niveau d’avant janvier. D’ailleurs, l’Office national des statistiques a dit que le taux d’inflation dans le pays s’est tout d’un coup hissé à 12,6% en janvier, comparé à 10,6% en décembre, avant la hausse du prix de l’essence.

À présent, la “sonde publique pour la gestion du subside” organisée par l’Assemblée nationale est en train de créer la frénésie des médias ; toutefois, tout cela n’est qu’un cirque : il n’y a toujours aucune preuve fiable de la volonté du gouvernement de réellement faire quelque chose contre la corruption dans le secteur pétrolier.

Cela n’est pas une surprise. L’ensemble de l’appareil gouvernemental lui-même est corrompu ; le capitalisme lui-même est un système de corruption organisée. Tout en prétendant sonder la corruption dans le secteur pétrolier, les membres de l’Assemblée nationale se servent allègrement des parts du gâteau national. De récentes révélations ont montré que les 109 sénateurs vont recevoir 1,7 milliards de naïras par personne (8,2 millions d’euros!) pour pouvoir s’acheter une jeep. Ceci, en plus de toute la flotte de véhicules de luxe qui appartient déjà aux membres de l’Assemblée nationale.

Tout cela se retourne contre les promesses du président Jonathan qui avait dit vouloir s’attaquer au gaspillage de l’argent du gouvernement ; cela montre aussi à quel point aucun des problèmes (la corruption en faisant partie) qui ont fait descendre les masses dans les rues en janvier ne fait l’objet de la moindre attention de la part du gouvernement.

Segun Sango a expliqué que tout ce gaspillage et toute la la corruption de l’élite dirigeante n’est pas quelque chose d’accidentel, mais est une caractéristique du capitalisme. Cette caractéristique n’est d’ailleurs pas le propre du capitalisme au Nigéria, mais également du capitalisme au niveau international, comme nous pouvons le voir sur base de l’avidité des grandes entreprises, des banquiers et des politiciens qui sont en train de mettre l’ensemble de l’économie européenne à genoux, et aussi comme nous pouvons voir la manière dont la facture de la crise est en ce moment présentée aux travailleurs et aux jeunes via une politique d’austérité brutale.

Le capitalisme est un système fondamentalement injuste. Il y a de la richesse dans la société, mais au lieu d’être utilisée pour améliorer le sort de tous, elle est accaparée par les capitalistes, dans le gouvernement comme en-dehors. Un nouveau rapport de l’Office national des statistiques (ONS) montre que les inégalités de revenu au Nigéria se sont accrues de 0,429 en 2004, à 0,447 en 2010 – ce qui indique que nous sommes en présence d’appauvrissement de masse qui a lieu malgré toutes les fables au sujet de la croissance économique.

Le plan de transformation de Jonathan : qu’a-t-il à offrir ?

Selon l’ONS un nombre effarant de 112 519 000 Nigérians vit dans des conditions de pauvreté relative. Ce nombre représente 69% de la population totale du pays, estimée à 163 millions. Plus inquiétant encore, est le fait que le taux de pauvreté s’accroit alors que la croissance du PIB est estimée être de 7,75%. Selon le statisticien en chef de l’ONS, le Dr. Yemi Kale, le taux de pauvreté officielle pourrait même être passée à 71,5% en 2011. De même, 23,9% de la population est sans emploi.

Ces statistiques ensanglantées sont le reflet économique de la faillite de la politique capitaliste néolibérale des régimes précédents, que le plan de transformation du président Jonathan désire maintenir et intensifier. Le plan de transformation est un paquet de réformes néolibérales qui visent la privatisation, la dérégulation et la commercialisation, tout cela dans le but de servir les intérêts des riches. Selon ce plan, la Compagnie électrique du Nigéria sera démantelée pour être vendue pour une bouchée de pain à diverses compagnies privées. L’implication de cela est une hausse du tarif de l’électricité, ce qui va encore plus peser sur les masses laborieuses et les pauvres. Et sans compter les milliers d’emplois qui seront perdus. Les travailleurs de l’électricité sont déjà en train de compter les jours avant de recevoir l’annonce du licenciement de masse qui accompagnera la restructuration.

