Cela a dû être un grand soulagement pour beaucoup lorsque le gouvernement a annoncé qu’il mettrait le vaccin gratuitement à la disposition de tous. Un soulagement pour celles et ceux qui craignaient une facture supplémentaire alors que l’incertitude financière de ces derniers mois, qui n’est pas destinée à disparaître. Mais l’ampleur de la mise à disposition du vaccin et le prix que la sécurité sociale aura à payer dépendront des marges bénéficiaires des grandes entreprises pharmaceutiques.
Par Michael
Alors que beaucoup de gens ne peuvent plus se permettre de dépenses supplémentaires, même de quelques dizaines d’euros, Albert Bourla, le CEO de Pfizer (la société qui a annoncé les bons résultats obtenus par son candidat vaccin à la mi-novembre), a pu vendre pour 5,6 millions de dollars (plus de 4,7 millions d’euros) d’actions le jour où la société a fait son annonce. Depuis lors, d’autres sociétés pharmaceutiques ont annoncé les résultats de leurs vaccins en cours de développement, et la valeur boursière de ces sociétés a grimpé en flèche. Les grands actionnaires se frottent déjà les mains : non seulement ils bénéficient désormais d’actions qui atteignent des sommets, mais ils savent aussi que leurs vaccins seront achetés en masse.
Si les vaccins sont offerts gratuitement à la population par les autorités, il s’agira bien sûr d’un transfert direct des caisses de notre sécurité sociale vers les poches des actionnaires de l’industrie pharmaceutique. C’est la nature mortifère du capitalisme, une société où une minuscule minorité amasse des fortunes avec une pandémie synonyme de maladie, mort, stress, solitude et pauvreté pour la majorité de la population.
Mais il y a plus. BioNTech, la société qui a développé le vaccin avec Pfizer, a pu compter sur un soutien de 375 millions d’euros du gouvernement allemand. Le nouveau vaccin de Moderna, annoncé le 17 novembre, a été entièrement développé avec des fonds publics. En plus, ce secteur ne paie pratiquement pas d’impôts. La collectivité paie donc elle-même un transfert de milliards d’euros dans les poches de Big Pharma.
Ce ne sont pas les actionnaires qui assurent notre santé. Au contraire : ce transfert de milliards à Big Pharma pourrait être utilisé intégralement pour les soins de santé, pour plus de personnel, de meilleures conditions de travail et un système d’urgence permanent pour s’attaquer immédiatement aux pandémies.
Ce sont les travailleuses et les travailleurs de l’industrie pharmaceutique qui ont créé et produit le vaccin, et non les CEO et les actionnaires. Avec le personnel de la santé et des secteurs essentiels, ils disposent du meilleur savoir-faire et de la meilleure expertise pour organiser et gérer la diffusion du vaccin. Toute nouvelle stratégie de déconfinement liée à la vaccination doit reposer sur le contrôle et la gestion démocratiques du vaccin par les travailleuses et les travailleurs.
On nous dira qu’il faut d’abord être solidaire avec les populations qui en ont besoin. Absolument. Mais si l’on se base sur les marges bénéficiaires de Big Pharma, nous n’utiliserons jamais tout le potentiel de la puissance de production pharmaceutique en Belgique.
Ce n’est donc pas seulement ce vaccin qui doit devenir un bien public. L’industrie pharmaceutique dispose de ressources de production et de technologies qui sont socialement nécessaires. La crise sanitaire l’a clairement montré. L’ensemble du secteur pharmaceutique doit être exproprié et placé sous le contrôle et la gestion démocratiques des travailleurs. Ce n’est qu’alors qu’il pourra fonctionner en fonction de notre santé, plutôt qu’en fonction du profit.