Déjà l’année passée, il y a eu une hausse du tarif, alors que la vaste majorité de la population n’a même pas l’électricité ou doit la produire soi-même avec des générateurs. Selon l’Association des entreprises du Nigéria, le piètre état du réseau de distribution électrique est le principal facteur qui explique les fermetures d’entreprises, la délocalisation des lignes de production et les centaines de milliers de pertes d’emplois qui ont eu lieu ces dix dernières années.

Cette année, une nouvelle hausse du tarif est en train d’être préparée par le gouvernement fédéral ; c’est même selon eux une des conditions pour une privatisation réussie de l’électricité publique, afin de rendre le secteur plus profitable pour les investisseurs privés. Cela seul expose l’ensemble du processus de privatisation comme n’étant pas une tentative d’améliorer la génération d’électricité, mais comme une simple opération profit. Lorsque les requins spéculateurs en auront totalement pris le contrôle et la possession, les masses devront s’attendre à un déclin drastique de l’accès à l’électricité, tandis que les tarifs grimperont au plafond.

C’est cette même politique anti-pauvres et anti-croissance qui est en train d’être appliquée à d’autres secteurs de l’économie. L’éducation et les soins de santé sont de plus en plus commercialisés. Le camarade Nicholas a raconté lors du meeting son expérience à l’hôpital général public de Lagos, où il a dû payer 30 000 naïras (140 euros) rien que pour les soins prénataux pour sa femme enceinte. Dans un pays où le salaire minimum est d’à peine 18 000 nairas (86 euros) par mois, cette histoire montre bien ce que doivent endurer les familles ouvrières et de la petite classe moyenne pour avoir accès à des soins.

Il ne faut donc guère s’étonner du fait que la plupart des accouchements se passent dans des églises et autres lieux innommables, vu que les familles ne peuvent se permettre le cout élevé des soins de santé. Le même scénario se déroule dans l’éducation. Dans les universités et hautes écoles du pays, les frais d’inscription sont en train de passer à 100 000 nairas (480 euros), voire 200 000 naïras (960 euros) par an, et même, dans le cas de l’Université d’État de Lagos, à 348 000 naïras (1670 euros) ! Il est intéressant de constater que l’ensemble des partis politiques, y compris le Congrès pour l’action du Nigéria (Action Congress of Nigeria, ACN, principal parti d’opposition), sont unis derrière ces attaques néolibérales sur l’enseignement public. En fait, les institutions publiques dans des états gouvernés par l’ACN sont celles dont les frais d’inscription sont les plus élevés.

Tous les partis d’opposition entonnent le même refrain : il n’y a pas d’alternative à la manière de gérer la société, à part la politique néolibérale ». Dans l’état de Lagos, le gouvernement ACN a vendu toute un tronçon routier, l’autoroute express Lekki-Epe, à des requins privés et ce, sous le masque d’un “partenariat public-privé”. La construction de cette route avait débuté dans les années ’80, et tout ce que la compagnie privée devait faire était ajouter une ou deux bandes le long de 49 kilomètres de la route. Même si seuls 6 de ces kilomètres ont été pour l’instant achevés, la compagnie a déjà installé un péage, et prévoit d’en construire deux de plus ! La construction d’un péage sur une route publique a été la source de nombreux troubles et actions de protestation qui ont été cruellement réprimées par le gouvernement.

Le camarade Chineda a raconté une autre fraude du partenariat public-privé organisé par l’ACN à Lagos : le système de transports rapides par bus “Lagbus”. On présente souvent ce système comme un merveilleux exemple de partenariat public-privé réussi, mais la réalité est toute autre. Tout comme la concession de l’autoroute express Lekki-Epe, Lagbus n’est rien d’autre qu’une couverture pour utiliser l’argent public afin de mettre sur pied des entreprises privées pour des pontes du parti et pour leurs copains privés. La compagnie Oando, dont le directeur, Wale Tinubu, est le neveu de Ahmed Bola Tinubu, un des dirigeants politiques de l’ACN, est le seul fournisseur de diesel à Lagbus, alors qu’Oando vend son diesel à un prix plus cher à Lagbus qu’à ses autres clients.

Évidemment, cet arrangement deverait être non-profitable pour une véritable entreprise, mais la réalité est que Lagbus n’est qu’une façade qui sert à faire partir les ressources de l’État vers des poches privées. La majorité du personnel gagne environ 25 000 nairas par mois (120 euros). Les chauffeurs de bus gagnent 35 000 nairas (170 euros), mais il travaillent plus de 60 heures par semaine ! Du fait de la mauvaise gestion, de nombreux bus sont en panne, ce qui signifie qu’il faut bientôt s’attendre à des licenciements. La compagnie a aussi toute une histoire d’attaques sur les droits démocratiques de ses travailleurs à rejoindre un syndicat, tandis que la victimisation est monnaie courante.

Mais il y a en réalité un mode alternatif de gestion de la société capable d’assurer que les ressources de la société soient utilisées pour répondre aux besoins des masses laborieuses et pauvres plutôt qu’à ceux des politiciens bien nourris et des grandes entreprises, tels que nous le voyons aujourd’hui. Ce mode alternatif de gestion de la société que défendent les socialistes, c’est la nationalisation des secteurs-clés de l’économie sous le contrôle et la gestion démocratique du public. Les socialistes s’opposent à toute privatisation, parce que nous pensons que les ressources de la société appartiennent au peuple, et par conséquent doivent être propriété collective. C’est pourquoi nous insistons sur le contrôle et la gestion démocratiques des entreprises nationalisées, afin de pouvoir impliquer les masses laborieuses et pauvres dans la gestion de l’économie et de la société.

La question nationale

Un autre aspect de l’état de la nation que les socialistes et les masses laborieuses doivent analyser avec une grande attention est la question nationale. Cela, d’autant plus qu’auparavant, vu la montée du Boko Haram – un groupe islamiste fondamentaliste du Nord-Est – dont les brutales activités terroristes et assassinats perpétrés au cours des trois dernières années menacent de déstabiliser le pays.

Segun Sango a expliqué que la crise ethno-religieuses qui semble tellement insurmontable est en réalité née du fait que le Nigeria actuel est composé de divers peuples hétérogènes qui ont, sans aucune consultation, été forcés de cohabiter dans un même pays par les colonialistes britanniques, qui n’aspiraient qu’à une exploitation facile et profitable des ressources du pays. Aucun de ces peuples n’a été consulté, il n’y a jamais eu aucune discussion démocratique quant à la volonté ou non de ces différentes nationalités de continuer à vivre ensemble et si oui, sur quelle base.

L’indépendance du Nigeria a été partiellement négociée sur base de cette division ethnique et religieuse ; l’impérialisme britannique a donné le pouvoir à la section de la classe dirigeante qu’il estimait la plus malléable. Toutefois, à cause des positions pro-capitalistes (tant sur le plan de vue économique que politique) des élites dirigeantes de toutes les principales nationalités qui ont formé le gouvernement au Nigeria depuis l’indépendance, les tensions et divisions ethniques et religieuses, plutôt que de s’atténuer, n’ont fait que s’aggraver, reflétant la lutte des diverses élites nationales pour s’accaparer leur part de la richesse sociale.

Ce n’est pas pour rien que le Nord compte le plus haut niveau de pauvreté et d’analphabétisme, malgré le fait que des élites du Nord ont dirigé le Nigéria pendant des décennies. Le dernier rapport de l’ONS a montré que le Nord-Ouest et le Nord–Est avaient en 2010 les plus haut taux de pauvreté du pays, à 77,7% et 76,3% respectivement. De tous les 36 états de la fédération nigérianne, c’est Sokoto qui a le plus haut taux de pauvreté : 86,4% !

C’est pourquoi les socialistes défendent constamment le fait que sans justice au niveau de la répartition de la richesse sociale, il ne peut y avoir le moindre espoir d’une solution durable à la question nationale. Le DSM appelle à une conférence nationale souveraine véritablement démocratique et indépendante qui soit dominée par des représentants élus des travailleurs, des pauvres, des jeunes et différents groupes ethniques afin de discuter de si oui ou non le Nigéria a encore un sens, et si oui, selon quelles modalités.

Cependant, une conférence nationale souveraine indépendante soulève la question de quel gouvernement mettra en vigueur ses résolutions. Ce ne sera certainement pas le gouvernement des pillards pour qui le statu quo injuste peut bien continuer vu qu’ils en tirent profit. Cela soulève la question de la nécessité d’un parti politique ouvrier capable de se battre pour le pouvoir politique et d’amener un gouvernement réellement démocratique des travailleurs et des pauvres, le seul à même de faire appliquer les décisions d’une telle conférence nationale souveraine.

Les socialistes soutiennent le droit à l’auto-détermination des peuples. Toutefois, nous devons bien expliquer que séparer ou diviser le Nigéria ne constituera pas une solution magique à la crise du sous-développement, du chômage et de la misère qui ravage les masses laborieuses du Nord, de l’Ouest, de l’Est, de la Ceinture moyenne et du delta du Niger.

Ce n’est pas pour rien que les gouverneurs et politiciens de la région du delta du fleuve Niger, d’où provient la plupart du pétrole du pays, sont aussi parmi les plus corrompus. Malgré les 13% de dérivés que les états de cette région reçoivent tous les mois du gouvernement fédéral en plus des allocations mensuelles, le niveau de sous-développement, de misère, de chômage et d’effondrement des infrastructures publiques telles que routes, enseignement et soins de santé, est alarmant. L’élite dirigeante de la région du delta du Niger ne fait qu’amasser et amasser tout l’argent, en abandonnant son peuple à une vie de misère et de pénurie. Si ces mêmes éléments devaient se retrouver à la tête d’une éventuelle nation indépendante du Delta du Niger, il ne faudrait alors pas s’attendre à la moindre amélioration des conditions de vie de la population. Cette perspective vaut également pour toutes les zones géopolitiques où les élites capitalistes dirigeantes sont aussi corrompues et anti-pauvres.

Tout en soutenant le droit à l’auto-détermination, nous insistons sur la nécessité pour les masses laborieuses et les pauvres de se battre pour un gouvernement des travailleurs et des pauvres qui n’appliquera pas une politique néolibérale de privatisations, mais qui utilisera les ressources de la société dans l’intérêt de tous. Les socialistes pensent qu’une sécession sur une base capitaliste n’amènera rien de plus que la continuation de la même inégalité de revenus et de misère de masse au milieu d’un pays d’abondance. Par conséquent, les socialistes défendent un Nigéria unifié, mais cette fois-ci sur base de principes démocratiques, d’une justice socio-politique et du socialisme.

La direction travailliste

La manière dont la récente grève générale “illimitée” a été tout d’un coup interrompue avant qu’elle n’atteigne ses objectifs n’a fait que souligner encore plus le fait que les dirigeants syndicaux actuels n’ont aucun programme alternatif capable de mener les travailleurs dans la lutte pour le pouvoir politique. La grève générale et les actions de masse qui ont fait descendre des dizaines de millions de Nigérians dans les rues et ont dans les faits coupé toute l’économie du pays pendant plus d’une semaine, ont soulevé la question du pouvoir politique. Toutefois, les dirigeants travaillistes n’étaient pas préparés pour cela, ni idéologiquement, ni politiquement, malgré l’énorme potentiel organisationnel que représentent les syndicats au Nigéria. Ceci explique pourquoi ils ont été si facilement mis sous pression par le gouvernement qui a accusé le mouvement d’œuvrer avec l’opposition pour chasser Jonathan de son fauteuil de président avec son slogan de changement de régime.

Il est intéressant de constater que la direction travailliste n’a pas officiellement soulevé ce slogan. D’ailleurs, aucun des partis d’opposition, aucun des politiciens de l’opposition qui ont participé à l’assemblée quotidienne place de la Liberté Gani Fawehinmi à Ojota Lagos n’ont repris ce slogan de manière consciente. Seuls le DSM et le JAF (Joint Action Front, une plate-forme de lutte syndicale) ont soulevé ce slogan de manière consciente, mais l’ont complété par un appel à une alternative économique et politique ouvrière. Le JAF a appelé à un changement de système. Sur nos tracts, nos bannières, dans nos journaux, nous proposions le slogan “À bas le gouvernement Jonathan, pour un gouvernement des travailleurs et des pauvres”. Cependant, ce qui a réellement effrayé l’élite dirigeante était le fait qu’à partir du troisième jour de grève, le slogan “Jonathan dégage!” commençait à devenir très populaire parmi de larges couches de manifestants à Lagos et à travers tout le pays. Il était très clair que les événements étaient en train d’atteindre un point qui pouvait être dangereux pour le régime et au final pour le système.

Par conséquent, les dirigeants travaillistes ont dû intervenir pour se dissocier spécifiquement de l’appel à un “changement de régime”, et ont déclaré la fin de la grève au moment où ils se sont considérés incapables de mener les travailleurs plus en avant vers l’étape suivante qui était la lutte pour le pouvoir politique. De plus, les dirigeants travaillistes actuels ne sont pas fondamentalement opposés à la politique néolibérale anti-pauvre de privatisation et de dérégulation ; ils ne désirent au mieux qu’à l’encadrer afin de lui donner un visage plus humain. Le principal élément qui faisait défaut à cette grève massive, tout comme aux mouvements précédents, était l’absence d’un parti politique ouvrier de masse, qui aurait pu se saisir de cette opportunité afin de fournir une direction au mouvement, surtout à partir du moment où la direction travailliste battait en retraite, et afin de cristalliser la colère et le potentiel du mouvement de masse jusqu’à la conquête du pouvoir politique. C’est là une des raisons pour lesquelles nous avons constamment appelé les socialistes, les travailleurs, les artisans et les jeunes à diffuser l’idée de la nécessité de la formation d’un parti ouvrier de masse.

Un parti de masse des travailleurs et des pauvres

La meilleure manière de rapidement organiser une puissante alternative politique capable de concourir pour le pouvoir lors des prochaines élections en 2015 et après est de voir le mouvement ouvrier jouer un rôle dirigeant dans la formation d’un tel parti. Mais cela ne peut se produire sans une direction syndicale combative, capable de comprendre la tâche historique de la classe ouvrière dans la direction des autres couches des opprimés dans la lutte pour le pouvoir politique. L’exemple du Labour Party formé par le NLC (Confédération des syndicats du Nigéria) mais abandonné à des carriéristes et à des politiciens professionnels montre que cette compréhension n’existe pas chez les dirigeants syndicaux actuels.

Par conséquent, l’agitation en direction d’un parti de masse des travailleurs doit être reliée à une campagne parmi la base syndicale pour une direction syndicale combative. Elle doit également être liée à la revendication de la démocratisation des syndicats et à l’implication de la base des travailleurs dans la gestion des syndicats et dans la prise de décision collective quant à la manière dont le mouvement ouvrier doit répondre aux attaques néolibérales du gouvernement.

La tâche de la construction d’un parti ouvrier de masse est de la plus haute importance. Comme l’a répété Segun Sango, tout en menant la campagne pour la formation d’un tel parti ouvrier de masse, nous devons saisir chaque opportunité, quelles que soient les limitations et les difficultés, pour construire une alternative politique socialiste dès à présent. C’est dans ce cadre que se pose la question de la transformation du DSM en un véritable Socialist Party, reconnu officiellement. Bien entendu, les lois électorales antidémocratiques présentent une myriade d’obstacles financiers et autres sur la voie vers l’enregistrement d’un véritable parti capable de représenter et de se battre pour les intérêts des masses laborieuses, des jeunes et des pauvres. Mais avec notre détermination, nous pouvons les surmonter.

Contrairement à ce qui s’est produit lors des deux dernières élections, où aucune alternative politique n’existait pour la classe ouvrière et la jeunesse, même un petit Socialist Party nous offrirait une occasion d’intervenir dans les élections et de mettre en avant un programme économique et politique socialiste.

Selon Lanre Arogundade, une organisation telle que la nôtre est nécessaire pour fournir aux masses laborieuses une issue à la crise du capitalisme au Nigéria. Il y a par conséquent la nécessité de redoubler d’efforts dans la construction du DSM. Cela inclut de faire en sorte que notre message puisse atteindre toutes ces personnes avides de changement que nous avons rencontrées au cours de la dernière gréve générale, et que nous nous battions politiquement pour les gagner à la cause du socialisme.

Le meeting s’est clôturé sur un appel aux dons qui a récolté la somme de 5500 naïras (26€), plus 3000 naïras (14€) en promesses de dons.

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